Fécondation in vitro

Les Québécoises plus âgées que les autres Canadiennes

Au Québec, plus du quart des femmes ayant recours à la fécondation in vitro sont âgées de plus de 40 ans. C’est le taux le plus élevé au pays. Or, seule une minorité d’entre elles réussiront toutefois à devenir enceintes.

En 2012, 26 % des femmes qui ont eu un traitement de FIV au Québec étaient âgées de plus de 40 ans, contre 21 % dans le reste du Canada, indiquent les plus récentes statistiques qui seront dévoilées devant la Société canadienne de fertilité et d’andrologie demain et que La Presse a obtenues.

« C’est une particularité que l’on voit depuis le début du programme [mis en place par Québec], mais qui s’accentue encore », note le président de la Société, le Dr François Bissonnette.

Or, les chances d’avoir un enfant diminuent de manière marquée avec l’âge. À 42 ans, une femme a à peine 5 % de fécondité résiduelle par rapport à ce qu’elle avait à 25 ans, souligne le Dr Bissonnette. « C’est la nature, il y a une date de péremption sur les ovaires. »

Il n’est donc pas étonnant que le Québec compte aussi beaucoup plus de femmes qui en sont à leur deuxième ou troisième essai de fécondation in vitro par rapport au reste du Canada, ajoute-t-il.

Dans la communauté médicale, bien des médecins se demandent si l’État doit continuer de payer la procréation médicalement assistée pour toutes les femmes, quelles que soient les chances de succès.

Qu’il s’agisse de l’âge ou d’affections médicales, le taux de réussite devrait faire partie des facteurs à considérer, croit la Dre Louise Duperron, chef du département de gynécologie-obstétrique au CHU Sainte-Justine.

« Il ne faut pas laisser miroiter aux gens qu’ils vont avoir une grossesse quand on sait que ça ne va pas fonctionner. C’est de l’argent des contribuables qui est dépensé pour rien », dit-elle.

Sa collègue Annie Janvier, néonatalogiste et clinicienne chercheuse au CHU Sainte-Justine, partage cet avis. « Le fait de ne pas avoir de balises fait en sorte que le coût du programme a augmenté et le pourcentage de réussite n’est pas calculé. Pourtant, on fait toujours cela en médecine », dit la Dre Janvier.

La plupart des cliniques ont fixé l’âge limite pour la FIV à 43 ans, sauf le Centre de reproduction de Montréal, qui accepte des femmes plus âgées.

Le directeur médical du centre, le Dr Seang LinTan s’explique mal pourquoi les femmes seraient discriminées en fonction de l’âge. « Les femmes ont maintenant leurs enfants plus tard », dit-il, précisant tout de même que sa clinique n’accepte pas « toutes » les patientes.

Les femmes qui tentent de devenir enceintes après l’âge de 40 ans et qui n’y parviennent pas vivent une succession de deuils et beaucoup de détresse. Le risque de fausse couche est beaucoup plus élevé. Le risque de complications aussi.

« Quand on voit les femmes qui sont passées par les cliniques de fertilité, on voit les heureuses élues pour qui ça s’est bien passé et qui ont eu un bébé à terme. Il y a les moins chanceuses qui ont eu des complications et il y a les “pas chanceuses” pour qui rien n’a marché et qui sont toutes croches pendant un long bout parce que c’est très lourd », décrit ainsi la Dre Diane Francœur, vice-présidente de la Fédération des médecins spécialistes du Québec et gynécologue-obstétricienne au CHU Sainte-Justine.

Les femmes – et les couples – vont devoir composer avec une succession de deuils, explique la psychologue clinicienne Susan Bermingham, qui travaille avec de nombreux couples infertiles dans les cliniques et qui a écrit un livre sur la question.

« On travaille beaucoup sur le fait d’être réaliste par rapport aux chances de succès. Dans bien des cas, ça ne marchera pas », explique-t-elle.

Elle parle aussi des risques de complications. Mais à ce stade, la procréation médicalement assistée apparaît comme la dernière chance et les femmes n’écoutent pas toujours.

« Tout ce qu’elles veulent, c’est un test de grossesse positif », dit Mme Bermingham. « Le reste, elles vont s’en occuper quand elles seront rendues là. »

Coût du programme de procréation médicalement assistée

Années Nombre de cycles de FIV Coût

2010  :  3 468 (à partir du 5 août) 27,1 millions

2011  :  7 319 62,9 millions

2012  :  8 045 59,8 millions

Moins du tiers des FIV sont réalisées dans le réseau public

* Source : ministère de la Santé et des Services sociaux

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