OPINION

Pourquoi je ne prendrai plus le métro

C’est décidé. Pour aller travailler, je vends mon vélo et je m’achète une voiture.

Auparavant, en bon citoyen désirant laisser la plus petite empreinte de carbone derrière moi, je privilégiais ce que notre bonne STM appelle un « cocktail de transports ». De chez moi, à Montréal, je prenais un vélo pliable jusqu’à ma station de métro. Puis, je pliais ledit vélo et faisait le trajet jusqu’à la station Montmorency. Là, je dépliais l’engin et filait tout droit jusqu’au travail. C’était la combine vélo-métro-vélo-boulot.

Cela était sans compter le zèle maniaque des agents de sécurité de la STM. Mais comment les blâmer ? La STM entretient un certain flou quant aux vélos pliables. La seule mention sur le site web de la STM concerne le transport du vélo pliable dans les autobus. Mais rien dans le métro.

Étrangement, la seule mention que j’ai trouvée à ce sujet se trouve sur le site web d’un magasin de vélos montréalais. On y trouve la copie d’un courriel provenant d’un agent du service à la clientèle de la STM, qui affirme que les vélos pliables sont acceptés en tout temps dans le métro, dans tous les wagons.

Ce matin, la goutte a fait déborder le vase. Je me suis fait accueillir par deux gigantesques agents sur le quai du métro Montmorency : « Monsieur, il est interdit d’avoir un vélo aux heures de pointe. Vos papiers s’il vous plaît. » Voyez-vous, j’ai eu le malheur de déplier mon vélo en sortant du wagon. Je concède aux agents que le vélo, ainsi arrangé, contrevient effectivement au règlement.

Mais fondamentalement, y a-t-il une différence ? Je le fais rouler à côté de moi sur le quai, sans nuire à personne. Ce n’est pas pire que d’avoir devant soi une poussette ou de traîner une grosse valise. De plus, arrivé à Montmorency, j’étais seul dans mon wagon, et il n’y avait qu’une poignée de gens qui débarquaient sur le quai. Je ne dérangeais donc personne.

Mais voilà, il y a le règlement : « Oui, mais monsieur, si les milliers de cyclistes à Montréal se mettaient à faire comme vous ? » Comme si la présence de mon vélo sur le quai ce matin-là, à Laval, allait mener au chaos dans le métro !

Pas question de se servir de son jugement. Pas question de regarder autour de soi et d’agir avec discernement. Appliquons les règles et menaçons le cycliste « d’aller plus loin » dans les représailles si on se met en tête de plaider sa cause. Prends ton amende de 100 $ et boucle-la !

INDIFFÉRENCE ET ENTÊTEMENT

C’est ce mur d’indifférence, cet entêtement à pénaliser bêtement un citoyen qui tente de bien faire qui a fini par me décourager. Vous me direz de ne pas laisser tomber. Que ce n’est qu’un accident de parcours (à 100 $ l’amende, c’est un accident qui coûte cher). Que dans le fond, c’est en continuant à adhérer à mes bons principes que je gagne. Désolé, mais je décroche. La STM préfère pénaliser ses usagers à coups de punitions ridicules ? Elle aime mieux que je prenne mon auto ? D’accord. J’en ai soupé de ses retards, de ses wagons pris entre deux stations, de ses stations qui sentent l’égout, de ses agents qui appliquent le règlement sans discernement comme des petits robots bien programmés.

Une auto me coûtera plus cher chaque mois. J’ajouterai aux émissions de carbone. J’amplifierai le problème de la congestion routière. Je serai moins en forme. J’ai toutes les raisons de ne pas laisser mon vélo pour l’auto. Qu’importe. Ajoutez-moi à la liste des égoïstes et des imbéciles qui contribuent à la perte de l’humanité. À 45 ans, j’ai fini par réaliser que le monde est effectivement injuste, et que ce n’est pas en étant beau et gentil qu’on vit heureux.

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