Il est en train de se passer quelque chose
Y a pas à dire, il est en train de se passer des choses étranges avec ce club… le genre de choses qu’on n’a pas vues depuis très longtemps.
Quelles sortes de choses, au juste ? Eh bien, par où commencer ? Des gars qui sortent de nulle part pour enfiler la cape du héros. Des acrobaties du gardien. Des bonds favorables de la rondelle… Voilà un peu ce que l’on voyait jadis, et assez souvent, dans un autre bâtiment situé pas trop loin de celui-ci, mais plus à l’ouest, avenue Atwater.
Ceux qui ont connu les beaux jours du Forum vous le diront : la victoire de 3-2 du Canadien en prolongation, vendredi soir au Centre Bell, avait des allures de match du bon vieux temps.
Dans le temps où les Bruins avaient trop de joueurs sur la glace, dans le temps où un but a été refusé à Alain Côté, dans le temps où Claude Lemieux surprenait Mike Liut avec un bâton qui n’était même pas le sien.
La cape du héros ? Cette fois, c’est Josh Anderson qui l’a portée. Le même Josh Anderson qui avait un seul but en 24 matchs, mais qui en a réussi deux en ce vendredi soir contre Vegas, et dans des circonstances dignes de l’époque des Fantômes du Forum ; le premier sur une sortie bousillée de Marc-André Fleury, le deuxième sur un lobe en apparence inoffensif, qu’il a capté de la lame de son bâton tel un aigle capte sa proie. La passe poétique de Byron a fait le reste.
Les acrobaties ? Carey Price a passé sa soirée à en faire, et à l’heure qu’il est, on peut présumer que ce pauvre Alex Tuch n’a pas dû passer une bonne nuit, parce qu’il a dû revoir et revoir dans sa tête le vol que Price lui a fait en pleine face en étirant la jambière. Si Tuch marque sur ce jeu, c’est fort probablement 2-1 Golden Knights dans la série.
Mais ce n’est pas arrivé, et c’est plutôt le Canadien qui est en avance 2-1. C’est bien pour dire.
Les bonds favorables ? On vous ramène aux deux buts d’Anderson… C’est le genre de petits détails qui peuvent épuiser l’adversaire, qui commence à croire qu’il doit se battre contre… des fantômes, justement. « Lors de la prolongation, on a senti combien ils étaient fatigués », a d’ailleurs fait remarquer Anderson.
Cette journée folle avait commencé de très mauvaise façon, avec l’entraîneur Dominique Ducharme forcé à une retraite préventive en raison de ce qui allait s’avérer un test positif à la COVID-19. Ducharme a tout de même pu s’adresser aux troupes avant et après le match par Zoom, et le nouvel entraîneur (lui-même intérimaire !) Luke Richardson a expliqué que Ducharme avait tout de même pu aider à diriger le club à distance.
Phillip Danault a très bien résumé tout ça.
« Cette journée a été à l’image de notre saison… le vent dans la face. Mais on trouve une façon de gagner. Ç’a été une grosse victoire. Et ç’a été à l’image de l’année au complet. Mon équipe, je la trouve spéciale. »
— Phillip Danault
Tout cela est très spécial, en effet.
Qui aurait pu prévoir un pareil scénario ? Il n’y a pas si longtemps, avec un retard de 1-3 dans la série face aux Leafs, on conjecturait sur l’identité du prochain coach et sur la journée de congédiement de Marc Bergevin. Si jamais Patrick Roy a pris la 20 à bord de sa voiture, il a probablement dû virer de bord une fois rendu au Madrid.
Ce n’est pas terminé, bien évidemment, et les Chevaliers dorés peuvent toujours s’en remettre. Mais des fois, il est bien difficile de vaincre un club dont la destinée semble tracée d’avance.
Le Canadien a eu ce genre de club en 1986 et en 1993. Force est d’admettre que le club de 2021 commence à ressembler à ça également.