L’ARRIÈRE-BOUTIQUE

Au-delà
du patchwork

Si elle n’était pas designer, Gabrielle Tousignant serait probablement cuisinière, nous dit-elle. Elle récupérerait les bouts
de pâte, comme elle réutilise les bouts
de tissu, pour créer astucieusement en limitant les pertes. Cette façon de gérer
en bonne ménagère serait-elle le secret
de Kollontaï ? Chose certaine, les créations de la marque québécoise font l’effet de petits pains chauds !

La créatrice à l’origine de Kollontaï nous accueille d’une poignée de main franche avant de nous inviter à la suivre à travers les dédales de son atelier. Dans les locaux bourdonnants d’activité, une grande équipe pour une entreprise de mode québécoise, s’affaire à produire des pièces au style reconnaissable entre tous avec leurs mélanges de tissus et leurs garnitures féminines.

Une seule collection de Kollontaï peut comprendre 85 styles de vêtements distincts fabriqués en différentes couleurs, et trois collections se chevauchent systématiquement à des stades de production différents dans les locaux de la rue Parthenais. De l’idéation à la mise en marché, en passant, évidemment, par la fabrication, tout est assuré par l’entreprise, ce qui permet un contrôle complet sur la qualité du produit.

Il y a six ans, Kollontaï ne comptait encore que quatre employés. Ils sont aujourd’hui plus de 25. « J’ai commencé à déléguer à mesure que l’offre grandissait. Chaque personne a donné plus de force au moteur. Il y a toujours une nouvelle personne qui fait grandir l’entreprise et qui l’enrichit de sa touche et de ses connaissances », raconte la créatrice et femme d’affaires de 38 ans.

UN « BRICOLAGE » QUI PLAÎT

Gabrielle ne s’était pas imaginé gérer un jour autant de personnel, mais il lui est apparu très tôt qu’elle travaillerait dans le textile. « J’ai toujours su ce que je voulais faire. Ma grand-mère me sortait sa machine à coudre quand je voulais bricoler des vêtements », raconte celle qui, adolescente, cousait déjà ses tenues.

Des études en mode à Québec lui permettront de passer de bricoleuse à créatrice, quoiqu’elle ait toujours le bricolage en elle, considère-t-elle. Elle ne tardera pas à démarrer son entreprise ensuite. En 1998, dans son salon, Kollontaï prend forme.

Le patchwork, qui fait sa marque de commerce, arrive par hasard alors qu’elle cherche à rentabiliser ses chutes de tissu. La marque de vêtement trouve sa niche : le style est accueilli avec enthousiasme par une cliente que la designer décrit comme une femme active. « Le côté architectural répond aux formes des femmes et les met en valeur. Finalement, nos vêtements montrent ce qu’on veut montrer et cachent ce qu’on souhaite cacher ! », résume la designer pour qui le facteur confort est une priorité.

AVANCER PRUDEMMENT,
MAIS SÛREMENT

Aujourd’hui, le patchwork est toujours la marque de commerce de Kollontaï, mais l’objectif est d’amener graduellement les clientes ailleurs. « On n’en peut plus de la tunique en patchwork, mais c’est encore elle qui nous fait vivre ! Dans les dernières collections, on propose moins de mélanges de tissus et on donne de plus en plus dans la garniture comme les effets de dentelle et les appliqués de rubans ».

Doucement, la marque explore aussi d’autres voies en proposant notamment une collection de lingerie prêt-à-porter comprenant des camisoles, des shorts et des nuisettes. Une suite toute naturelle pour la marque qui puise son inspiration dans la lingerie depuis toujours.

À l'avenir, de nouveaux points de vente à l’international s’ajouteront aussi aux quelque 150 boutiques qui accueillent la marque au Canada. Question de survie. « L’univers du textile a beaucoup changé depuis 2005. Il y a moins de matières disponibles ici. Tout le monde se retrouve avec les mêmes tissus. Mais on ne peut pas se permettre ça. L’exclusivité est très importante ! On fait donc affaire avec des fournisseurs internationaux qui nous approvisionnent en trop grande quantité et on se retrouve avec de la matière inutilisée. Pour rentabiliser nos achats, il faut produire davantage et élargir notre marché », explique Jean-Philippe Côté qui dirige entre autres les ventes.

Kollontaï est déjà présente aux États-Unis où ses vêtements se trouvent dans près de 50 boutiques. D’ici deux ans, la marque devrait également se retrouver en Allemagne.

« À mes débuts, je voulais simplement faire ce que j’aimais, comme je le voulais. Je n’avais pas de plans précis. Plus ça va, plus j’en ai, par contre ! », lance la femme d’affaires qui ne perd pas de vue que la création est son moteur. « C’est la raison pour laquelle j'ai mon entreprise. Bien sûr, il y a une partie de gestion dans mon travail, mais j’ai plein de bras droits pour m’épauler ! » Et en bonne « ménagère », elle garde, à n’en pas douter, un œil sur son bas de laine !

L’ARRIÈRE-BOUTIQUE

En quelques mots…

Nom : Gabrielle Tousignant

Profession : Designer et femme d’affaires

Lieu de naissance : Victoriaville

La marque en trois mots :
féminité, confort et qualité.

Déformation professionnelle :
Je prends les transports en commun
et je ne peux pas m’empêcher de regarder les autres passagers pour voir
si leurs vêtements tombent bien. J’aimerais être capable d’arrêter!

Si je n’étais pas designer…
Je serais cuisinière. Mais j’aurais
sûrement une entreprise de cuisine!

Plaisir coupable : le vin et la crème
brûlée ou m’anéantir le cerveau avec
des petits jeux de téléphone.

Points de vente : sur www.kollontai.net

L’ARRIÈRE-BOUTIQUE

Inspiration féministe

Le nom Kollontaï est un hommage à Alexandra Kollontaï,
la première femme à être nommée au sein d’un gouvernement et celle qui est à l’origine de la Journée internationale de la femme. Un exemple fort de femme qui prend sa place. « Elle évoque pour moi la détermination et la liberté de pensée que je cherche à mettre en pratique dans ma vie de tous les jours », dit Gabrielle.

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Ses créations

Tunique Adèle (155 $) et pantalon court Karina (75 $).

Robe Mojito (198 $).

Robe Ginni (195 $).

Jupe Adriana (140 $) et t-shirt Santorini (118 $).

Robe Ingrid (158 $) et boléro Stéphany (110 $).

Nuisette Agata (XX $).

Robe Yoko (135 $).

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