GENS D'AFFAIRES SOUVERAINISTES

Un club discret de gens d’affaires souverainistes

Au début du mois, environ 70 personnes du milieu des affaires assistent à un discours de l’ancien premier ministre du Québec Bernard Landry à l’Institut d’hôtellerie et de tourisme du Québec, à Montréal. En apparence, il s’agit d’un événement, comme tant d’autres, organisé par une chambre de commerce ou d’autres organismes de gens d’affaires. À une exception près : les gens d’affaires dans la salle sont tous souverainistes.

Comme peu (pas ?) de gens d’affaires souverainistes affichent leurs convictions politiques sur la place publique, la liste des membres est tenue secrète. Le nom du groupe, le Réseau des dirigeantes et dirigeants d’entreprises, ne fait même pas référence à la souveraineté. L’idée d’un groupe de gens d’affaires souverainistes revient à l’ancien premier ministre du Québec Bernard Landry, qui en avait créé un en 1996 après le référendum. 

À l’époque, le Réseau des dirigeants d’entreprises comptait 150 membres. La liste des membres était secrète. « Nous avions un site web à la fin, mais c’est tout », dit Daniel McGown, qui a siégé pendant quelques années au conseil d’administration de l’organisme.

Quand il est devenu premier ministre du Québec et chef du Parti québécois en 2001, Bernard Landry a songé à intégrer ce groupe au PQ. Comme il l’avait fait pour le parti des Syndicalistes et progressistes du Québec libre! , communément appelé SPQ Libre!. « Ils [les gens d’affaires membres] voulaient, mais je suis parti trop vite, dit M. Landry, qui a perdu les élections de 2003 puis a démissionné de son poste de chef du Parti québécois en 2005.

« Je voulais trois groupes à l’intérieur du PQ : les entrepreneurs pour l’indépendance, les écologistes pour l’indépendance, et le SPQ Libre! [les syndicats]. Mon plan était équitable. »

— Bernard Landry, ancien premier ministre du Québec

En 2003, après la défaite électorale du PQ qui retourne dans l’opposition, le groupe cesse ses activités. Jusqu’au début du mois avec ce discours de Bernard Landry à l’Institut d’hôtellerie et de tourisme. Des membres ont été désignés pour remettre sur pied l’organisme. Après les élections, un comité de direction sera formé. La liste des membres reste secrète en attendant que les membres se prononcent sur le sujet.

ANONYMES

Le secrétaire du groupe, Daniel McGown, est bien placé pour comprendre ce dilemme sur l’anonymat des gens d’affaires souverainistes. Banquier de profession, il a notamment été vice-président régional au Québec de First City Trust, une institution financière de la Colombie-Britannique. Il n’a jamais milité au PQ ni fait valoir ses opinions politiques avant de prendre sa retraite en 1998.

« Je n’en ai jamais parlé. Ça n’aurait pas été bien vu dans un milieu hautement fédéraliste », dit M. McGown, qui agit cette élection-ci comme agent officiel du candidat péquiste dans Brome-Missisquoi, René Beauregard.

Après les élections du 7 avril, les membres du Réseau des dirigeantes et dirigeants d’entreprises auront ensuite d’autres décisions à prendre. S’inscriront-ils officiellement comme groupe associé au PQ comme le SPQ Libre! ? Demanderont-ils un siège au Conseil de la souveraineté ? En cas d’inscription officielle à ces organismes, le Réseau des dirigeantes et dirigeants d’entreprises pourra-t-il vraiment garder son anonymat ?

« Une option serait de garder la liste des membres secrète, mais que les membres du C.A. soient connus, dit Daniel McGown. Comme nous n’avons pas de politique pour l’instant, nous avons décidé de ne révéler l’identité d’aucun de nos membres. Mais ce serait bien que davantage de gens d’affaires s’affirment publiquement, comme Pierre Karl Péladeau l’a fait. »

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