Kotkaniemi, 40 matchs plus tard

C’est presque rendu prévisible. C’est arrivé trois fois à Sunrise, vendredi. C’est arrivé une autre fois à Dallas, le 31 au soir. Puis hier, de nouveau, à Brossard.

Le numéro 15 tente un tir. « Ping ! » La rondelle aboutit sur le poteau.

Le commun des mortels voit de tels tirs et note que, pour un jeune de 18 ans, il dégaine déjà comme un attaquant de l’élite. Son tir des poignets est impressionnant à voir. C’est d’ailleurs l’observation qu’a formulée Claude Julien hier. « Il doit mener la ligue pour les poteaux ! Il a un bon tir », a lancé l’entraîneur-chef.

Jesperi Kotkaniemi, lui ? Se croit-il simplement malchanceux quand il voit autant de tirs aboutir sur les tiges ? « Je ne sais pas, c’est aussi un manque d’habileté. Pour moi, ce sont des tirs hors cible. Je dois être meilleur. »

Quarante matchs plus tard, le premier choix du Canadien au dernier repêchage demeure toujours aussi critique face à lui-même. On peut d’ailleurs soulever comme hypothèse que cette éternelle insatisfaction, cette forme d’humilité, explique pourquoi il s’entraînait avec le Canadien hier matin, au lieu de prendre part au duel Finlande-Canada d’hier au Championnat du monde junior.

On l’a souvent dit et on le répète : au camp de développement de juillet, puis au tournoi des recrues deux mois plus tard, plusieurs observateurs s’attendaient à ce que Kotkaniemi défende les couleurs de son pays, et non pas celles du CH, au temps des Fêtes. 

Mais le jeune homme a progressé de jour en jour au camp, et a continué à le faire dans cette première moitié de saison qui prend fin ce soir, avec la visite des Canucks de Vancouver.

Cette progression se traduit par les données dans le tableau ci-bas. Il y a lieu de croire que la colonne des buts et des points aurait plus fière allure si quelques-uns des tirs sur les poteaux avaient été convertis en buts.

Ça, c’est pour les chiffres. Et dans les mots de Julien, ça donne ceci.

« J’aime comment il a progressé de façon générale. Son rythme s’est amélioré, il s’est ajusté à la vitesse du jeu. Il avait de la difficulté en zone défensive au début ; c’est bien meilleur maintenant. Il est beaucoup plus fiable. […] Je suis vraiment impressionné, pour un jeune de 18 ans. Le plus gros défi est à venir, mais je suis persuadé qu’il va bien s’en tirer. Je ne le vois pas ralentir. Parfois, tu vois des joueurs qui arrivent d’Europe ou du collège, où ils jouent surtout la fin de semaine, et le calendrier finit par les rattraper. Mais je ne vois pas de signes de ralentissement. »

En fait, l’adaptation de Kotkaniemi a été telle qu’il a disputé son 40e match de la saison sans tambour ni trompette, lundi. Ce chiffre engendre parfois des dilemmes pour les dirigeants d’équipes, car il signifie que le joueur en question sera admissible à l’arbitrage et à l’autonomie complète un an plus tôt. Quelqu’un a réellement pensé, ces dernières semaines, que Kotkaniemi n’atteindrait pas ce chiffre ? Poser la question, c’est y répondre.

Gestion d’énergie

En point de presse, hier, Claude Julien a révélé avoir eu une bonne discussion avec son poulain.

Visiblement, la gestion de son énergie était un des thèmes de la conversation. Julien a effleuré le sujet dans la première réponse citée plus haut, et en a de nouveau parlé quand on lui a demandé quel serait le plus gros défi de Kotkaniemi en deuxième moitié de saison.

« Ce sera son repos et sa récupération. S’il peut soutenir le rythme du jeu pendant 82 matchs, ce sera tout un exploit pour un jeune de 18 ans, a expliqué l’entraîneur-chef. Le reste de son jeu s’améliore. Même aux mises au jeu, il s’améliore. Il apprend à être plus fort. Mais ça, ce sont des choses que tout joueur de 18 ans apprend. »

On affirme souvent que la transition en Amérique du Nord est difficile pour les Européens, en raison d’un calendrier plus chargé. Cela dit, Kotkaniemi a disputé 84 matchs en 2017-2018, selon les données d’Elite Prospects : 57 en saison avec Pori, 7 autres en séries, 17 avec l’équipe nationale des moins de 18 ans et 3 avec les moins de 20 ans. Kotkaniemi, lui, arrive à un chiffre de 93, en calculant aussi les rencontres hors concours avec Pori.

« C’est le plus que j’ai joué en une saison », soutient-il.

« Cette saison, je calcule que j’ai joué 17 ou 18 matchs préparatoires. J’en ai joué avec Pori, avec l’équipe nationale, j’ai participé au tournoi des recrues ici et il y a eu nos matchs préparatoires. Ça fait beaucoup de matchs ! »

— Jesperi Kotkaniemi

C’est sans oublier que le printemps d’un repêchage est toujours exigeant pour un joueur, particulièrement pour les Européens, qui traversent l’Atlantique pour le camp d’évaluation de la LNH au début de juin, puis pour le repêchage trois semaines plus tard.

« Je n’ai pas eu beaucoup de repos l’été dernier. C’est comme si c’était une longue saison qui a commencé l’an dernier et qui continue », a-t-il expliqué.

