Agriculture

Les cas d'exposition aux pesticides ont plus que doublé

Les cas d’exposition aux pesticides traités annuellement par le Centre antipoison du Québec ont plus que doublé. Un total de 1761 cas de contact avec des antimites, fongicides, herbicides, insectifuges ou insecticides ont été rapportés en 2010, contre seulement 868 en 2008.

Du lot, 99 étaient des accidents de travail en lien avec des pesticides. Encore là, il s’agit d’une forte augmentation par rapport aux 23 accidents de travail déplorés en 2008 (le Centre antipoison tient des statistiques bisannuelles).

« Nous ne traitons que des expositions aiguës, a dit à La Presse Anne Letarte, conseillère en soins infirmiers au Centre antipoison. Pas les cas de travailleurs qui sont en contact avec les pesticides pendant plusieurs mois, comme ceux qui font les traitements de pelouses. »

Ce boom des expositions aux pesticides n’a pu être expliqué par Mme Letarte. « Je ne pense pas qu’il y ait eu de changement dans notre façon de traiter les appels », a-t-elle indiqué.

Il se vend beaucoup de pesticides au Québec : 3,983 millions de kg d’ingrédients actifs en 2009, un chiffre toutefois en baisse de 4,5 % par rapport à l’année précédente. Mais les ventes de pesticides agricoles ne chutent pas. Elles ont plutôt augmenté de 1,3 % entre 2008 et 2009.

Lien entre Parkison et pesticides reconnu en France

Or, « si vous me demandez si les producteurs agricoles se protègent suffisamment lors de l’utilisation de pesticides, je vous répondrai rapidement non », a indiqué Onil Samuel, conseiller scientifique santé et environnement à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

À court terme, les pesticides sont de moins en moins toxiques de façon sévère, si bien que les travailleurs agricoles nient le danger. « Les effets suspectés des pesticides sur la santé sont plus à long terme, a dit M. Samuel, qui donne des conférences à ce sujet aux agriculteurs. Ils ne sont ni visibles ni évidents, ce qui amène moins les gens à se protéger. »

Plusieurs pesticides ont été identifiés comme potentiels cancérigènes, ou ayant des effets sur la reproduction, le développement, les systèmes immunitaire et endocrinien. Exemple : le risque de développer la maladie de Parkinson semble « augmenter avec la durée de l’exposition aux pesticides », a illustré M. Samuel. La France a d’ailleurs reconnu le Parkinson comme maladie professionnelle des agriculteurs en mai 2012, établissant un lien de causalité avec l’usage des pesticides.

En 2012, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) n’a étonnamment noté aucun cas de lésion professionnelle ayant comme « agent causal » un pesticide. Aucun cas non plus en 2011, 2010 et 2009, a indiqué Hélène Simard, porte-parole de la CSST. « Tous les travailleurs agricoles ne sont pas nécessairement inscrits à la CSST », a-t-elle précisé.

Santé Canada réévalue le glyphosate

Les études inquiétantes associant le glyphosate – herbicide le plus vendu au Québec et dans le monde – à divers problèmes de santé se multiplient particulièrement. « Il va falloir que les organismes qui font l’homologation des pesticides regardent comme il faut ces données incriminantes, au lieu de les retirer uniquement pour des raisons méthodologiques, a estimé M. Samuel. Il faut exiger de nouvelles études pour tirer au clair les inquiétudes soulevées. »

Santé Canada réévalue présentement le glyphosate, pour déterminer s’il continue « à respecter les normes scientifiques modernes » et peut toujours être homologué au Canada. « La réévaluation devrait prendre fin en 2014 », a indiqué Sean Upton, agent des relations avec les médias de Santé Canada.

Ce ministère fédéral « examine des études toxicologiques pour évaluer la possibilité de divers effets, notamment sur la reproduction et le développement, le système endocrinien, le système nerveux et pour évaluer le potentiel cancérigène », a précisé M. Upton. Au besoin, « Santé Canada prendra des mesures réglementaires à n’importe quel moment » pour protéger la santé humaine et l’environnement, a-t-il assuré.

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