Péréquation

Un demi-milliard de plus pour Québec

Tandis que les ministres des Finances se disputaient au lac Meech sur le bien-fondé d’une possible bonification du régime de pensions public et d’une autorité pancanadienne des marchés financiers, Ottawa en profitait pour annoncer aux provinces les montants de ses paiements de transfert pour 2014-2015.

Le grand gagnant de cet exercice est le Québec, qui obtient en péréquation 548 millions de plus qu’anticipé dans Le point sur la situation économique et financière du Québec de novembre.

Toutes choses étant égales par ailleurs (Ceteris paribus sic stantibus, aurait clamé Bernard Landry), la projection de déficit de Québec de 1,75 milliard (2014-2015) vient de fondre d’environ le tiers !

Selon les chiffres fédéraux, Ottawa verserait en transferts 1,772 milliard de plus qu’en 2013-2014 au Québec. Il s’agit, et de loin, de l’augmentation la plus élevée en 10 ans.

En retranchant la péréquation, la hausse des transferts projetée par Ottawa est seulement de 219 millions, soit 2,1 % de plus qu’en 2013-2014. Ce faible pourcentage sera de nature à nourrir les tenants de la création de l’édification d’un nouveau déséquilibre fiscal. Dans sa mise à jour de novembre, Québec prévoyait une baisse de 172 millions par rapport à 2013-2014 pour ces autres transferts.

Hier, le cabinet du ministre Nicolas Marceau a précisé à La Presse qu’il faudra attendre au printemps pour connaître comment le ministère des Finances calcule ces transferts. Dans son entourage, on indiquait ne pas savoir si cette recette serait versée au déficit prévu pour 2014-2015.

En novembre, La Presse avait rapporté que Québec était en discussion avec Ottawa et s’attendait à une augmentation de la péréquation. Hier au cabinet du ministre Marceau, on niait avoir eu vent le mois dernier d’une telle hausse des montants attendus d’Ottawa.

La révision de la péréquation était basée sur les données du recensement de 2011, qui faisaient état d’une augmentation de 29 728 personnes au Québec, mais d’une diminution de 143 147 personnes de la population canadienne par rapport aux estimations fondées sur le recensement de 2006.

« Assez gênant »

Pour Christian Dubé, porte-parole de la Coalition avenir Québec en matière de finances, le ministre Marceau devrait verser la totalité de cette recette inattendue au déficit de 2014-2015. Québec a beau se défendre avec le sous-dénombrement de la population dans le recensement, « il n’en reste pas moins que cela illustre l’écart entre les économies canadienne et québécoise. L’économie québécoise a crû de 0,9 %. Dans le reste du Canada, c’est 1,6 %. Les autres provinces performent mieux », explique-t-il.

En deux ans, le paiement de péréquation passera de 7,8 milliards à 9,2 milliards. « Cela doit être assez gênant pour un gouvernement indépendantiste d’être si peu indépendant financièrement. On dépend de la bonne performance économique des autres provinces », souligne Christian Dubé.

Pendant que Québec obtient plus de péréquation entre 2013-2014 et 2014-2015, l’Ontario, nouveau client du chèque annuel destiné aux provinces pauvres, voit sa part diminuer de 3,2 milliards à 2,0 milliards au cours de la même période.

Ministre fédéral de l’Infrastructure et lieutenant québécois du gouvernement Harper, Denis Lebel a des sentiments partagés devant ces chiffres sur les transferts. « On le dit souvent, depuis qu’on est au gouvernement, les transferts n’ont jamais été aussi élevés. Ils ont augmenté de 50 % depuis 2006 », observe-t-il.

« Comme Québécois, j’ai hâte que le Québec paie de la péréquation aux autres provinces. Je ne peux pas dire que cela me fait plaisir de voir la performance économique du Québec », lance M. Lebel. Québec avait raison de s’attendre à une hausse de transferts dès novembre, « mais il n’y avait pas de contentieux entre nous », a-t-il soutenu.

Sortir de la léthargie

Comme le précisait le document budgétaire, une révision à la hausse a pour effet de diminuer la capacité fiscale par habitant du Québec. Et vice-versa pour le reste du Canada.

Malgré cette projection, Québec reçoit davantage aussi en raison de sa croissance plutôt lente et de la fermeture de sa centrale nucléaire Gentilly-2, qui l’a contraint à une radiation de 1,876 milliard en 2012-2013.

L’économie québécoise, par ailleurs, donne enfin des signes qu’elle sort de sa léthargie. Ses volumes d’exportations croissent plus vite que ceux du Canada jusqu’ici cette année, tandis que les ventes de ses fabricants et de ses grossistes ont bondi davantage qu’au Canada dans son ensemble, en octobre.

Reste désormais à souhaiter que l’inflation se dynamise quelque peu. On en aura une petite idée avec les données de novembre, ce matin. En octobre, le rythme d’augmentation des prix à la consommation était de 0,2 % seulement, contre 0,7 % à l’échelle canadienne.

Cela entrave la croissance de l’assiette fiscale, essentielle pour combler le reste du déficit projeté.

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