Santé

Les commotions cérébrales peuvent changer les tout-petits

Colère, agressivité, anxiété, symptômes dépressifs : les commotions cérébrales peuvent entraîner des changements de comportement chez les tout-petits, ont découvert des scientifiques montréalais. Les chercheurs plaident pour qu’on étudie mieux ces jeunes cerveaux qui se cognent… tout en laissant leurs jeunes propriétaires être actifs et vivre leur vie d’enfant.

Souvent cognés, peu étudiés

Ils jouent, grimpent, chutent et apprennent souvent à la dure la notion de danger. Les enfants de 0 à 5 ans sont les plus susceptibles de subir des chocs à la tête et des commotions cérébrales. Pourtant, ils sont sous-étudiés par rapport aux athlètes, aux adolescents et aux adultes. Comment l’expliquer ? « Dans le passé, on avait cette croyance que le cerveau des enfants est très plastique, très bon pour se réparer et se modifier », explique Miriam Beauchamp, chercheuse au Centre hospitalier universitaire (CHU) Sainte-Justine et auteure principale d’une étude publiée récemment dans la revue Psychological Medicine. Cela n’est pas faux. Mais d’un autre côté, le cerveau des tout-petits est aussi en plein développement, ce qui le rend plus vulnérable aux traumatismes. D’où la nécessité de mieux comprendre l’impact des chocs à la tête qu’encaissent régulièrement les tout-petits.

Recrutement aux urgences

Pour savoir comment réagissent les petits cerveaux qui se cognent, l’équipe de Miriam Beauchamp a suivi pendant plusieurs mois 86 enfants âgés de 18 mois à 5 ans et ayant été reçus aux urgences de Sainte-Justine pour un traumatisme cérébral léger. Ces enfants ont été comparés avec d’autres qui n’ont pas subi de blessures, ainsi qu’avec un deuxième groupe d’enfants ayant subi des blessures orthopédiques (cheville foulée, bras cassé ou autre). « Certains symptômes d’une commotion cérébrale peuvent être provoqués par le simple fait d’avoir eu un accident, d’avoir éprouvé de la douleur, d’avoir manqué de sommeil ou de voir ses parents plus stressés. Ce groupe contrôle nous permet de discriminer ces facteurs de ceux qui sont spécifiques à la commotion », explique la chercheuse Miriam Beauchamp.

Crises et anxiété

« La majorité des enfants se remettent très bien d’une commotion cérébrale. C’est important de le dire. Ma plus grande crainte serait qu’on empêche les enfants de faire des activités physiques », précise tout de suite Miriam Beauchamp. Il reste que les tout-petits ayant subi une commotion cérébrale sont statistiquement plus susceptibles que les autres de présenter des changements de comportement, et que ceux-ci peuvent perdurer jusqu’à au moins six mois après la blessure. Ces changements sont souvent « externalisés » (colère, crises, impulsivité), mais peuvent aussi être « internalisés » (anxiété, repli sur soi, tristesse, certains symptômes dépressifs). Les scientifiques estiment que ces résultats montrent que même un traumatisme crânien considéré comme « léger » entraîne probablement des blessures cérébrales. Les chercheurs continueront de suivre les enfants au fil des ans. « Nous croyons que les symptômes finiront par s’atténuer avec le temps, mais nous allons le vérifier », dit Miriam Beauchamp, qui travaille notamment avec l’étudiante au doctorat Charlotte Gagner, première auteure de l’étude.

Stress parental

Comme ce sont les mères et non les tout-petits qui ont rempli les formulaires sur l’humeur des enfants, l’étude comporte un biais possible. Il se peut que les mamans stressées par la commotion de leur enfant aient scruté celui-ci avec plus d’attention et donc relevé plus de changements. Il est aussi possible que leur stress les ait amenées à considérer le comportement de leur enfant comme plus difficile. « Dans tous les cas, ça montre que la commotion cérébrale affecte aussi les parents. Eux aussi ont besoin de soutien dans la gestion des symptômes », souligne Miriam Beauchamp. Et que faire si votre enfant a subi un choc à la tête et que vous le trouvez changé ? Il n’existe malheureusement pas de pilule miracle pour le guérir des effets de sa commotion. Mme Beauchamp conseille d’agir sur les symptômes et de demander l’aide de thérapeutes au besoin.

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