Environnement

« Il faut arrêter de nous prendre pour des imbéciles »

Dans une charge à fond de train contre le monde politique, Diane Dufresne et 200 personnalités connues à l’international lancent un cri d’alarme pour l’avenir de la planète.

« Le plus grand défi de l’histoire de l’humanité. » L’image est forte, le message, sans équivoque.

À l’initiative de l’actrice française Juliette Binoche et de son compatriote Aurélien Barrau, astrophysicien, quelque 200 personnalités principalement issues du milieu artistique ont signé hier une missive dans le quotidien Le Monde appelant le pouvoir politique à « agir fermement et immédiatement » devant le « cataclysme » environnemental qui menace la planète.

« Réchauffement climatique, diminution drastique des espaces de vie, effondrement de la biodiversité, pollution profonde des sols, de l’eau et de l’air, déforestation rapide : tous les indicateurs sont alarmants. Au rythme actuel, dans quelques décennies, il ne restera presque plus rien », peut-on lire dans la courte lettre. « Nous considérons donc que toute action politique qui ne ferait pas de la lutte contre ce cataclysme sa priorité concrète, annoncée et assumée, ne serait plus crédible », y ajoute-t-on.

« C’est une question de survie. »

Parmi la liste de signataires, pour la plupart des vedettes internationales, on retrouve des noms aussi connus que Charles Aznavour, Emmanuelle Béart, Bradley Cooper, Marion Cotillard, Catherine Deneuve, Sophie Marceau, Patti Smith et Kristen Stewart, pour n’en nommer que quelques-uns. À ceux-ci s’ajoutent trois Québécois, soit la chanteuse Diane Dufresne, le dramaturge Wajdi Mouawad ainsi que le chanteur Rufus Wainwright.

Apposer son nom au bas de cette lettre est un engagement lourd de sens pour Mme Dufresne, qui partage le même agent en France que Juliette Binoche.

« On me demande pourquoi j’ai une sensibilité envers l’écologie : tout simplement parce que je suis un être humain qui a une conscience, qui connaît son rôle de citoyenne », a-t-elle dit en entrevue avec La Presse en fin de journée.

« Pourquoi nos politiciens ne parlent-ils pas d’environnement ? Pourquoi ne sont-ils pas alarmistes ? Ce qui arrive présentement est très grave, et il faut arrêter de nous prendre pour des imbéciles », a-t-elle ajouté, avec une verve qui fait la réputation de cette icône de la chanson québécoise.

Sans viser précisément les partis engagés dans la présente campagne électorale – où l’environnement est loin d’être le sujet à l’avant-scène –, l’artiste de 73 ans aurait néanmoins quelques questions à adresser aux candidats.

« Je les vois sourire sur leurs pancartes, mais pourquoi sourient-ils ? Pourquoi sont-ils en politique si ce n’est pas pour s’occuper des gens ? C’est bien beau, parler des hôpitaux, mais si on s’occupait de l’écologie, on serait moins malades. Ça ne devrait pas être des choses séparées. »

— Diane Dufresne

Selon une analyse publiée par Radio-Canada hier, le Parti libéral et la Coalition avenir Québec n’ont fait aucune annonce concernant l’environnement depuis le lancement de la campagne électorale, le 23 août.

Démission de Hulot

La lettre publiée hier dans Le Monde est une réaction explicite à la démission-surprise de Nicolas Hulot, ministre français de la Transition écologique au sein du cabinet Macron, lundi dernier.

« Je ne veux plus me mentir », avait déclaré M. Hulot en direct sur France Inter, sans avoir préalablement prévenu le président de ses intentions.

Dans la foulée, l’ex-ministre avait déploré son impuissance à faire avancer les enjeux environnementaux au sein du gouvernement et dénoncé l’influence des lobbys sur les élus.

Au micro d’Europe 1, hier, M. Hulot a ajouté espérer que sa démission « ne sera pas vaine, qu’elle provoque un sursaut dans la société, […] qu’on change l’organisation pour être plus opérationnels et plus efficaces, et pas qu’au gouvernement ».

Diane Dufresne espère elle aussi que ce coup d’éclat servira d’électrochoc, en France comme ailleurs, et que cette sortie de personnalités en vue donnera une nouvelle résonance à la cause.

« On croit que les politiciens vont nous aider, mais on constate qu’ils ne travaillent pas pour nous. Nicolas Hulot est parti, il a été honnête envers lui-même. Peut-être qu’il rendra un plus grand service en se retirant de la politique. »

Racontant s’être « branchée sur l’écologie » par le truchement de conférences de l’astrophysicien québécois Hubert Reeves dans les années 90, Diane Dufresne en appelle maintenant à la contribution de chaque citoyen et chaque citoyenne pour améliorer la situation.

« Si chaque communauté travaille, se sert de son intelligence, c’est là que les choses vont changer.

« C’est le moment de se prendre en main. »

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