ACTIVITÉ PHYSIQUE ET ALIMENTATION

Du plaisir de manger et de bouger 

Stéphanie Côté, nutritionniste chez Extenso, le centre de référence en nutrition de l’Université de Montréal, répond à nos questions.

Quelle est l’erreur le plus souvent commise par les sportifs en matière d’alimentation ?

Il y en a plusieurs, des petites et des plus grosses. L’une d’elles est de sous-estimer l’importance de l’eau ou des aliments pendant qu’on fait de l’exercice. On a l’impression que si on va courir juste une heure, on n’a pas besoin d’apporter d’eau, ou que si on va faire du vélo pendant deux heures, on n’a pas besoin de manger… C’est une erreur fréquente, surtout quand la séance d’exercice dure plus d’une heure ; notre corps a besoin d’énergie rapidement disponible. […] Une autre erreur, moins fréquente, mais à ne jamais commettre : faire des essais alimentaires quand on a des événements importants, comme une course ou une compétition. Il faut y aller avec des aliments familiers.

Et dans l’alimentation de tous les jours, quelles erreurs commet-on ?

La tentation de suivre des régimes ou des modes alimentaires. Je pense entre autres au régime sans gluten ou à l’alimentation de type paléo. On exclut parfois certains groupes d’aliments en pensant que ça va améliorer la santé ou la performance, mais ces modes d’alimentation ne sont peut-être pas parfaitement adaptés à chaque personne. Ce n’est pas parce qu’un autre athlète parle de son alimentation que ça va systématiquement convenir à tout le monde. Une autre erreur, c’est d’être trop exigeant envers soi-même et l’alimentation, et de mettre de côté le plaisir de manger.

En quoi l’alimentation des sportifs récréatifs, qui font par exemple trois ou quatre joggings par semaine, doit-elle différer de l’alimentation des personnes sédentaires ?

Elle diffère en termes de timing et de quantité. Quand on s’entraîne, on doit porter attention au moment où l’on doit manger pour avoir de l’énergie, mais sans être encombré par un estomac alourdi. Dans notre assiette, on retrouve la même chose : un sportif va manger les mêmes aliments qu’un non-sportif. On a tous besoin de fruits, de légumes, de céréales, de poisson, etc.

Dans votre livre, vous écrivez qu’on a parfois tendance à surestimer l’énergie qu’on dépense pendant l’exercice et à manger au-delà de nos besoins. Est-ce pour autant nécessaire de calculer notre dépense énergétique liée aux activités sportives ?

Dans le livre, on donne une idée des dépenses énergétiques, mais on n’a pas voulu embarquer dans les calculs, parce que ça enlève un peu – beaucoup, même ! – le plaisir de pratiquer une activité physique et de manger. On ne voulait pas centrer l’activité physique sur une dépense calorique. Notre vision est tout autre : le sport, c’est un passe-temps, une activité, un plaisir. On croit beaucoup à la gestion de l’alimentation en fonction des besoins de notre corps : manger quand on a faim et arrêter de manger quand on n’a plus faim. […] Il est vrai que, parfois, on peut surestimer la dépense énergétique et penser que, si on fait une marche de 45 minutes, on peut finir ça par un Blizzard aux biscuits Oréo chez Dairy Queen. Bouger ne donne pas carte blanche en termes de qualité de l’alimentation.

Est-ce que le sportif doit exclure la restauration-minute et les autres gâteries de son alimentation ?

Non, non, non. Les interdits alimentaires ne font qu’entretenir un attrait pour les aliments qu’on bannit ou qu’on évite. Ce n’est pas bien non plus d’en faire des aliments récompense, ce qui leur donne encore plus d’importance. C’est encore une question de timing : oui, c’est correct d’aller manger un hamburger et des frites de temps en temps, mais peut-être pas la veille d’une course. Par ailleurs, le plaisir de manger passe aussi par des aliments de base. La santé et le plaisir vont de pair et c’est ce qu’on essaie de montrer avec nos recettes.

Les barres ou les boules d’énergie (vous proposez une recette dans votre livre) sont-elles essentielles dans l’alimentation d’un sportif ?

Tout aliment peut être remplacé par un autre qui comblera le même besoin. Si on mange une boule d’énergie pour avoir de l’énergie rapidement et éviter de tomber en panne d’énergie, les sucres pourraient aussi venir de fruits ou de galettes de riz, mais l’objectif des aliments pour sportifs est d’augmenter le côté pratique. Quand on veut rapidement ingérer 15 ou 30 g de glucides, prendre un jujube est plus rapide que de croquer dans une pomme.

Nutrition sportive – 21 jours de menus

Stéphanie Côté et Philippe Grand

Éditions Modus Vivendi

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