Violence conjugale et familiale

RESPONSABILISATION

Lors de l’ouverture des premières ressources pour les hommes, au début des années 80, les groupes de défense des femmes étaient méfiants. La crainte principale était que la responsabilisation des hommes ne soit pas au cœur de l’intervention. À l’interne, on s’inquiétait aussi (et on s’inquiète encore, parfois) de voir des hommes utiliser la thérapie comme un moyen de manipuler leur conjointe, en lui faisant croire que leur groupe de thérapie cautionne certains de leurs gestes violents, par exemple. « Il faut prendre acte que les femmes espèrent que la thérapie va être une solution », note Louise Riendeau, qui doit parfois tempérer les attentes des conjointes.

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MÉFIANCE

Dans les maisons d’hébergement pour femmes, on souligne que l'achèvement d’une thérapie n’équivaut pas à une « guérison ». « On ne détricote pas toute une vie en une vingtaine de semaines », estime Louise Riendeau, coordonnatrice au Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale. « Moi, j’ai vu ça une fois, une thérapie qui avait fonctionné », ajoute la présidente du même organisme, Sylvie Langlais. À l’inverse, elle dit ne plus compter les échecs. « Certains abandonnent, ou disent qu’ils vont y aller, mais ne le font pas. » Mais les deux femmes ne s’opposent pas aux thérapies pour les hommes. « On est capables de voir que, de manière générale, c’est plus sécuritaire si monsieur progresse avec un groupe que s’il est tout seul », reconnaît Mme Riendeau.

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DÉCROCHAGE

Le « décrochage » en cours de thérapie est pris très au sérieux chez Option, car les hommes les moins motivés à suivre une thérapie sont les plus à risque de passer à l’acte, croient les intervenants. « Souvent, la perte [de clients] est expliquée par le fait que ce sont des hommes, qu’ils consultent moins, qu’ils sont sous-représentés dans l’appel d’aide. On est dans les règles de la masculinité, où les hommes ne disent pas ce qu’ils vivent, préfèrent envoyer l’image qu’ils sont en contrôle », analyse François Lepage. Pour les intervenants d’Option, le seul fait qu’un homme s’implique dans une démarche de thérapie constitue une victoire en soi. En 30 ans de pratique, aucun client d’Option n’a assassiné sa femme ou ses enfants. « Mais on a eu quelques clients qui se sont suicidés, admet Clément Guèvremont. Comme quoi ce n’est pas parfait. »

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RÉCIDIVE

La moitié (51 %) des hommes ne récidivent pas dans la violence physique après quatre ans de thérapie, révèle l’unique étude longitudinale menée sur le sujet, aux États-Unis*. La recherche note cependant qu’il est possible que les hommes « remplacent » la violence physique par la violence psychologique. Un constat partagé par les intervenants auprès des victimes de violence. Chez Option, on se félicite de constater que 70 % des hommes qui commencent une thérapie assistent aux 21 rencontres minimales exigées.

« Mais entre le premier contact et la fin des 21 rencontres, 40 à 50 % des gens ne poursuivent pas », déplore le travailleur social François Lepage, dont l’organisme reçoit chaque année environ 500 appels d’hommes qui sollicitent ses services ou sont contraints de le faire par des amis, la famille ou la Cour.

* Edward W. Gondolf, Evaluating batterer counseling programs : A difficult task showing some effects and implications

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Une thérapie contestée

Efficaces, les thérapies de groupe pour hommes violents ? Seuls quelques chiffres offrent un aperçu de leurs effets, mais la méfiance des groupes de femmes demeure grande.

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