Opinion

Aide de dernier recourS
Pour moins d’obstacles et plus de dignité

La lettre s’adresse au premier ministre du Québec, François Legault.

Le 2 octobre, vous vous êtes engagé à corriger une flagrante injustice ayant touché 40 000 citoyens l’an dernier, citoyens en situation de vulnérabilité, car ils sont prestataires de l’aide financière de dernier recours.

En tant que président d’un regroupement d’organismes voué à la promotion et à la défense des droits en santé mentale et citoyen vivant avec une contrainte sévère à l’emploi, je suis très sensible à ce que cette injustice soit réparée dans les meilleurs délais. En ce sens, il serait indécent d’attendre au printemps. La mise à jour économique et financière prévue le 7 novembre me semble une date butoir plus respectable.

Il est primordial que le ministère des Finances, le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale ainsi que l’Agence du revenu du Québec mettent en place un mécanisme de versement automatique pour que la totalité des prestataires d’aide financière de dernier recours aient accès au remboursement auquel ils ont droit.

C’est d’ailleurs ce que recommande la protectrice du citoyen tout en valorisant l’adéquation d’une telle mesure avec l’atteinte des objectifs de lutte contre la pauvreté du Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion économique et la participation sociale. Alors s’il vous plaît, un peu de cohérence.

Par ailleurs, laissez-moi ajouter que les hésitations gouvernementales passées à mettre en place un système de versement automatique sont à mes yeux incompréhensibles et une atteinte à la dignité des personnes concernées.

Incompréhensibles, car jusqu’en 2011, le remboursement du crédit d’impôt pour la TVQ était intégré à même les prestations d’aide de dernier recours. Ainsi, l’État possède déjà un savoir-faire à l’égard d’une méthode juste et équitable de versement.

Une atteinte à la dignité

« L’exigence de produire une déclaration fiscale ne va pas sans peine pour une bonne part de la clientèle visée, soit les personnes parmi les plus vulnérables de la société », peut-on lire dans le dernier rapport d’activités du Protecteur du citoyen.

Il s’agit d’un fait connu et, malgré tout, on s’entête à appliquer une froide bureaucratie sans égard aux difficultés vécues par les personnes. Elles ont droit à une mesure de dernier recours en raison de leur santé, de leur âge, de leur condition sociale et économique, de leur grand isolement, et on trouve le moyen d’ajouter l’insulte à l’injure en les privant des sommes auxquelles elles ont droit.

Avec justesse, Stéphanie Grammond (La Presse, 29 septembre) fait valoir que cela touche les personnes « les plus défavorisées de la société, [des] citoyens qui peuvent avoir énormément de mal à comprendre des documents fiscaux. Ces contribuables s’imaginent qu’ils n’ont pas à faire de déclaration, puisqu’ils n’ont pas d’impôts à payer de toute façon. Ils ne réalisent pas qu’ils se privent par le fait même de crédits très payants pour eux ».

S’il est vrai que des personnes bénéficiaires d’une prestation de dernier recours produisent une déclaration fiscale et demandent leur crédit d’impôt pour solidarité, il ne faudrait pas que cet état de fait touche les 40 000 autres qui ne l’ont pas touché en 2018 !

Monsieur le Premier Ministre, pour les raisons ci-haut mentionnées, prière de corriger cette injustice dès le 7 novembre et de réintégrer très rapidement le versement automatique.

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