La piste cyclable

Une jungle où règne la loi du plus vite

Depuis l’an passé, j’en suis venu à la conclusion malheureuse qu’il me faut éviter d’emprunter la piste cyclable si je veux assurer ma sécurité à vélo.

Je roule entre 12 et 15 km/h environ. Il est courant qu’un cycliste me dépasse. Il me semble qu’il doit rouler lui-même entre 20 et 25 km/h. Le problème n’est pas qu’on me double, mon souci est qu’on me dépasse dans n’importe quelle situation, ce que je trouve risqué.

Je roule l’autre jour sur la bande cyclable de la rue de Bellechasse. La bande fait 1,5 m de largeur. D’un côté, vous avez des autos stationnées et de l’autre, des autos qui circulent. Les autos des deux côtés sont collées aux deux lignes de la bande cyclable. Quand on roule au milieu de la bande, il reste environ 0,5 m de jeu pour dépasser un autre cycliste (en incluant la largeur des guidons) s’il y a de la circulation et des autos stationnées, comme ce jour-là. Un cycliste m’a dépassé au double de ma vitesse, sans avertissement. Il m’a frôlé.

S’il avait fallu que je donne un léger coup de guidon, disons pour éviter une fissure, c’était l’accrochage assuré.

Ce type de dépassement arrive régulièrement dans de pareilles circonstances. Il y a des cyclistes qui roulent à grande vitesse, et on dirait qu’un de leurs objectifs est d’éviter de ralentir. Veulent-ils profiter du déplacement à vélo pour faire du cardio ? Démontrer que le vélo est aussi, sinon plus rapide que l’automobile ? Ou tout simplement, débordent-ils d’énergie ? Donc, ils prennent le risque de dépasser dans des conditions où le corridor de dépassement est au plus étroit.

Dépassements à risque

Un autre type de dépassement risqué se produit sur la piste cyclable de la rue Boyer. Cette fois, la piste a une largeur de 3 m. En théorie, un dépassement devrait être plus sécuritaire à cause de la plus grande largeur. Nenni. Il m’est arrivé d’être dépassé en même temps qu’un autre cycliste me croisait dans la direction opposée. L’autre situation consiste à me faire dépasser alors que moi-même j’en double un autre. Nous nous retrouvons pour un court moment à trois cyclistes sur la largeur de 3 m. Le corridor devient ainsi tout aussi réduit que sur une bande cyclable.

Entendons-nous. Ce n’est pas la vitesse en elle-même qui est la source de danger. C’est quand elle s’allie à un manque d’expérience de conduite à vélo, à la témérité, à l’absence du sens d’anticipation et de prudence dans un espace confiné.

Ce que je vous relate arrive quotidiennement à plusieurs, j’en suis convaincu. Je serais curieux de connaître le nombre d’accidents qui se produisent de cette façon. Le seul point positif demeure que les accrochages et les collisions ne sont pas mortels comme le seraient ceux impliquant une voiture et un cycliste.

Maintenant je roule dans les petites rues parallèles aux grandes artères.

Je fais plus confiance aux automobilistes qu’à mes collègues cyclistes.

Les automobilistes sont devenus plus sensibles au fil des ans aux risques associés au cyclisme. Une publicité en ce sens, des billets d’infraction plus coûteux, la mortalité rapportée de cyclistes, autant de raisons qui les ont conduits à la prudence. Faudrait-il servir le même remède aux cyclistes pour civiliser les comportements ?

Quel paradoxe que la piste cyclable soit devenue un lieu dangereux quand, à l’origine, elle avait été conçue en partie pour assurer une plus grande sécurité des gens à vélo.

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