Crise en Syrie

Roméo Dallaire plaide pour l’envoi de troupes

Aujourd’hui sénateur, le général Roméo Dallaire était à la tête des troupes de l’ONU au Rwanda, en 1994, quand le pays a été frappé par un génocide qui a fait 800 000 morts en 100 jours. La Presse l’a joint cette semaine.

Q. Que pensez-vous de la volonté des États-Unis d’intervenir en Syrie ?

R. Je suis surpris – et heureux – de voir que des gouvernements prennent la question syrienne au sérieux. Ça fait près de trois ans qu’on aurait dû intervenir. Et pas seulement par des frappes aériennes, qui ne régleraient pas le problème. La communauté internationale doit envoyer des troupes pour faire cesser les hostilités. Peut-être pas 67 000 soldats comme en Bosnie, mais une force considérable et bien équipée. Au Rwanda, si on avait eu quelques milliers de soldats, on aurait pu faire une différence. Malheureusement, les politiciens ne semblent pas souhaiter déployer de telles ressources.

C’est la question des armes chimiques qui a finalement fait bouger le dossier syrien…

C’est toujours la même chose. Les grandes puissances ignorent le problème et, tout d’un coup, un événement frappant sort les gens de leur torpeur. Les crimes contre l’humanité deviennent évidents. À Sarajevo, [le président américain Bill] Clinton ne voulait pas intervenir. Un jour, un missile est tombé sur la place du marché, et après, toute la planète voulait intervenir. Tout d’un coup, on ne peut plus ignorer le problème, et c’est ce qui est en train de se passer avec l’utilisation de l’arme chimique en Syrie.

Vous avez participé à l’élaboration de la doctrine de la Responsabilité de protéger. Comment expliquer que l’Occident soit si réticent à agir en Syrie ?

Lorsque la doctrine de la Responsabilité de protéger a été adoptée, les pays en développement ne criaient pas de joie, car ils craignaient une invasion des pays puissants pour un oui ou un non. Depuis quelques années, ils ont mieux compris les piliers de la doctrine. Maintenant, ce sont les grandes puissances qui sont réticentes. Les politiciens réalisent que la Responsabilité de protéger peut les entraîner à envoyer des soldats dans les conflits lointains et complexes. Leur intérêt national n’est pas touché, alors ils n’ont pas envie de prendre des décisions impopulaires pour aider des populations menacées.

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