Obésité

Le jour où elle a arrêté d’être grosse

Valérie Fraser a passé 23 ans à être grosse. Jusqu’au jour où elle a décidé d’arrêter. Dans un livre coécrit avec la chroniqueuse et ex-Moquette coquette Marianne Prairie, la jeune femme revient sur ses années dans le monde de l’obésité, et son combat pour changer.

La vie de Valérie Fraser est jalonnée de chiffres : 200 lb, le poids qu’elle pesait à 10 ans ; 345, celui qu’elle pesait avant de changer sa vie ; 130, le nombre de livres perdues depuis qu’elle a « arrêté d’être grosse » ; 20 767, le nombre de fans que compte sa page Facebook, Le jour où j’ai arrêté d’être grosse, ouverte il y a deux ans.

« Le jour où j’ai fait ma page Facebook, une personne est morte en moi. J’ai fait ce deuil. Je devais raconter cette mort-là », dit aujourd’hui la jeune femme.

Il y a deux ans, donc, Valérie Fraser a envoyé valdinguer toute une vie passée dans la peau d’une personne obèse. Finis, la malbouffe, les descentes nocturnes au McDo, le mal-être physique, les vêtements très, très larges devenus trop petits, la honte.

Cheminement

Le 26 avril 2012, la jeune femme vide son frigo et ses placards pour les remplir de fruits, de légumes et d’aliments plus sains, mais jusqu’alors inconnus. Elle troque les plats tout faits pour des « recettes santé » trouvées sur internet. Et elle décide de faire son retour dans les salles de sport.

« Il faut arrêter d’être gros dans sa tête pour le devenir physiquement », dit Valérie Fraser. L’alimentation comme le sport ne sont que 10 %, selon elle, du travail à fournir : le reste est surtout psychologique.

C’est ce cheminement, raconté avec beaucoup de simplicité et d’honnêteté sur Facebook, qui a rendu sa page populaire. Et c’est aussi ce qu’elle décrit, dans son livre, en dialogue avec Marianne Prairie.

« Il y a beaucoup de lucidité dans le livre. Valérie s’est garrochée là-dedans tête première. C’est “real life, no bullshit” », dit Marianne Prairie.

Discrimination

Et toutes deux de rappeler la discrimination dont sont victimes les personnes souffrant d’obésité. Si l’on pense d’emblée aux revers quotidiens que peuvent essuyer les « gros », c’est surtout l’incapacité du personnel médical à gérer les patients obèses qui frappe dans le livre.

Dans ses expériences, Valérie Fraser s’est souvent sentie méprisée à cause de son poids. Ses problèmes physiques, pourtant réels, n’ont pas toujours été pris au sérieux, son poids et ses habitudes alimentaires justifiant, croit-elle, l’indifférence ou le malaise des médecins.

« On ne guérit pas l’obésité : on règle les bobos causés par ça, et on nous rappelle que c’est de notre faute. Mais l’obésité est une maladie qui nous tombe dessus, comme ça, dit Valérie Fraser. Être gros, j’ai tellement senti qu’on associait ça à une pauvreté intellectuelle. »

Malgré une vie que l’on devine loin d’être facile, Valérie Fraser affiche un sourire franc et rieur. Si elle évoque sans hésiter les difficultés rencontrées au cours de sa jeune vie, elle refuse de se poser en victime. « Je crois que beaucoup d’obèses se victimisent. Mais la vie n’a pas de limites : c’est nous qui nous les imposons », estime-t-elle.

Pas de formule magique

Ni victime ni gourou : dans son livre comme dans la vie, Valérie Fraser a trouvé son équilibre, mais ne donne pas de formule toute faite ou de recette miracle à ses lecteurs et lectrices.

« Oui, il y a des conseils qui marchent. Mais l’affaire, c’est que les changements durables, c’est difficile et pénible, dit Marianne Prairie. C’est pour ça que le prêchi-prêcha ne fonctionne pas. »

> Le jour où j’ai arrêté d’être grosse, Valérie Fraser et Marianne Prairie, éditions Parfum d’encre. Sortie le 18 février.

Visitez la page : https://www.facebook.com/LeJourOuJaiArreteDetreGrosse

Un extrait du livre

« Une fois que Valérie a perdu du poids, elle reçoit des soins beaucoup plus rapidement : trente minutes. Une grosse qui fait attention à elle a beaucoup plus de chance d’avoir un bon service médical qu’une grosse ingrate. Aide-toi et le système t’aidera. N’empêche que la discrimination envers les personnes obèses est flagrante, et les médecins, les infirmiers, les nutritionnistes et les psychologues qui travaillent dans le système de santé reproduisent ce qui se passe à l’échelle sociétale. »

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