Traitement du myélome multiple

Le sang de cordon prometteur

Les personnes qui combattent un myélome multiple, cancer du sang qui prend naissance dans la moelle osseuse, pourraient voir leurs chances de guérison passer de 40 % à 70 % grâce à du sang de cordon ombilical cultivé en laboratoire. Explications.

Le myélome multiple est au deuxième rang des cancers du sang les plus fréquents après le lymphome, selon l’hématologue Jean Roy, de l’hôpital Maisonneuve-Rosemont. Un cancer qui touche au Québec environ 400 personnes par année – plus fréquent que la leucémie aiguë.

Le myélome multiple prend naissance dans les plasmocytes, un type de globules blancs présent dans la moelle osseuse (principalement dans les os du bassin, des côtes et des vertèbres), qui est responsable de la fabrication des anticorps. Pour des raisons inconnues, ces plasmocytes se multiplient à l’infini.

« On a affaire à des mutations génétiques qui font en sorte que les plasmocytes sécrètent des protéines qui n’ont rien à voir avec une insulte infectieuse, précise le Dr Roy. C’est-à-dire que la protéine ou l’anticorps produit par le myélome ne correspond pas à une bactérie ou un virus contre lequel on doit se défendre… »

Résultat : le myélome envahit la moelle osseuse, qui fabrique toutes les cellules sanguines (globules rouges, blancs et plaquettes), et inhibe les bonnes cellules. Le diagnostic est grave. L’espérance de vie est d’environ six ans. Dans certains cas, on parle d’à peine deux ans.

Greffes

Depuis quelques années, le taux de guérison a augmenté à environ 40 % grâce à la combinaison de deux greffes. Les greffes de cellules souches provenant du patient lui-même (autogreffe) – de bonnes cellules prélevées avant les traitements de chimiothérapie, puis réinjectées chez le patient. Et les greffes de cellules souches provenant d’un donneur (l’allogreffe), idéalement un membre de la famille.

Malheureusement, les greffons de donneurs causent bien des maux de tête aux hématologues. 

« Le problème est que le taux de rechute est très élevé. On parle d’un taux de rejet de 50 %. »

— Le Dr Jean Roy

« Soit le greffon du donneur ne fait pas ce qu’on attend de lui, c’est-à-dire reconnaître les petites cellules de myélome dormantes qui peuvent rester après les traitements de chimiothérapie ; soit le greffon ne reconnaît pas le corps du receveur comme étant le sien et s’attaque à ses organes, comme son intestin ou son foie. On appelle ça la maladie du greffon contre l’hôte. »

Environ 10 % des patients ont cette forme grave de rejet qui peut causer la mort. D’autres ont des problèmes chroniques qui peuvent affecter d’autres organes du corps humain.

Les vertus du sang de cordon

D’où les recherches actuelles portant sur le sang du cordon ombilical. « Ce sang-là a deux propriétés très importantes, nous dit le Dr Roy. Il a une plus grande plasticité, c’est-à-dire que les cellules sont plus tolérantes à l’incompatibilité, et elles ont un effet antitumoral augmenté, c’est-à-dire qu’avec du sang de cordon, le système est capable de détecter les cellules tumorales et les attaquer. »

Ce n’est pourtant pas la première fois que le sang de cordon ombilical est utilisé pour des greffes de cellules souches – une technique notamment utilisée pour traiter certains types de leucémies. Pourquoi avoir attendu tout ce temps avant d’en faire l’expérience auprès des patients qui combattent un myélome multiple ?

« Le désavantage du sang de cordon est qu’il est faible en cellules souches, répond le Dr Roy. Pour des adultes de 80 kg, ça peut être long avant que le greffon ne prenne. Mais une nouvelle molécule découverte récemment par l’équipe du Dr Guy Sauvageau [UM171], de l’Université de Montréal, est maintenant capable d’augmenter de 30 à 50 fois le nombre de cellules souches contenues dans le sang de cordon grâce à un processus in vitro. »

Cette découverte pourrait permettre d’augmenter le taux de succès des greffes de cellules souches faites par des donneurs, croit le Dr Roy, qui espère voir le taux de guérison passer à 60 ou 70 %. « On a commencé à suivre 10 patients de différentes régions du Québec pour voir comment ils réagissent à ces greffons provenant de cultures en laboratoire. Notre premier patient a été greffé la semaine dernière. »

« Cette étude est bâtie sur nos observations des 15 dernières années, a expliqué le Dr Roy. Notre but est de rendre l’allogreffe moins toxique, parce que c’est le seul traitement capable de guérir les patients qui ont un myélome. Là, on a une source de cellules souches vraiment plus puissantes. En les combinant aux autogreffes, on a bon espoir d’y arriver. »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.