Monsieur l’inspecteur

Vieille maison, vieux béton

Des fondations qui s’effritent, qui sont « pourries » à tel point qu’on peut facilement y enfoncer un tournevis, on en retrouve partout où des résidences ont été construites dans les années 20 et 30, jusque dans les années 40.

Les quartiers Rosemont et Notre-Dame-de-Grâce sont particulièrement touchés. Saint-Lambert et Beaconsfield le sont aussi. Dans certains cas, l’effritement de surface peut être stoppé ; dans d’autres, les fondations sont à remplacer complètement.

En inspection préachat, l’inspecteur gratte avec un tournevis des surfaces de béton accessibles, à l’intérieur comme à l’extérieur. Si une poussière et quelques gravats tombent, pas de problème. Cependant, si le « test du tournevis » révèle un effritement sur deux centimètres ou plus, une investigation plus poussée s’impose.

« Les problèmes de qualité du béton peuvent facilement avoir été camouflés par un crépi à l’extérieur et un sous-sol fini à l’intérieur. »

 – Manon Gosselin, présidente, Héneault et Gosselin

Le crépi recouvrant la portion hors sol du béton ne le protège aucunement, prévient Manon Gosselin. Il ne faut pas hésiter à en briser quelques morceaux pour sonder le béton derrière.

D’autres signes peuvent pointer vers une fondation problématique, comme des planchers inclinés vers l’extérieur, des moulures qui se sont décrochées du plancher et des ventres-de-bœuf sur le bas du parement de brique à l’extérieur.

Quand la maison a beaucoup de cachet et qu’on est déterminé à l’acheter, mieux vaut ne pas écarter la recommandation de l’inspecteur de faire analyser la qualité du béton des fondations. Pour environ 1000 $, on en aura le cœur net en faisant prélever et analyser deux carottes de béton.

Un carottage permettra de mesurer l’épaisseur de la portion saine du béton. En laboratoire, un test de compression en révélera la résistance.

« Les vieilles fondations ne sont pas nécessairement moins solides. À l’époque, on compensait en construisant des fondations beaucoup plus massives qu’aujourd’hui. »

 – Jean-Guy Slevan, président, GS Consultants

Le béton s’use d’abord sur ses faces extérieures, par réaction avec l’eau ou la surabondance d’humidité, explique Jean-Guy Slevan. Le centre du mur de fondation peut être encore suffisamment solide. « Il n’y a aucun béton qui dure 300 ans, dit-il. C’est un matériau qui se détériore, mais on peut intervenir avant que la détérioration ne s’accélère. »

Sur certaines fondations, il suffira de retirer ce qui s’effrite et de le remplacer par un mortier à haute résistance. Si l’effritement se produit par l’extérieur, il faudra excaver autour du bâtiment. Et tant qu’à réparer la fondation, aussi bien l’imperméabiliser adéquatement avec une membrane alvéolée et ajouter un drain français. Prévoir de 10 000 à 20 000 $ pour ces travaux.

Certaines fondations doivent carrément être remplacées. À l’époque, le constructeur n’a pas respecté les bonnes proportions eau et ciment dans son mélange de béton. Il se pourrait aussi qu’il ait ajouté de l’eau pour liquéfier le béton au moment de le couler en place.

« À des endroits, on a fait de la “soupe” pour couler les fondations, dit Jean-Guy Slevan. Le béton est moins résistant, moins étanche à l’eau et il se détériore plus rapidement. »

Coût d’un remplacement complet : de 60 000 à 80 000 $. Des entreprises comme Héneault et Gosselin soulèvent la maison le temps de remplacer les fondations. S’il s’agit d’un bâtiment en rangée, il faudra l’étayer en lui installant une série de supports pour qu’il reste parfaitement en place pendant l’opération.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.