Gilles Vigneault Les écrits

Gilles Vigneault sur…

Le ciment d’une chanson

« Je dis toujours aux jeunes qui veulent faire de la chanson qu’il faut écrire comme si on allait être publié dans La Pléiade. Après, c’est facile de faire des élisions et de mettre ça dans sa propre parlure. Quand le vers est enchaîné aux règles de la prosodie française, il peut être libre plus tard. Mais le vers libre en premier, c’est mettre la charrue devant les bœufs, et là les bœufs s’en aperçoivent, ils virent de bord et vont dans l’autre sens. Ça peut faire des bonnes chansons quand même, mais ça ne fait pas quelque chose d’aussi fort, serré. Pour moi, écrire en vers mesurés français, c’est bâtir dur. »

L’inspiration

« Mes chansons ont été écrites dans toutes sortes de contextes, parfois sans même m’en rendre compte. C’est ça qui est drôle. Mais on ne sait pas d’où ça vient, et ça ne nous regarde pas. Il y a des choses qui nous sont données, proposées comme des cadeaux, il faut les recevoir avec beaucoup d’humilité et la certitude qu’on ne les méritait pas. »

La jeunesse

« La jeunesse, c’est un projet. Je regarde les jeunes du printemps érable, on les voit bouger dans la rue, à la une des journaux et partout ailleurs. Ce sont des projets immenses, j’ai même envie de dire : des projets pleins de projets. Moi, j’ai eu des années de débandade, il y avait trop de choses qui venaient trop vite, il y avait trop d’avenir, trop d’allant, il restait trop de chemin à faire. On avance au début à la course, puis on ralentit le pas et on réalise qu’il est bon de choisir et de faire une chose à la fois. »

La mort

« Plus on vit, plus on peut écrire et oser écrire la vie des autres. On découvre qu’elle ressemble beaucoup à la nôtre parce que nous sommes tous confrontés à la mort. C’est pour ça que j’ai écrit : “Je fais chaque jour un pas qui m’approche de mon âme. Elle a le pas d’une dame qui ne se retourne pas.”

Ça veut dire qu’on y pense. Et si on évite d’y penser, il arrive que les autres y pensent pour nous. Et chaque fois que quelqu’un disparaît, on est face à sa propre mort. Ça nous cause de notre fragilité. Qui sait, c’est peut-être ma dernière interview ! Vite, une photo… »

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