Chronique

Voulez-vous lire une très bonne nouvelle ?

Voulez-vous apprendre une très bonne nouvelle sur l’économie du Québec ? Lisez ceci.

Pour vous en faire saisir l’ampleur, je dois d’abord faire une mise en contexte. Depuis quelque temps, les économistes s’entendent pour dire que les politiciens ne doivent plus centrer leur énergie sur la création d’emplois au Québec, compte tenu de la pénurie de main-d’œuvre.

Bien sûr, il y a quelques régions ou secteurs qui ont encore besoin de création d’emplois. Et oui, les personnes âgées qui prolongent leur carrière et les immigrants font partie des solutions, comme le gouvernement Couillard en a fait état mardi.

Toutefois, la tendance est telle qu’il faut absolument que les entreprises revoient leur processus, automatisent leur production (avec des robots et des machines), bref, qu’elles deviennent plus productives. Qu’elles produisent plus avec moins d’employés, comme le font les Allemands, donnait en exemple Dominique Anglade la semaine dernière.

Or voilà, en 2017, les entreprises du Québec ont connu, ENFIN, une croissance importante de leur productivité. Ce niveau de croissance, définie par la production par heure travaillée, ne s’était vu qu’une seule fois depuis 15 ans.

Plus précisément, les entreprises du Québec ont augmenté leur productivité de 2,1 % en 2017, a indiqué Statistique Canada hier. Cette hausse suit des variations désolantes de 0,2 % en 2016 et de - 0,9 % en 2015. Le Québec avait touché un sommet de 2,6 % en 2014, mais cette hausse s’expliquait notamment par le maintien d’un faible niveau d’emplois suivant le ralentissement économique plutôt que par la vigueur de la production.

Avant 2014, le précédent sommet de 3,9 % datait de l’an 2000 !

Cette fois, la hausse de la productivité est différente de celle de 2014. Non seulement l’emploi croît à un bon rythme, mais la production augmente encore davantage, si bien qu’il y a croissance réelle de la productivité.

Le Québec n’a pas été la seule province à voir sa productivité s’accroître en 2017. Néanmoins, parmi les provinces auxquelles notre économie se compare, notre augmentation a été supérieure. Ainsi, la production par heure de travail des entreprises a été en hausse de 1,9 % en Ontario et de 1,2 % en Colombie-Britannique en 2017. La moyenne canadienne a atteint 2,2 %, essentiellement en raison du fort rebond de la productivité des provinces pétrolières, après la déconfiture des deux années précédentes.

On aurait pu craindre que la hausse de la production par heure travaillée ne soit pas prononcée en 2017, compte tenu de la forte progression des emplois (et donc du dénominateur que constituent les heures travaillées dans l’équation), mais non.

44,40 $ l’heure

Chaque fois que j’écris sur le sujet, des lecteurs me demandent de leur fournir la valeur brute par heure travaillée, plutôt que sa seule croissance. Le concept n’est pas si simple, mais voici : en 2017, les entreprises du Québec ont produit l’équivalent de 44,40 $ par heure travaillée. Il s’agit de dollars de 2007, et donc dégonflés de l’inflation. Les économistes parlent plus précisément de valeur ajoutée dans l’économie par heure travaillée.

En comparaison, cette productivité était de 47,90 $ en Ontario et de 49,00 $ en Colombie-Britannique. Le Québec conserve un certain retard, mais en tenant compte du coût de la vie plus élevé en Ontario, par exemple, la différence n’est guère significative.

Les provinces pétrolières, comme l’Alberta et Terre-Neuve-et-Labrador, sont clairement dans une classe à part, avec des productivités de 71,90 $ et de 70,20 $. Ce phénomène s’explique par la composition de l’économie – le pétrole ajoute une plus grande valeur que le textile, par exemple – et non parce que les Terre-Neuviens sont 58 % plus productifs.

La majoration de la productivité est un enjeu majeur au Québec – et au Canada – depuis plusieurs années. Il en va du maintien de notre niveau de vie et de nos services publics. Toutefois, il éloigne l’homme de la rue parce qu’il s’agit d’un concept compliqué, qui semble exiger des employés qu’ils travaillent comme des fous, alors qu’il s’agit plutôt de travailler plus intelligemment.

Les données de Statistique Canada sont donc une très bonne nouvelle. Il reste à voir si le Québec et le reste du pays maintiendront le rythme au cours des prochaines années pour résister aux Américains, dont la productivité demeure très forte. Avez-vous des idées intelligentes et des innovations pour votre entreprise ?

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