Alimentation

La dénutrition, 
un réel danger pour
les personnes âgées

Jusqu’à la moitié des patients âgés qui se présentent dans les hôpitaux souffrent de dénutrition, ce qui retarde considérablement leur guérison et leur réadaptation. Un menu riche en calories et en protéines, notamment, est d’autant plus important.

Le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) a pris des mesures pour augmenter la valeur nutritive des mets servis aux patients plutôt que d’avoir recours systématiquement aux suppléments alimentaires.

Tous les patients de 75 ans et plus qui sont hospitalisés au CHUM, peu importe le secteur, ont droit à ce que l’on appelle désormais la diète OPTIMAH, l’un des volets du programme Optimisation des soins aux personnes âgées à l’hôpital.

« On a enrichi les mets, par exemple les soupes, avec de la crème 35 % et de la poudre de lait », explique Guylaine Proulx, chef des activités d’alimentation à l’hôpital Saint-Luc et responsable de la gestion des menus au CHUM.

Le CHUM a d’abord réalisé une étude pour analyser les plats que les personnes âgées préfèrent. Ces mets sont enrichis pour augmenter leur valeur calorique et protéinique. C’est le cas du pâté chinois, des soupes, des desserts, des œufs brouillés et du gruau.

Des essais sont menés pour ajouter d’autres mets, notamment pour enrichir les légumes. « Les gens aiment mieux manger de vrais aliments qu’ils connaissent. Au CHUM, on mise sur cet apport plus élevé. On essaie de faire en sorte que ce soit goûteux », ajoute Mme Proulx.

Ça ne veut pas dire que le centre hospitalier n’a pas recours, comme d’autres hôpitaux, aux suppléments alimentaires. Mais il y en a moins.

« Quand on y a recours [aux suppléments alimentaires], on veut être sûrs qu’ils soient utilisés pour le bon patient et qu’ils soient consommés. »

— Guylaine Proulx, chef des activités d’alimentation à l’hôpital Saint-Luc et responsable de la gestion des menus au CHUM

La dénutrition peut survenir très rapidement chez un malade, particulièrement chez une personne âgée. Son impact est important, tant sur la guérison que sur la réadaptation.

« En cas de malnutrition, de carences en nutriments ou en énergie, il y a des impacts sur le fonctionnement, la structure des organes, des cellules, et cela peut se traduire par un système immunitaire affaibli, des plaies qui sont plus difficiles à cicatriser, des pneumonies, des infections nosocomiales », énumère la présidente de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec, Paule Bernier.

UNE PRATIQUE PRÉCONISÉE PAR LE MINISTÈRE

Dans son Cadre de référence sur l’approche adaptée à la personne âgée en milieu hospitalier, le ministère de la Santé et des Services sociaux insiste toutefois très peu sur l’importance d’offrir des repas enrichis aux patients.

Si le patient ne mange pas suffisamment et risque la dénutrition, le Ministère propose le recours aux suppléments. « À ce stade, il faut considérer les suppléments nutritionnels comme un équivalent médicamenteux, non uniquement comme un aliment à consommer au goût », peut-on lire dans la brochure produite en 2011.

Le Ministère préconise aussi une approche uniformisée où l’on est particulièrement vigilant quant à la quantité de sucre, de sel et de matières grasses dans les aliments. Or, ce qui guette les personnes âgées et les patients très malades n’est pas l’obésité, mais la dénutrition, souligne Michel Sanscartier, chargé de cours au département de nutrition de l’Université de Montréal.

« Tout est une question d’équilibre », lance M. Sanscartier. Comme nutritionniste, il lui arrive de voir des patients qui refusent de manger mais qui retrouvent l’appétit si on ajoute du sel à leurs mets. « Dans un cas comme celui-là, la dénutrition est bien plus coûteuse que l’hypertension à cause du sel. »

Quant aux suppléments alimentaires, ils peuvent être bénéfiques à court terme, mais les gens s’en lassent très vite, ce qui n’est pas plus efficace.

UN AUTRE SON DE CLOCHE

Une grande proportion de patients âgés qui se présentent à l’hôpital souffrent de dénutrition, mais peu reçoivent des suppléments oraux, révèle une nouvelle étude à paraître bientôt. Le Groupe de travail canadien sur la malnutrition vient de terminer une étude auprès de 1100 patients de partout au Canada. Ils étaient âgés de 54 à 77 ans, avec un âge médian de 66 ans. L’étude révèle que 46 % d’entre eux souffraient de dénutrition modérée ou sévère, indique Paule Bernier, présidente de l’Ordre professionnel des diététistes du Canada et membre du groupe de travail. « C’est énorme », dit-elle. L’étude s’est attardée sur la prévalence de la consommation de suppléments oraux. Elle ne tient pas compte des patients hospitalisés aux soins intensifs et aux soins palliatifs. « On constate que moins de 5 % des patients consommaient des suppléments nutritionnels. Par contre, on voit aussi que très peu de patients avaient un soutien nutritionnel alors qu’ils en auraient eu besoin », ajoute Mme Bernier.

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