Élections 2013 Saguenay

Sans opposition... ni journalistes

« Non, non, merci, je veux pas que vous veniez. Toute va ben, là, je veux pas vous voir. »

Le maire de Saguenay, Jean Tremblay, a été clair : pas question d’avoir un journaliste de Montréal dans les pattes. « Si j’avais une cause à vendre, je dis pas, mais là, c’est non. »

Il a fini par céder. Après tout, il est en campagne électorale. Il m’a donné rendez-vous à 7 h 30 au restaurant de mon hôtel. Je suis arrivée à 7 h 25. Il m’attendait, seul, assis dans un fauteuil du hall, sa vareuse sur le dos.

Il est au pouvoir depuis 1997. Il a été réélu avec des majorités à saveur soviétique : 72 % en 2005, 78 % en 2009. Le dernier sondage1 lui accorde 82 % des intentions de vote.

Jean Tremblay n’aime pas les fla-flas, il va droit au but. Il aime la ponctualité, la prière, sa ville et la musique country. Il n’aime pas les snobs, l’opposition, les journalistes et Tout le monde en parle. L’équipe de Guy A. Lepage l’a invité à quelques reprises, mais il a toujours refusé.

« C’est pas mon genre, dit-il en faisant la moue. Ils s’autoproclament. Il faut penser comme eux. »

Les journalistes ? « Il y en a qui ont tout un ego. Ils sortent du cégep, ils travaillent depuis à peine six mois et ils nous donnent des ordres. Des fois, je dis à certains : “Appelez-moi plus !” »

Il soupire. « Si je pouvais être maire sans journalistes, ça serait l’idéal. »

Il parle, parle et parle, et prend à peine le temps de respirer entre deux bouchées. Son fils parlait beaucoup à l’école, explique-t-il.

« Et votre femme ?

— Elle, elle parle ! »

Une famille de jaseux.

Jean Tremblay règne depuis 16 ans sur Saguenay, ville de 144 000 habitants deux fois plus grande que Montréal. Il la parcourt à bord de sa voiture comme un propriétaire jaloux. Il grimpe les côtes de Chicoutimi et longe la rivière Saguenay pour se rendre à La Baie en conduisant d’une main sûre, le pied pesant.

Il a mis la ville à sa main. Saguenay ne s’enfarge pas dans les débats. Ici, tout roule à la vitesse Tremblay. Les séances du conseil municipal ? Il n’y en a qu’une par mois et elle dure à peine 20 minutes. Les résolutions adoptées par le conseil ? Unanimes depuis 10 ans. Des dissensions ? « C’est très, très rare », précise Jean Tremblay.

Quand l’un des 19 conseillers n’est pas d’accord avec lui, il le convoque. Le litige se règle dans son bureau, loin des yeux du public.

« Il n’y a pas d’opposition à l’hôtel de ville ?

— Non, et c’est pour ça que ça marche ! »

1. Sondage réalisé entre le 4 et le 8 octobre auprès de 400 répondants. Pourcentage d’indécis : 30 % ; marge d’erreur : 5 points de pourcentage.

Composition du conseil municipal de Saguenay

Un maire et dix-neuf conseillers, tous favorables à Jean Tremblay.

Nombre de districts électoraux : 19

8 à Chicoutimi

8 à Jonquière

3 à La Baie

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