BILLET

Et si la famille se retirait ?

Le renoncement de la famille fondatrice au contrôle de Bombardier ajouterait beaucoup de valeur au groupe qui pourrait être disloqué. Le scénario, au préambule surprenant, n’est peut-être pas aussi hypothétique.

« Alors que nous aurions pensé [il y a encore six mois] que la possibilité que la famille abandonne sa participation dans Bombardier était bien éloignée, nous voyons maintenant des preuves qui suggèrent que c’est une possibilité réelle. Si elle se concrétisait, notre analyse de la valeur de liquidation suggère une hausse importante », écrit Walter Spracklin, de RBC Marchés des Capitaux, dans un rapport de recherche étoffé livré hier.

Selon ses calculs, Bombardier en pièces détachées vaudrait 2,88 $ par action subalterne plausiblement, jusqu’à 4,35 $ dans le meilleur des cas, mais 1,61 $ au pire. Il s’agit effectivement d’une bonification par rapport au cours du titre qui oscille autour de 1,60 $ depuis un mois.

C’est aussi une valeur probable supérieure à l’évaluation de 2,00 $ qu’obtient l’expert de RBC sur la base des flux financiers futurs du groupe consolidé, qui recevrait le même multiple que ses pairs pour les activités de Bombardier Transport et un escompte de 40 % pour ses opérations aéronautiques.

Walter Spracklin dissèque Bombardier en huit composantes. La division Transport est la mieux valorisée à 2,92 $ par action de Bombardier, avant le remboursement des dettes et la prise en compte de l’argent en caisse. Les programmes de jets d’affaires Global, Challenger et Learjet valent pour leur part 1,35 $, 67 cents et 31 cents par action, respectivement, dans le scénario de base.

Une valeur de 49 cents par action est attribuée aux avions en développement de la C Series. C’est l’évaluation la plus discutable, reconnaît-il. Son analyse considère « essentiellement irrécupérables » tous les coûts de développement à ce jour et s’en tient au rendement possible du capital de 1,0 milliard à 1,8 milliard qui reste à injecter dans le programme.

L’analyste de RBC va même jusqu’à identifier des acheteurs potentiels pour les principales composantes du groupe montréalais : le groupe chinois Beijing Infrastructure Investment pour la division Transport ; Textron Aviation, le concurrent Embraer ou des fonds d’investissement privés pour les trois familles d’avions d’affaires ; Saab ou ATR pour les avions commerciaux turbopropulsés Q400 (valeur de 10 cents par action).

Plusieurs groupes sont pressentis pour la partie C Series, comme United Aircraft Corporation, Mitsubishi, Airbus, Boeing et Embraer, mais la plus forte anticipation va au groupe Commercial Aircraft Corporation of China, en raison des gains technologiques en jeu.

LA FAMILLE BOMBARDIER-BEAUDOIN

Selon Walter Spracklin, la famille Bombardier-Beaudoin, qui possède 54 % des droits de vote avec seulement 14 % des actions, serait plus encline à appuyer la dislocation du groupe, alors que de nouvelles injections de liquidités s’imposent pour compléter le développement et mettre en production les nouveaux jets commerciaux, « sans nul doute un effort de longue haleine ».

L’expert en transport note que l’attention de la succession de Joseph-Armand va de plus en plus à ses autres intérêts financiers considérables, comme BRP et Ciment McInnis. L’ancien Bombardier Produits Récréatifs valait d’ailleurs plus en Bourse que le groupe dont il est issu, au pire de sa déroute boursière, en août dernier.

LES HÉRITIERS AUX COMMANDES

Actionnaire/Part du capital/Contrôle des votes

André Bombardier/3,3 %/13,1 %

Janine Bombardier/3,1 %/12,4 %

Claire Beaudoin/3,1 %/12,3 %

Huguette Fontaine/3,0 %/12,2 %

Laurent Beaudoin/0,9 %/2,7 %

Jean-Louis Fontaine/0,2 %/0,8 %

Pierre Beaudoin/0,1 %/0,1 %

Source : RBC Marchés des Capitaux

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