Visiblement, le message de Julien à Kotkaniemi a été bien reçu. C’est ce qui ressort quand on lui demande son plus grand défi pour la deuxième moitié de saison. « Je devrai être intelligent dans mon emploi du temps quand on aura congé. Je devrai me reposer et bien manger. »

Le Canadien amorce ce soir une séquence costaude de 8 matchs en 13 jours, une portion du calendrier qui mettra justement l’endurance physique de Kotkaniemi à l’épreuve. Par contre, avec la semaine de relâche et la pause du match des Étoiles qui se suivent, le Tricolore disputera un seul match entre le 20 janvier et le 1er février. Le genre de séquence qui lui permettra de recharger les piles.

Les nouvelles du jour

Price : une blessure à gérer

Carey Price a repris l’entraînement avec ses coéquipiers hier matin, et il devrait être en uniforme ce soir. L’équipe a d’ailleurs annoncé en après-midi le renvoi de Michael McNiven, l’auxiliaire d’Antti Niemi depuis Noël, à Laval. « Je vais assez bien. C’est bien d’avoir eu du repos et de recommencer à me sentir normal », a déclaré Price après la séance. Quant à la possibilité de le revoir en action ce soir, tout dépendra de la façon dont son corps réagira ce ma tin. « Au pire, il peut toujours être gardien auxiliaire », a indiqué Julien. Cela dit, même s’il semblait en pleine forme sur la patinoire, Price n’est pas entièrement guéri. Il a précisé qu’il traînait la blessure « depuis sept semaines » et qu’il devrait continuer à surveiller la situation. « C’est une blessure qui le dérangeait. Il a pu prendre du temps pour [la guérir] et il se sent beaucoup mieux. Ça ne veut pas dire que c’est parti, mais c’est beaucoup mieux », a ajouté Julien.

Match des Étoiles

Parlant de blessure à surveiller… Price a été sélectionné à titre de représentant du Canadien pour participer au match des Étoiles du 26 janvier. Sa sélection a de quoi surprendre, puisque malgré une amélioration depuis la fin du mois de novembre, le gardien a connu une première moitié de saison en demi-teintes (fiche de 15-10-4, moyenne de 2,84, efficacité de ,904). Il sera maintenant intéressant de voir si Price ira bel et bien passer la fin de semaine à San Jose. Le match des Étoiles sera suivi de la semaine de relâche pour le Canadien, ce qui constitue une belle occasion de faire le plein d’énergie pour la fin du calendrier. Rappelons que Price et sa conjointe sont devenus parents pour la deuxième fois la semaine dernière. Un joueur qui déclare forfait pour le match des Étoiles est passible d’une suspension d’un match.

Un rappel chaotique

On l’a indiqué précédemment, McNiven a été rétrogradé au Rocket de Laval. Le gardien aura donc passé une première semaine dans l’environnement de la Ligue nationale. « Ça m’a permis de voir la LNH de plus près. Je dois travailler tous les jours, que je sois ici ou à Laval. Le but est de revenir ici à temps plein », a expliqué McNiven, hier, après son dernier entraînement avec le Canadien. Le séjour de McNiven avec le grand club avait commencé sur les chapeaux de roue, puisqu’il se préparait à affronter les Senators à Belleville le jour de son rappel. « On était à l’étranger pour une seule journée, donc je n’avais pas apporté mon passeport, je ne pensais pas être rappelé ! J’ai dû prendre un taxi pour revenir à la maison et prendre l’avion de Montréal pour rejoindre l’équipe en Floride », a-t-il raconté.

Des nouvelles de l’infirmerie

Price n’était pas l’unique revenant hier ; David Schlemko (haut du corps) était lui aussi de retour. Le défenseur a raté les quatre derniers matchs de son équipe. Il y avait cependant deux absents : Phillip Danault et Andrew Shaw. Danault avait droit à une journée de traitements, mais Shaw, qui a quitté le match de lundi en première période en raison d’une blessure au haut du corps, demeure un cas plus préoccupant. En conférence de presse, Julien n’avait pas davantage d’informations au sujet de Shaw, qui traîne un lourd historique de commotions cérébrales. Joel Armia, blessé à un genou depuis deux mois, a pris la place de Shaw au sein du trio de Jesperi Kotkaniemi et semblait en voie de revenir au jeu ce soir. L’homme de peu de mots n’a toutefois pas confirmé son retour pour ce soir.

De bons mots pour Benn

Victor Mete a été l’heureux élu pour jouer à la gauche de Shea Weber lors des quatre derniers matchs. Le jeune défenseur a amassé deux passes et présenté une fiche de + 2 au cours de ces quatre duels, tout en jouant une vingtaine de minutes en moyenne. Julien entend garder intact ce duo pour le moment, mais sait très bien que les choses pourraient changer rapidement. « Tant que ça fonctionne, je n’ai aucune raison de vouloir changer. Mais Mete est un jeune de 20 ans. La deuxième moitié de saison est difficile, avec le calendrier et le genre de hockey que tu dois jouer quand tu te bats pour une place en séries. Il faut garder l’esprit ouvert. Benn joue de l’excellent hockey dernièrement. Il est dans le troisième duo. S’il continue à jouer comme ça et que Mete glisse un peu, c’est un changement qu’on peut faire pour quelques matchs. »

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