Football  NFL

La nouvelle vie de Laurent Duvernay-Tardif

KANSAS CITY — Accorder une entrevue à un média « international », c’est une chose. Parler en français, c’est le comble pour les coéquipiers de Laurent Duvernay-Tardif. Lorsque le joueur québécois a aperçu un duo de journalistes devant son casier dans le vestiaire des Chiefs de Kansas City, il a aussitôt su qu’il se ferait taquine par ses coéquipiers et qu’il devrait probablement payer une amende.

C’est que l’unité offensive des Chiefs, comme dans d’autres équipes de la NFL, respecte un code de règles non écrites que seuls les joueurs semblent vraiment comprendre. Une blague d’une recrue est ennuyante : amende. Un autre a oublié le café qu’il devait apporter au petit-déjeuner : amende. Un joueur de la ligne offensive attire l’attention des médias : amende. Tout l’argent amassé durant la saison est remis à un organisme qui vient en aide aux personnes trisomiques.

C’est donc un peu gêné par les moqueries amicales de ses coéquipiers que le Québécois s’est entretenu avec La Presse. Aussitôt sa dernière réponse formulée, il nous a fait une offre à la fois surprenante et difficile à refuser.

Laurent Duvernay-Tardif nous a proposé de sauter dans son vieux Jeep, un CJ8 1981, pour faire un tour de sa ville d’accueil.

« I LIKE YOUR CAR »

À presque chaque feu rouge, l’ancien porte-couleurs des Redmen de McGill se fait saluer non pas parce qu’il est un joueur de la NFL, mais parce que sa voiture sans portières ni toit attire l’attention.

« Quand je suis arrivé, je voyais tous ces gens qui se promènent en grosse voiture, en VUS. Je voulais être à la hauteur, mais je ne pouvais pas concevoir l’idée de dépenser une fortune pour un véhicule. Un jour, en marchant, j’ai vu un Jeep usagé comme le mien stationné en bordure de la rue et j’ai su que c’est ce que je voulais. »

Celui qui se fait appeler Larry (plus facile à prononcer que Laurent) roule au centre-ville. Il nous pointe les musées, le quartier des artistes et nous montre l’amphithéâtre qui pourrait éventuellement accueillir une équipe de la Ligue nationale de hockey.

Duvernay-Tardif trouve qu’il y a beaucoup à voir et à faire ici, pour une ville de 465 000 habitants. 

« J’ai été surpris en arrivant à Kansas City, car c’est une ville du Midwest et j’avais quelques préjugés. Outre le barbecue, je me suis rendu compte qu’il y a une belle scène culturelle et qu’il y a vraiment moyen de s’épanouir ici. »

— Laurent Duvernay-Tardif

Dans quelques mois, il terminera ses études en médecine. Il hésite encore à savoir s’il se spécialisera pour devenir urgentologue ou orthopédiste. Mais en attendant, il consacre toutes ses énergies à son rôle de bloqueur tout en s'accordant quelques répits d’études et de football pour lire des romans, échanger des balles de tennis et suivre des cours de guitare.

PARMI LES GRANDS

L’une des questions que Duvernay-Tardif se fait le plus souvent poser concerne son passage de la Ligue de football universitaire du Québec à la NFL. À tout coup, le costaud numéro 76 répond que les matchs devant 80 000 partisans sont « incroyables », « formidables », « électrisants ».

À force de discuter, il reconnaît que les matchs sont aussi plus difficiles, plus douloureux. « Ça fait mal. J’ai joué mon match lundi [contre les Packers de Green Bay] et quatre jours plus tard, j’ai encore de la difficulté à fermer mes mains parce que mes petites jointures sont trop douloureuses. »

Malgré cela, Duvernay-Tardif reconnaît sa chance et il veut faire partie de l’alignement partant. Il espère fortement un retour au jeu demain, contre les Bears de Chicago après une absence, dimanche dernier, contre les Bengals de Cincinnati.

Le jeune homme de 23 ans veut jouer, mais peut-être pas à tout prix. Si un jour son corps lui envoie des signaux de fatigue, il admet qu'il réfléchira à son avenir dans la NFL.

Mais d’ici là, rien ne va l’empêcher de savourer chaque moment dans la grande ligue.

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