Techno
Gérer le multitâche
La Presse
Répondre à un courriel, tout en parlant au téléphone et en commentant le statut d’une amie sur Facebook : la multiplication des gadgets électroniques dans nos vies a engendré une horde de spécialistes du multitâche. Comment se porte notre cerveau dans tout ça ?
« Que le cerveau se mette à fonctionner différemment, par exemple, qu’il y ait des connexions qui soient nouvelles, à la limite une région du cerveau qui soit nouvelle, il n’y a aucune preuve d’une réorganisation du cerveau aussi forte que ça », souligne le neurobiologiste Jean-Philippe Lachaux, auteur du livre et directeur de recherche à l’INSERM de Lyon, en France.
Ce qui ne veut pas dire que le cerveau n’est pas appelé à travailler différemment. « Le cerveau a plus de travail à faire, ça, c’est sûr, expose-t-il. Lorsqu’on est dans plusieurs tâches en même temps, il va falloir garder l’information relative à différentes tâches en mémoire. Cette mémoire de travail va être très sollicitée et a une capacité relativement faible. Pour ne pas oublier tout le temps, il faut que les neurones soient continuellement actifs, ce qui est coûteux en matière de métabolisme et de dépense énergétique. Il va y avoir une fatigue. »
Il est donc faux de penser que le cerveau des adolescents d’aujourd’hui est plus apte à travailler en multitâche que celui de la génération précédente. « À ma connaissance, il n’y a pas d’étude qui montre que cette génération soit meilleure pour un vrai multitâche, c’est-à-dire mener de front deux activités compliquées qui demandent vraiment de l’attention et être capable de basculer au bon moment et, chaque fois, de raccrocher l’attention de la façon la plus efficace, affirme le neurobiologiste. À mon avis, c’est un véritable apprentissage. »
Il est, à l’inverse, plutôt naturel de se laisser happer par un réseau social qui ne demande qu’à capter votre attention. « C’est trop facile de se laisser emporter, constate Gabriel Dagenais, 25 ans, grand utilisateur de Facebook. On ne prend pas le temps de se demander si c’est pertinent de perdre du temps pour y aller. On va juste cliquer. Un clic et on entre dans le vortex ! »
Selon Jean-Philippe Lachaux, en travaillant à maîtriser son attention, il est possible de basculer d’une tâche à l’autre avec efficacité. « Ça se travaille en ayant explicitement la conscience d’être en train de jongler entre plusieurs tâches et en décidant, de façon explicite, du moment où on va basculer d’une tâche à une autre. » M. Lachaux conseille également la méditation « pour prendre conscience des errances de son attention ». Alors, vous faisiez quoi avant de commencer la lecture de cet article ?