Étude

Les gènes de la taille humaine identifiés

Prenez 700 000 êtres humains – des grands, des petits, des moyens. Puis scrutez leur code génétique pour essayer de démêler quels sont les gènes qui influent sur la taille des gens. C’est le travail de moine qu’a accompli une équipe de 300 chercheurs codirigée par un Québécois. Explications.

Tous uniques

Si vous êtes unique, c’est parce que votre code génétique présente d’infimes variations par rapport à celui de votre voisin. Mais les variations possibles sont si nombreuses que savoir lesquelles conduisent à un gros nez, à des aptitudes sportives ou à un risque accru d’avoir le diabète est un casse-tête colossal. C’est pourtant l’exercice auquel s’est attaqué Guillaume Lettre, professeur à la faculté de médecine de l’Université de Montréal et chercheur à l’Institut de cardiologie de Montréal.

Dans une étude qui a mobilisé 300 chercheurs pendant plus de trois ans, le professeur Lettre a décidé de partir à la recherche des bases génétiques qui influencent un trait bien précis : la taille des individus.

« D’un point de vue clinique, la taille n’est certainement pas le trait le plus intéressant. On aurait pu se pencher sur les gènes qui influencent le diabète, les maladies cardiovasculaires ou la schizophrénie, par exemple. Ce qui a dicté notre choix, c’est qu’on avait besoin d’un très grand nombre de sujets », explique à La Presse le professeur Lettre, codirecteur de cette étude qui vient d’être publiée dans la prestigieuse revue Nature.

83 variations identifiées

Les chercheurs ont donc vérifié la présence de 250 000 variations génétiques connues chez chacun des 700 000 sujets. Armés d’ordinateurs, ils ont ensuite comparé la présence de ces variations avec la taille des individus afin de comprendre lesquelles avaient une influence. Ils ont fini par identifier 83 variations qui gouvernent la taille humaine. Ces variations modulent le développement des os et du cartilage ou influencent la production de l’hormone de croissance.

Une « preuve de concept »

Le travail des chercheurs a mené à des découvertes intéressantes. Ils ont par exemple montré qu’une variation sur un gène appelé STC2 fait augmenter la taille des individus en « enlevant le frein » à certains facteurs de croissance. « On peut penser qu’on pourrait un jour traiter des enfants qui ont des problèmes de croissance en agissant sur ce gène », explique le professeur Lettre.

Mais l’intérêt principal de l’étude est ailleurs : par leur travail, les chercheurs ont montré qu’il était possible de relier des variations génétiques rares à des traits ou des maladies bien précis chez les êtres humains.

« C’est une preuve de concept qu’on pourrait éventuellement appliquer à des choses qui sont cliniquement plus importantes, explique le professeur Lettre. Si on fait le même type d’étude sur un large échantillon de gens qui ont le diabète, on va probablement trouver des variations rares qui vont nous donner des indices sur les gènes qui sont impliqués dans le diabète. Cela [...] ouvrirait la porte à une médecine de précision. »

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