Alimentation

Quand le saumon de l’Atlantique vient du… Chili

« Filet de saumon Atlantique frais », annonçait récemment la circulaire du Marché Richelieu. Alléché, un Montréalais s’est rendu dans une épicerie de cette chaîne pour acheter ce poisson en solde. Déception : il a ensuite lu, en petits caractères sur l’étiquette, que ce saumon provenait d’un élevage au… Chili. Sûrement un effet de la montée du niveau des océans, si l’Atlantique se mélange au Pacifique !

« Je trouve que c’est malhonnête de nous vendre du saumon chilien en faisant de la publicité pour du saumon de l’Atlantique », a écrit le consommateur à Metro Richelieu. La chaîne s’est défendue en faisant valoir que le saumon de l’Atlantique, ou Salmo salar en latin, est la façon d’appeler l’espèce. « Nous n’avons pas le droit de changer le nom de l’espèce, même s’il est élevé ailleurs », a répondu un préposé du service aux consommateurs de Metro Richelieu.

Beaucoup se font berner : 76 % des consommateurs de saumon de Montréal pensent que la majeure partie du saumon frais vendu dans leur collectivité provient du Canada atlantique, selon une étude faite par Environics Research Group réalisée pour l’Alliance de l’industrie canadienne de l’aquaculture.

Le Chili, grand producteur de saumon Atlantique

« Le saumon Atlantique est effectivement une espèce. Sur le fond, il n’y a donc pas tromperie, a confirmé Jean-Claude Brêthes, titulaire de la chaire UNESCO en analyse intégrée des systèmes marins et professeur à l’Institut des sciences de la mer de Rimouski. Le Chili est, avec la Norvège, un des grands producteurs mondiaux de cette espèce en élevage. »

« Metro Richelieu a raison. C’est un peu aberrant, mais c’est comme ça, a ajouté Louis Bernatchez, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en génomique et conservation des ressources aquatiques et professeur de biologie à l’Université Laval. C’est exactement le même produit que s’il avait été élevé au Nouveau-Brunswick. On a déjà de la difficulté à bien étiqueter les bonnes espèces, on a beaucoup de chemin à faire pour identifier correctement les origines à l’intérieur d’une même espèce. Mais c’est hautement souhaitable. »

« La seule façon d’éviter la confusion serait de rendre obligatoire l’indication claire de la provenance sur l’étiquetage, a observé M. Brêthes. Cela se fait en France, même si cela reste imparfait. On y écrit “pêché dans l’Atlantique Nord”, ce qui n’est pas très instructif, mais c’est un début. » Marché Richelieu a bien indiqué l’origine sur l’étiquette; il reste à le faire dans les circulaires.

Pêche commerciale interdite

Le consommateur était aussi mécontent de constater que son saumon n’avait pas été pêché en mer. Or, en raison du déclin préoccupant des stocks, « la pêche commerciale de saumon Atlantique est interdite depuis longtemps, a indiqué M. Bernatchez. Par contre, on peut parfois avoir du saumon du Pacifique sauvage, des espèces Sockeye ou Coho ».

Quelques chiffres

« Lorsqu’ils font leurs emplettes, les consommateurs de saumon achètent généralement leur saumon soit au comptoir à poisson doté de personnel dans les épiceries (40 %), soit au comptoir libre-service des supermarchés (34 %). Une bien plus petite proportion révèle acheter habituellement le saumon dans des marchés spécialisés ou des poissonneries (18 %). »

Source : rapport d’Environics Research Group, réalisé pour l’Alliance de l’industrie canadienne de l’aquaculture

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.