Opinion  

La philanthropie et le retour sur l’investissement

Pourquoi les organismes à but non lucratif doivent-ils vous être redevables à ce point ?

Quand vous achetez une bouteille de cola à l’épicerie, ou encore un meuble usagé dans une brocante, votre satisfaction repose sur l’état du bien que vous avez acquis. Peu importe ce que le directeur de la compagnie de boisson gazeuse ou le brocanteur fera avec votre argent, vous n’avez pas à y réfléchir.

Vous êtes d’accord jusqu’ici ? Bien ! Quand, en revanche, vous remettez de l’argent à un organisme sans but lucratif, vous vous attendez à des résultats. Quels sont ces résultats ? Dans l’ordre ou dans le désordre, voici ce que vous attendez : 

• Que votre argent soit remis ou aille en presque totalité à la cause ;

• Que cet organisme soit performant ;

• Que cet organisme soit transparent au niveau de ses activités et finances ;

• Que ceux qui y travaillent soient payés moins cher que vous.

Pourquoi toutes ces attentes si vous n’êtes pas le bénéficiaire ? Pourquoi est-ce qu’un organisme à but non lucratif, qui souvent voit ses activités détournées de son objectif principal à cause d’un manque de fonds, et qui en plus doit convaincre des bénévoles d’œuvrer pour sa cause, doit-il vous être à ce point redevable, vous qui bénéficiez en plus d’un reçu de don aux fins d’impôts ?

Parlez-moi de vous.

Quel métier exercez-vous ? Cadre en comptabilité dans une moyenne entreprise ? Votre salaire est d’environ 60 000 dollars par an. Est-ce que le cadre en comptabilité qui œuvre dans un organisme à but non lucratif doit être payé moins cher que vous ? Non ? Pourquoi ?

Vous voyez où je veux en venir. Vous allez alors me suggérer d’engager un commis-comptable qui n’a pas d’expérience et qui coûte moins cher. D’accord. Mais vous voulez que l’organisme soit performant ! 

Comment bien performer si l’organisme n’est pas appuyé par des gens d’expérience, qui sont compétents et qui savent comment faire fructifier l’argent et la gérer adéquatement ? 

Si je me fie à cette logique, quelqu’un de moins expérimenté que vous et qui est payé moins cher devrait être aussi efficace ?

***

Disons que nous avons affaire à un organisme caritatif performant. Cet organisme pourrait, pour les besoins de l’exercice, amasser des fonds pour la recherche sur un hypothétique cancer de type « A ». Cet organisme embauche les meilleurs employés à un taux concurrentiel. Il place des publicités dans les plus grands journaux et réussit à remettre 20 millions par an à la recherche sur le cancer de type « A ».

Mais voilà, vous apprenez à la télévision que cet organisme collecte 30 millions par an pour en remettre 20 millions à la recherche. Vous vous demandez : mais où va donc ce 10 millions de plus ? En salaires et en publicités ? C’est odieux !

Croyez-vous vraiment qu’un organisme qui travaille à récolter plus de 30 millions et qui réussit à en remettre les deux tiers à la recherche pourrait fonctionner avec un budget de 200 000 dollars ? Si vous avez la moindre connaissance du monde des affaires, vous allez bien comprendre que c’est une tâche impossible.

Et si c’était de vous qu’il était question ?

Laissez-moi maintenant vous placer dans une situation différente. Votre fils Nathan, un petit gaillard de 8 ans que vous aimez de tout votre cœur, est diagnostiqué avec un cancer de type « A ».

Voudriez-vous mobiliser tous ceux qui vous entourent et les encourager à donner à un organisme qui engage les meilleurs talents et qui réussit à amasser des sommes considérables pour la recherche ?

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.