Opinions Élections Québec 2014

La « dollarisation » du Québec

La politique monétaire du PQ rapproche davantage le Québec de l’Amérique latine que de l’Europe.

Madame Marois proposait cette semaine qu’un Québec séparé du Canada adopterait le dollar canadien. Cette décision de « dollariser » un Québec indépendant reviendrait à abdiquer tout contrôle sur la politique monétaire, tout comme l’ont fait l’Argentine, l’Équateur et le Salvador en adoptant le dollar américain pour contrer l’hyperinflation causée par l’augmentation débridée de leur masse monétaire respective. Il ne resterait au Québec souverain que sa politique fiscale et budgétaire pour apporter des changements à l’économie.

Les péquistes font miroiter l’image de l’Union européenne quand vient le temps d’expliquer ce que serait la situation économique d’un Québec séparé du Canada. Or, en Europe, le Conseil des gouverneurs de la banque centrale européenne regroupe les gouverneurs des banques centrales des dix-huit pays de la zone euro. Au Canada, la cible de maîtrise de l’inflation (c.-à-d. le taux de change) est établie conjointement par la Banque du Canada et le gouvernement fédéral (qui comprend des élus du Québec) qui se consultent régulièrement à propos de l’orientation de la politique monétaire.

Advenant la séparation, le Québec serait dépendant d’un taux de change fixé par le Canada et perdrait l’option d’influencer celui-ci pour contrôler l’inflation ou favoriser ses exportations. Un Québec souverain, comme l’a suggéré Madame Marois, pourrait demander une participation au sein de la haute direction de la Banque du Canada, ce qui engendrerait assurément des négociations ardues. Entretemps, il ne resterait plus au Québec qu’à s’adapter aux décisions de la Banque et d’espérer que la politique monétaire canadienne soit en accord avec ses propres intérêts économiques.

À ce stade, soulignons qu’un Québec dollarisé devrait sacrifier les gains relatifs au seigneuriage, revenus qui reviennent à l’autorité monétaire quand les coûts d’impression d’une devise sont inférieurs à la valeur intrinsèque de celle-ci. Le Canada pourrait ainsi adopter une politique inflationniste pour financer des dépenses publiques alors que le Québec devrait simplement se satisfaire d’une devise dépréciée.

L’option proposée par Madame Marois nous dessine un profil de perdant et réduirait le Québec, comme certains pays d’Amérique latine, à être à la merci d’une devise et d’une politique monétaire fixées et décidées par d’autres.

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