Opinion : Éducation supérieure

Les universités montréalaises à l’ère de Trump et du Brexit

Les loyalistes britanniques durant la révolution américaine. Les esclaves noirs à l’époque du chemin de fer clandestin. Les objecteurs de conscience au cours de la guerre du Viêtnam.

Aujourd’hui, le discours anti-immigration de Trump et l’interdiction qui en découle suscitent de vives inquiétudes partout dans le monde et sèment la confusion dans les établissements américains qui traitent avec des détenteurs de visa. Et pendant ce temps, le Royaume-Uni de l’après-Brexit a ramené de 300 000 à 170 000 le nombre d’immigrants qu’il compte accueillir chaque année.

Les universitaires de talent et les travailleurs du savoir qui cherchent à s’instruire et à s’établir dans un pays tolérant et progressiste se retrouvent par conséquent à court d’options.

Or, nous savons que le Canada – et Montréal en particulier – constitue une destination attrayante pour les étudiants. Le très respecté sondage QS Best Student Cities l’a d’ailleurs confirmé en nommant Montréal meilleure ville du monde pour les étudiants. La métropole a ainsi détrôné Paris de la position que celle-ci occupait depuis cinq ans, tandis que Boston, plus importante ville universitaire américaine, arrivait huitième au classement.

Le Canada a la cote

La cote du Canada ne cesse donc de grimper. Les immigrants-étudiants potentiels savent que dans la méritocratie intellectuelle qui caractérise notre monde, l’isolationnisme compromettra la capacité des universités américaines et britanniques à collaborer, à obtenir du financement et à recruter les candidats les plus prometteurs.

Face aux tendances actuelles, nous avons à la fois la responsabilité de préserver l’ouverture d’esprit qui sous-tend le progrès social aux quatre coins du monde et l’occasion de former une nouvelle génération de Canadiens forte et compétitive.

L’intérêt est déjà considérable. Avant les élections américaines, la firme de recrutement Intead a noté que 59,5 % des étudiants interrogés dans 118 pays seraient moins susceptibles d’étudier aux États-Unis si Trump l’emportait (comparativement à 3,8 % pour Clinton). Le 9 novembre dernier, les recherches dans Google pour les mots « college Canada » depuis les États-Unis ont plus que doublé.

En outre, d’après une enquête récente de Redbrick Research, 64 % des étudiants internationaux au Royaume-Uni pensent que le Brexit a fait de ce pays un endroit moins attrayant où étudier. Et cette année, chez les étudiants de l’Union européenne, le Canada a remplacé le Royaume-Uni comme meilleure destination d’études.

Nombre d’universités canadiennes rapportent déjà une hausse des demandes d’admission ne pouvant s’expliquer par les seuls efforts de recrutement. À Concordia, le nombre de candidats du 1er cycle issus d’établissements américains a ainsi augmenté de 45 %, tout comme les demandes d’étudiants des cycles supérieurs. Les demandes en provenance du Mexique ont également fait un bond.

L’attrait des universités canadiennes n’a rien de mystérieux. Nos établissements font en effet bonne figure dans les classements internationaux. Nous présentons par ailleurs le coût de la vie le plus bas et la qualité de vie la plus haute parmi les pays du G7.

Le palmarès de QS vient renforcer cet attrait, puisqu’il tient compte de facteurs tels que les autres classements universitaires, la qualité de vie, la mondialisation, la sécurité, l’abordabilité, le marché de l’emploi, la tolérance, l’inclusion ainsi que l’offre sociale et culturelle des villes.

Mais les raisons de rester sont encore plus évidentes.

Mobilité sociale

Les immigrants recherchent la mobilité sociale. Or, le Canada arrivait deuxième dans le classement exhaustif du Social Progress Index en 2016, loin devant les États-Unis et le Royaume-Uni. Nous étions en outre premiers pour ce qui est des opportunités (l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis occupaient respectivement les deuxième, sixième et treizième rangs). Et selon un récent sondage de l’Environics Institute, quelque 80 % des Canadiens pensent que les immigrants contribuent positivement à l’économie.

Les immigrants recherchent aussi la diversité, la tolérance et de bonnes chances de réussite. Or, un visa étudiant est l’un des moyens les plus faciles d’accéder à la citoyenneté canadienne.

Mais même avec tous les avantages qu’offre le Canada, la concurrence se révèle féroce entre les pays souhaitant profiter de ce moment historique pour recruter une équipe de talent.

Nous avons un bassin de candidats très attentifs, et nous devons nouer directement le dialogue avec eux. Alors que les frontières se ferment, de brillants esprits partout sur la planète se cherchent un avenir sur leur écran d’ordinateur.

Allons à leur rencontre avec de vastes campagnes ciblant le web et les médias sociaux. Fournissons à ces personnes avides de connaissances une formation linguistique professionnelle, des cours d’immersion culturelle, des contacts avec leurs compatriotes, des équivalences d’agrément et des mesures concrètes afin d’assurer leur réussite. Et, surtout, faisons en sorte que leur expérience se passe bien, car si les procédures d’immigration accélérée se sont améliorées, il reste encore beaucoup à faire pour développer notre compétitivité à l’échelle mondiale.

Les universités seraient ravies d’aider nos gouvernements à tous ces égards, mais nous devons agir maintenant. La manière dont nous façonnons l’image de marque du Canada en vue de saisir cette occasion historique pourrait en effet déterminer notre destin pour des générations à venir.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.