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La sénatrice Julie Miville-Dechêne dénonce les voyages des parlementaires payés par des pays tiers

La sénatrice Julie Miville-Dechêne dénonce le fait que des parlementaires soient encore autorisés à accepter « des voyages à l’étranger payés par des puissances étrangères », écrit-elle. Les sénateurs, comme les députés, ont notamment accepté au cours des dernières années des voyages offerts par les Émirats arabes unis et Israël.

Sur Twitter hier, la sénatrice indépendante, qui est entrée en poste en 2018, s’est d’abord exprimée pour approuver un texte publié dans le magazine Maclean’s qui dénonçait de tels voyages payés par des gouvernements étrangers à des députés.

En entrevue avec La Presse ensuite, Mme Miville-Dechêne a fait remarquer que les sénateurs et les députés ne commettent pas une faute, puisque dans l’état actuel des choses, cela leur est permis.

Aux députés de voir à ce qui doit être fait, mais en ce qui la concerne, à savoir le Sénat, elle entend assurément susciter un débat sur la règle des voyages dits « parrainés » contenue dans le code d’éthique des sénateurs.

La situation est d’autant plus regrettable à ses yeux « que le Sénat est une institution qui doit redorer son image auprès de l’opinion publique ».

« Nous sommes un pays développé, qui a des moyens », souligne-t-elle, et il n’y a pas de raison, selon elle, d’accepter de voyager aux frais de gouvernements étrangers.

« Vous remarquerez que plusieurs sénateurs ne font jamais de ces voyages, comme quoi je ne suis pas la seule à avoir ces réserves. C’est juste que je les ai exprimées. »

— Julie Miville-Dechêne

Dès qu’elle est entrée en poste et qu’elle a été mise au courant de la règle concernant les voyages, elle dit avoir été « étonnée » et avoir ressenti un malaise devant le peu de balises en cette matière.

« À titre de parlementaire, on doit tout faire pour éviter tout conflit d’intérêts ou toute apparence de conflit d’intérêts », fait-elle observer.

À la suite de controverses, le code d’éthique des sénateurs a été revisité ces dernières années pour éviter les abus, en ce qui a trait aux lieux de résidence, par exemple.

Mais toute la question des voyages – « qui est très frappante » – n’a pas fait l’objet d’une sérieuse réflexion, s’étonne-t-elle.

Quand les invitations proviennent de gouvernements ou d’ambassades, « cela paraît très clair », selon elle, que les sénateurs devraient être tenus de décliner l’invitation.

« Très délicat »

Pour la population, de telles invitations peuvent donner à penser que les gouvernements étrangers ont des choses à faire valoir, et cela, « c’est très délicat ». « Quel effet cela a sur l’opinion publique ? », demande-t-elle.

Quand les invitations émanent d’associations ou d’organismes, la réponse peut être moins évidente, mais chose certaine, « pour [elle], ça doit toujours être matière à réflexion ».

En plus d’être souvent invités par Israël ou les Émirats arabes unis, les sénateurs et députés vont fréquemment en Asie. L’Association chinoise de coopération économique internationale est particulièrement généreuse de ses invitations à Taipei.

Pour sa part, Julie Miville-Dechêne a assuré en entrevue qu’elle allait refuser tout voyage qui n’est pas payé par son bureau, ajoutant que sa longue carrière comme journaliste, puis comme ombudsman à Radio-Canada, l’avait rendue particulièrement sensible à ces questions.

Ses collègues sénateurs apprécient-ils que la petite nouvelle fasse une telle sortie ? En après-midi hier, son tweet, dit-elle, ne lui avait pas encore valu de volée de bois vert.

De toute manière, dit-elle, ils sont très au fait de son opinion sur le sujet. « Je n’ai pas caché à mes collègues mon opposition à cette règle sur les voyages. »

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