Intervention en autisme

Quel soutien offrir aux enfants autistes ?

Dans son dernier Plan d’action en autisme, qui remonte à 2003, Québec préconisait l’implantation de l’intervention comportementale intensive (ICI) à raison de 20 heures par semaine auprès de tous les enfants autistes de 0 à 5 ans. Comment s’est déployée cette offre de service sur le terrain ?

De façon très inégale, selon la présidente de la Fédération québécoise de l’autisme, Jo-Ann Lauzon. Alors que certains centres de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement (CRDITED) parvenaient à offrir de l’ICI à raison de 20 heures par semaine à la majorité de leur clientèle, d’autres en ont été incapables. « Les CRDITED de la province ont développé différentes façons d’offrir l’ICI en fonction de leurs listes d’attente », note Mme Lauzon. Par exemple, des établissements réduisent le nombre d’heures de services afin de diminuer leurs listes d’attente. D’autres offrent des interventions de groupe plutôt qu’individuelles.

Dans un rapport de 2014, la Fondation Miriam, qui vise à améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de troubles du spectre de l’autisme et de déficience intellectuelle, notait que plus de 1000 enfants attendent jusqu’à deux ans au Québec avant d’obtenir de l’ICI. Des CRDI (centres de réadaptation en déficience intellectuelle) rapportaient qu’ils offraient moins d’heures d’ICI à plus d’enfants afin de diminuer leurs listes d’attente.

La porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) Noémie Vanheuverzwijn assure que la « majorité des CRDI offrent l’ICI 20 heures par semaine ». Elle reconnaît toutefois que certains « offrent moins d’heures d’ICI, soit pour desservir plus d’enfants, soit pour d’autres raisons d’ordre clinique ». 

En février 2016, un Forum sur le trouble du spectre de l’autisme a eu lieu au Québec et le prochain Plan d’action du gouvernement à ce sujet, promis pour décembre 2016, est toujours attendu. Quelles sont les orientations actuelles du MSSS en ce qui concerne les services aux personnes autistes ? 

Le Plan d’action en autisme « sera dévoilé en temps opportun », dit-on au ministère de la Santé. En attendant, le MSSS « réitère l’importance de l’ICI pour les jeunes enfants de 0 à 5 ans, compte tenu de ses effets sur le fonctionnement cognitif, le langage et les comportements adaptatifs ». « À cet égard, l’intensité recommandée est de 20 heures par semaine », affirme la porte-parole du MSSS, Noémie Vanheuverzwijn. D’ailleurs, une « réflexion est en cours afin que l’ICI fasse l’objet d’une attention particulière afin d’améliorer l’accès et de s’assurer de la qualité de l’application de l’ICI dans les différents milieux de vie de l’enfant ». Le MSSS dit aussi être « toujours à l’affût des nouvelles connaissances scientifiques » et vouloir « documenter et proposer différentes approches, basées sur les meilleures pratiques et les recommandations d’experts, afin de diversifier l’offre de services spécialisés selon les profils et les besoins des enfants ».

Les dépenses du gouvernement destinées aux personnes autistes et souffrant de déficience intellectuelle atteignent environ 1 milliard par an au Québec. Est-ce suffisant ?

Pas du tout, selon le président de la Fondation Miriam, Warren Greenstone. Pour lui, les personnes autistes et leurs parents composent avec « les conséquences du sous-financement et du manque de soutien accordé aux familles touchées par le trouble du spectre autistique (TSA) au Québec ».

En 2016, le gouvernement a promis d’investir 5 millions de dollars de plus pour les services aux personnes autistes. Un montant nettement insuffisant pour M. Greenstone, qui a mis en ligne la semaine dernière une pétition pour réclamer plus d’investissements. Au MSSS, on affirme que de 2007-2008 à 2014-2015, « le contour financier du programme en déficience intellectuelle ou du trouble du spectre de l'autisme (DI-TSA) est passé de 474 millions à 1 milliard ».

M. Greenstone et la présidente du Centre d’innovation pour l’autisme et les déficiences intellectuelles, Malvina Klag, estiment que le budget accordé aux personnes autistes devrait augmenter d’au moins 60 millions par année dès maintenant afin de rehausser l’intervention précoce chez les enfants et de répondre aux besoins en matière d’hébergement des adultes autistes. La présidente de la Fédération québécoise de l’autisme, Jo-Ann Lauzon, affirme quant à elle que « ça fait longtemps qu’il n’y a pas eu de nouvel argent en autisme » et qu’un réinvestissement de Québec est urgent. « De plus en plus d’enfants reçoivent un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme. Mais les budgets stagnent. Les parents ont raison de se plaindre », dit-elle.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.