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Les croyants seraient moins intelligents que les athées

Les découvertes scientifiques font parfois l’effet de petites bombes, et celle-ci risque de détonner fort. Selon une étude publiée récemment dans la revue Personality and Social Psychology Review, les croyants sont en moyenne moins intelligents que les athées.

Ces conclusions, loin d’être lancées en l’air, découlent d’une vaste analyse de 63 études menées sur le sujet entre 1928 et 2012. Les chercheurs Miron Zuckerman et Jordan Silberman, de l’Université Rochester (New York), et Judith Hall, de la Northeastern University (Boston), concluent qu’il existe une différence significative entre l’intelligence analytique des croyants et celle des non-croyants.

« La question est délicate, a admis à La Presse le chercheur Miron Zuckerman. Mais nous n’avons fait que suivre les données. Il n’y a aucun jugement de valeur sur la religion ou les croyants dans cet article, qui mentionne d’ailleurs plusieurs facettes positives de la religion. »

Les chercheurs avancent trois explications à leurs découvertes. La première est que les gens intelligents sont moins portés à se conformer aux règles et résistent donc davantage aux dogmes religieux.

La seconde est que les gens qui brillent aux tests de quotient intellectuel tendent à penser de façon analytique plutôt qu’intuitive. Or, les croyances religieuses relèvent davantage du deuxième mode de pensée et résistent souvent mal à l’analyse rationnelle.

La troisième explication est plus complexe. Les auteurs croient que la religion joue plusieurs fonctions importantes chez l’être humain, mais dont les gens intelligents peuvent se passer. Elle aide à percevoir le monde comme étant ordonné et prévisible et crée un sentiment de sécurité. Elle incite aussi au contrôle et au dépassement de soi.

« Ces fonctions sont aussi conférées par l’intelligence. Par conséquent, il est possible que les gens intelligents aient moins besoin des croyances et des pratiques religieuses », expliquent les chercheurs.

Pluie de commentaires

Miron Zuckerman, Jordan Silberman et Judith Hall se sont assurés qu’aucune variable comme l’âge, le sexe ou l’éducation des sujets ne pouvaient expliquer la corrélation.

Sans pouvoir démontrer de lien de cause à effet, ils soupçonnent que le niveau d’intelligence influence les choix religieux. L’hypothèse contraire – que la religion rende moins intelligent – est écartée, sauf pour les cas extrêmes de fondamentalisme religieux.

M. Zuckerman dit être inondé de commentaires depuis la publication de l’article, dont la plupart sont positifs. Quant à savoir si le chercheur est lui-même religieux, le mystère plane.

« Cette question ne me semble pas pertinente et je préfèrerais ne pas y répondre », a dit M. Zuckerman.

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Des nuances à apporter

– L’étude ne considère que l’intelligence analytique, définie comme « la capacité de raisonner, de planifier, de résoudre des problèmes, de penser de façon abstraite, de comprendre des idées complexes, d’apprendre rapidement et d’apprendre par l’expérience ». Elle exclut complètement l’intelligence créative et l’intelligence émotionnelle.

– Les données analysées proviennent de pays comme les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni. De façon stricte, les résultats ne s’appliquent donc qu’aux sociétés occidentales. « Il n’y a rien de spécifiquement culturel dans les arguments présentés, et je m’attendrais à ce que les conclusions s’appliquent aux autres cultures », a toutefois dit à La Presse Miron Zuckerman.

— Philippe Mercure, La Presse

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