RELATION

Sexe après rupture, une bonne idée ?

Déprimé après s’être séparé de sa conjointe, Éric, 33 ans, a commencé à sortir dans les bars, encouragé par ses amis. « J’ai rencontré une fille charmante qui sortait aussi d’une longue relation. On se comprenait. On a couché ensemble à quelques reprises. Même si on savait tous les deux qu’on s’utilisait, ça m’a changé les idées et j’ai pu réaliser que j’étais encore désirable. Et comme mon ex a rencontré quelqu’un d’autre, c’est comme si je voulais faire pareil », confie-t-il. Un an après sa rupture, Éric n’est toujours pas prêt à se lancer dans une autre relation sérieuse.

La relation de transition ou « tampon », mieux connue comme rebound, est une relation généralement sexuelle et sans attachement, juste après une rupture. La personne se sert de cette relation, consciemment ou pas, pour espérer mieux vivre sa séparation. Les écrits scientifiques sont rares sur ce comportement qui est pourtant un phénomène très connu.

Il y a quelques mois, des chercheurs américains se sont enfin penchés sur le sujet, et on publié une étude dans la revue Archives of Sexual Behavior, menée auprès de 170 étudiants. Résultat : les gens ont souvent recours à une relation tampon pour se venger de leur ex ou pour essayer d’oublier leur détresse. Surtout durant le mois suivant la rupture.

BIENFAITS TEMPORAIRES

Mais les relations de transition peuvent-elles réellement aider à se relever d’une séparation douloureuse ?

« Coucher avec une autre personne après une séparation aide à soigner son ego, à se redonner confiance, à se revaloriser, à se sentir désirable. Mais les bienfaits sont souvent temporaires », explique la sexologue clinicienne Marie-Eve Demers-Morabito. « Ces relations ne peuvent guérir en profondeur la blessure d’abandon, de rejet, de honte, de culpabilité ou d’échec de la relation amoureuse. »

« Ça permet juste de mettre un pansement sur une blessure. Ça divertit, ça change les idées, ça réconforte après le choc de la rupture. »

— Marie-Eve Demers-Morabito, sexologue clinicienne

Mais ça ne marchera pas pour tout le monde. « Car ce qui pousse les gens à avoir des relations sexuelles, au-delà d’un besoin physiologique, ce sont des besoins psycho-affectifs propres à chacun », souligne la sexologue et psychothérapeute Élaine Grégoire. Ainsi, une personne qui associe la sexualité à la tendresse, aux sentiments, à la complicité, ne se sentira pas nécessairement valorisée par une aventure d’un soir.

Et attention, en voulant vérifier qu’on est toujours désirable, on peut se faire prendre au jeu. Car si, par exemple, ça se passe mal sous les draps avec sa nouvelle flamme, la confiance en soi, déjà fragilisée, peut en prendre un autre coup.

OUBLIER L’EX

« Quand on perd quelque chose, on cherche souvent à le remplacer rapidement pour éviter de souffrir. Mais si on tombe trop vite dans les bras de quelqu’un d’autre, le cœur et le corps risquent de ne pas suivre », soutient Marie-Eve Demers-Morabito.

Elle précise que, dans certains cas, la relation de transition peut se transformer en amour. Mais encore faut-il avoir fait le deuil de sa relation précédente. « Ce n’est pas qu’une question de chance », affirme-t-elle.

Oublier l’ex ? La relation ? Pas évident, estime le sexologue clinicien Alain Gariépy.

« Je ne sais pas si on peut vraiment régler son passé, comme on dit. Je n’ai jamais vu des gens qui l’ont fait. L’objectif n’est pas d’avoir un passé réglé, mais d’être disponible pour quelque chose de nouveau. »

— Alain Gariépy, sexologue clinicien

« Quand on s’est fait larguer, il peut être normal d’en vouloir à son ex et d’avoir envie de se venger. Il y en a qui voudront rendre l’ex jaloux pour qu’il ait envie de nous récupérer. La tentation est forte de vouloir montrer à l’autre que quelqu’un d’autre nous aime ou nous désire. On voudra trouver une personne plus belle ou qui jouit d’un meilleur statut social », avance Marie-Eve Demers-Morabito.

« Mais mélanger l’intimité avec la colère, qui entraîne de la vengeance, c’est vraiment un mauvais cocktail », met en garde Alain Gariépy.

Une fois célibataires, « les gens qui ont peur de la solitude vont prendre la première personne qui passe. Ça donne souvent des relations désastreuses, car on n’a pas choisi cette personne pour ses valeurs, sa personnalité, mais seulement parce qu’elle était là », souligne Élaine Grégoire.

Pour mieux vivre la rupture

Il n’y a pas de recette miracle pour surmonter une rupture, puisque tout dépend de sa personnalité, de sa relation et de la raison de la séparation. Mais les experts donnent quelques pistes :

À un moment, il faut être capable de prendre du temps en solo pour faire le bilan de sa relation, de réfléchir à ce qu’on veut et ce qu’on ne veut pas. Et ne pas hésiter à recourir à de l’aide professionnelle.

Prendre le temps de se redécouvrir, de connaître ses passions.

S’entourer de personnes qu’on aime, qui ont une bonne écoute.

Se demander pourquoi on est si pressé de se retrouver dans une autre relation.

Laisser du temps au temps…

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