L’OBÉSITÉ, OU LE JEU DE L’AUTRUCHE

L’Institut Fraser

joue à l’autruche

« Il faut tout un village pour élever
un enfant »

— Proverbe africain

Selon un rapport de l’Institut Fraser, il n’y a pas d’épidémie d’obésité au Canada puisque le taux de surpoids de la population est stable depuis 2003. On ajoute également que le taux d’obésité n’est passé que de 15,3 % à 18,4 %, ce qui ne justifie nullement les adjectifs endémiques utilisés par les médias ou les politiciens pour qualifier ce constat.

Si je résume, un Canadien sur cinq souffre d’obésité, mais on joue à l’autruche en continuant de prétendre que la situation est normale et stable ? Je crois que le problème doit être abordé dans sa globalité, sous l’angle de la santé publique et non dans la spécificité du simple surplus de poids.

Sans vouloir me lancer dans une guerre de chiffres et de statistiques, je crois qu’il est facile de constater que la population en général est en moins bonne forme physique qu’il y a quelques années. J’enseigne l’univers social au secondaire depuis 13 ans et je vois chaque jour les effets de cette nouvelle réalité sur les adolescents. De toute l’histoire, ils n’ont jamais eu les pouces aussi musclés et agiles. Merci aux messages textes sur les cellulaires, au clavardage sur les réseaux sociaux et aux consoles de jeux vidéo.

Lorsqu’il s’agit de fournir un effort physique qui dépasse à peine quelques minutes, c’est l’hécatombe où se mélangent les excuses pour diminuer la cadence et les billets médicaux justifiant une exemption. La sédentarité menace grandement la santé de nos jeunes tout autant que leur manque de connaissances en ce qui concerne les saines habitudes alimentaires. Au royaume de l’efficacité, la nourriture industrielle domine la boîte à lunch des élèves dans toutes les cafétérias du pays.

Je parle ici par expérience. Lorsque j’étais moi-même au secondaire, j’ai grandement souffert des contrecoups d’une obésité qui allait devenir morbide à peine quelques années plus tard. Deux cents livres, puis 300, et même jusqu’à 400, il n’y avait plus aucune limite. Heureusement, grâce à l’activité sportive, la bonne nutrition et une motivation sans borne, j’ai réussi à perdre par mes propres moyens plus de 150 livres en une seule année. Par contre, je suis conscient que je fais partie des exceptions à cette règle qui mène généralement vers une espérance de vie réduite.

Depuis, je m’efforce d’inspirer mes élèves à bouger plus et à manger mieux. Pour la seconde année, je participerai avec un groupe de jeunes de 4e secondaire au Grand défi Pierre Lavoie, une course à relais de 270 kilomètres entre Québec et Montréal. Chaque semaine, nous suons pour nous entraîner pour ce défi colossal. Au collège Mont-Saint-Louis où j’enseigne, plusieurs activités parascolaires prônent de saines habitudes de vie : les Rendez-vous gastronomique où les élèves apprennent à cuisiner ou le Club plein air qui les incite à la pratique de différentes activités sportives… à l’extérieur ! Mais ceci est insuffisant et s’adresse à un nombre d’élèves restreint.

Chacun doit mettre l’épaule à la roue pour régler une fois pour toutes ce problème de santé publique. Oui, nous avons tous une responsabilité personnelle face à nos choix de consommateur, mais, pour moi, la seule solution durable passe par l’éducation. Il est donc du devoir du gouvernement en place d’agir de façon concrète dans ce dossier.

Que ce soit via des subventions pour l’achat de matériel ou la construction de nouvelles infrastructures sportives, un réaménagement de l’horaire scolaire pour permettre l’ajout de cours d’éducation physique additionnels, la réintégration des notions alimentaires enseignées autrefois dans le défunt cours d’économie familiale, l’octroi de budgets supplémentaires pour engager des animateurs spécialisés qui offriront plus d’activités parascolaires ou la bonification des crédits d’impôt pour inciter les gens à bouger plus, il faut agir !

C’est collectivement que nous devons redresser la situation et non en déresponsabilisant les autorités gouvernementales d’agir, comme le suggère l’Institut Fraser.

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