Sur la ligne de départ virtuelle, au mois d’août dernier, elles étaient exactement 8872 à rêver d’un contrat professionnel avec l’équipe du World Tour Canyon-SRAM. Olivia Baril y a longtemps cru en parvenant à se qualifier parmi les 10 demi-finalistes du concours Zwift Academy, du nom de l’entreprise qui a développé l’application d’entraînement.
« C’est quelque chose à écrire dans mon CV sportif. C’est vraiment un exploit, le monde me dit : “C’est vraiment cool que tu aies fait ça” », raconte la cycliste de 21 ans qui n’a toutefois pas atteint la finale de cette compétition.
Actuelle championne canadienne sur route et en contre-la-montre chez les moins de 23 ans, Baril utilise Zwift depuis un an environ. Quand une coéquipière de l’équipe Macogep-Tornatech-Specialized lui a parlé de Zwift Academy, dont l’accès est réservé aux cyclistes de niveau amateur, elle n’a pas réfléchi longtemps. « Je me suis promis d’y participer. Et je me suis inscrite pour gagner ! »
Voyez une vidéo de Zwift Academy :
https://www.youtube.com/watch?v=-BSgMQEoPSU
Durant les mois d’août et de septembre, les qualifications ont pris la forme de huit entraînements préétablis et de quatre courses permettant de mesurer la puissance, la capacité anaérobie ou l’explosivité.
« Zwift avait créé une courbe de puissance pour toutes les filles et, pendant les deux mois de sélection, j’ai pu voir où je me situais par rapport aux autres. Je me suis démarquée au test de puissance sur une minute. Je me suis rendu compte que j’avais de bonnes puissances lors des tests allant de 30 secondes à 5 minutes. Je suis plus explosive qu’endurante. »
Elle n’est pas seule à s’en être aperçue. À la fin de septembre, elle a su qu’elle faisait partie des 10 dernières candidates en lice. Dans le lot, elle retrouvait d’anciennes finalistes du concours, de jeunes cyclistes au palmarès amateur bien garni ou des athlètes issues d’autres disciplines comme l’aviron ou la course à pied. Elle était la seule Canadienne.
Pour que tout le monde soit sur un pied d’égalité au niveau technologique, chacune a reçu une base d’entraînement avec les mêmes données.
« Durant 14 jours, on a dû faire quatre entraînements intérieurs qui étaient vraiment plus difficiles que lors de la phase de sélection. Il y avait aussi trois sorties à l’extérieur, dont l’une de quatre heures.
« Ça m’a désavantagée parce qu’il commençait à faire froid à Montréal. Certaines filles sont allées en camp d’entraînement pour faire ces trois courses extérieures. Je n’avais pas cette possibilité, alors, j’ai fait ce que j’ai pu. J’ai grimpé le mont Royal. »
En fin de compte, la jeune femme originaire de l’Abitibi n’a pas été retenue parmi les trois finalistes. En consultant les données des entraînements, elle sait toutefois que l’écart était infime entre les participantes.
Un « gros entraînement mental »
Cette aventure est loin d’avoir été vaine pour celle qui se décrit comme une « puncheuse » sur la route. Au-delà des efforts physiques, elle juge que la compétition a testé sa force mentale après une saison sportive déjà bien occupée.
« C’est habituellement une période de repos parce que la saison a été longue, qu’il commence à faire froid et que, dans mon cas, l’école avait recommencé. Ça devenait difficile de trouver un rythme. Des fois, je disais à mon copain : “C’est trop difficile, je n’ai plus envie de faire les entraînements, j’abandonne”. Il me répondait que je ne le pouvais pas et que j’étais dans les 10 dernières. Ç’a été un gros travail mental ».
La cycliste, qui a été repérée alors qu’elle pratiquait le triathlon, est en troisième année à l’Académie d’ostéopathie de Montréal. Lorsqu’elle rate des cours en raison d’une course ou d’un camp d’entraînement, elle a toujours l’option de les rattraper par le biais de vidéos en ligne. « C’est difficile quand il y a de grosses semaines. Je suis à l’école de 8 h à 16 h et je dois m’entraîner ensuite, ajoute-t-elle. Mais il faut le faire et je suis contente de la façon dont j’ai concilié les deux jusqu’à maintenant. »
Au moment de l’entrevue, elle était d’ailleurs en Espagne pour un camp de trois semaines où elle enchaînait les longues sorties et les séances d’intervalles. L’entraînement intérieur et les courses virtuelles sont cependant loin d’être finis. Elle a, par exemple, été recrutée par la première gagnante de Zwift Academy, Leah Thorvilson, pour une série d’épreuves qui se tiendront jusqu’à la fin du mois de janvier. Une somme de 5000 $ est en jeu à chaque course.
Elle retrouvera ensuite son équipe Macogep-Tornatech-Specialized, qui vient tout juste d’obtenir sa licence UCI. Cela lui permettra de participer à des épreuves de plus grande envergure, en Europe notamment.
À la fin de ses études, dans un an et demi, elle rêve justement de s’y rendre et de se joindre à une équipe du World Tour. Et sur son CV, elle ne manquera certainement pas de glisser une ligne ou deux sur Zwift Academy.