Santé mentale
Traiter le TDMP
La Presse
Les médecins ne s’entendent pas sur la meilleure façon de traiter le trouble dysphorique prémenstruel. Antidépresseurs ou hormonothérapie ? Les avis varient.
« Il n’y a pas de solution miraculeuse, observe la D Michèle Moreau, omnipraticienne spécialisée dans la santé des femmes. Il y a quasiment autant de traitements que de symptômes. » La première approche qu’elle préconise est une approche conservatrice. Elle tente d’abord de rassurer les femmes et de leur donner des conseils sur leur mode de vie : éviter les situations stressantes, consommer moins de sel pour diminuer la rétention d’eau et surtout, faire de l’activité physique à raison de 30 minutes par jour. « L’activité physique est l’approche conservatrice non médicamenteuse qui s’est avérée la plus efficace », note-t-elle.
Le D Richard Bergeron de la Clinique du SPM de Hull conseille lui aussi à ses patientes de réaménager leur horaire de façon à évacuer les sources de stress potentielles. « J’ai une patiente qui est avocate et en période prémenstruelle, elle s’arrange pour ne pas aller à la cour, pour ne pas avoir trop d’imprévus ou de stress dans sa vie, dit-il. Mais pour la plupart des femmes, ce n’est pas aussi simple que ça. »
Pour certaines femmes, l’approche conservatrice ne suffit pas. C’est souvent à ce moment-là que le médecin sort son calepin d’ordonnances. « J’ai vu une femme qui était suicidaire dans sa phase prémenstruelle, raconte la D Michèle Moreau. Aussitôt que ses règles se déclenchaient, tout reprenait son rythme normal. C’était risqué pour elle-même. »
Le D Richard Bergeron commence par prescrire un contraceptif oral à ses patientes. « Ce sont des traitements qui sont plus socialement acceptés. Mais, ce n’est pas n’importe qui qui va répondre aux contraceptifs oraux. Le plus efficace, c’est vraiment les antidépresseurs. Pas tous, mais certains sont remarquablement efficaces. »
Les antidépresseurs sont pris en continu, à faibles doses. « Ça ne veut pas dire qu’elles vont le prendre toute leur vie, précise D Moreau, préoccupée par le développement possible d’une dépendance aux antidépresseurs. On fait des périodes d’arrêt pour voir si elles en ont encore besoin. Si oui, on recommence. »
La prise de progestérone est un autre traitement utilisé pour traiter le trouble dysphorique prémenstruel, bien qu’aucune étude ne relie celui-ci à un déficit en progestérone. La D Sylvie Demers, qui milite pour l’hormonothérapie, prescrit à ses patientes de la progestérone bioidentique pour traiter les symptômes du TDPM. Elle permet selon elle de rétablir un déficit en progestérone souvent observée chez les femmes fortement incommodées par le syndrome prémenstruel. « Ça fonctionne chez beaucoup de femmes qui avaient été diagnostiquées trouble dysphorique prémenstruel, assure-t-elle. Ça me choque, parce qu’on banalise ça. Il y a selon moi très peu de femmes qui méritent ce diagnostic. »
Les hormones bioidentiques ne sont toutefois pas couvertes par le régime d’assurance-médicaments de la Régie de l’assurance maladie du Québec.
Leur effet est également controversé. « Les études avec la progestérone n’ont pas donné d’effets supérieurs à l’effet placebo, note D Michèle Moreau. Même chose pour la vitamine B6 et l’huile d’onagre, un produit naturel. »
Un article publié en 2009 dans le indiquait pour sa part que les thérapies hormonales qui semblent fonctionner pour le TDPM agissent non pas en corrigeant les anormalités hormonales, mais en interrompant une signalisation aberrante dans l’axe qui relie le cerveau et les ovaires et régule le cycle de reproduction.
Certaines femmes atteintes d’un trouble dysphorique prémenstruel se tournent vers l’acupuncture, l’ostéopathie et même le yoga hormonal.
Souffrant elle-même d’un important SPM, Caroline Chantefort a découvert le yoga hormonal il y a quelques années. Affiliée à la Clinique d’ostéopathie Camirand Muzzi, elle donne des formations de deux jours aux femmes aux prises avec un SPM sévère. « C’est un ensemble d’exercices de posture, de respiration et de circulation de l’énergie, entre autres antistress, qui permettent de redonner un équilibre à son système hormonal, explique-t-elle. Non seulement ça tonifie le corps physiquement, mais ça joue aussi sur le psychologique. » Elle précise que le yoga hormonal est complémentaire à l’approche médicamenteuse qui peut demeurer nécessaire dans certains cas.