OPINION CONFÉRENCE DE PARIS SUR LE CLIMAT

Des enjeux et des défis pour Montréal

Bien que le portrait puisse paraître sombre, il ne faut pas douter que des solutions existent

Jusqu’au 11 décembre, Paris sera l’hôte de la 21e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP21). Les leaders politiques devront s’entendre sur les mesures à prendre pour limiter l’augmentation de la température à 2°C, et ainsi, réduire les effets du réchauffement planétaire.

Pour Montréal, si rien n’est fait, les projections indiquent une augmentation de 2 à 4°C pour 2041-2070 et de 4 à 7°C pour la période 2071-2100.

Pour la métropole, les conséquences seraient importantes : il faudra repenser sérieusement la façon dont on construit les maisons, les ponts et les routes, notre développement socio-économique, la préservation de notre environnement naturel, et la manière dont les services municipaux sont livrés aux citoyens.

DES POINTS À RETENIR

Le visage des changements climatiques se révèle à partir de six aléas météorologiques.

1. Il y aura d’abord une augmentation des températures moyennes, ce qui veut dire qu’on assistera à un raccourcissement de la période hivernale, à l’intérieur de laquelle la période d’enneigement sera réduite de 15 à 35 jours, en contrepartie d’une augmentation du nombre de cycles de gel-dégel, qui entraînera une dégradation accélérée des routes, une abondance de nids-de-poule et la dépréciation des ponts, tunnels et viaducs.

On peut aussi anticiper une prolongation de la saison des allergies et de la saison d’ouverture des piscines, en plus de la difficulté de maintenir en bon état les patinoires extérieures.

2. Les épisodes de pluies abondantes seront plus nombreux, entraînant un plus grand potentiel d’inondations des sous-sols, des entraves importantes à la mobilité et des dommages aux ponceaux et au réseau routier.

3. Les vagues de chaleur sont à la hausse. Entre 1942 et 2014, on a enregistré une augmentation de 58 % du nombre de nuits avec un humidex supérieur à 30. Les canicules affectent particulièrement les aînés, génèrent une demande accrue pour les points d’eau, provoquent un stress hydrique chez les végétaux et un ralentissement des travaux extérieurs.

4. Entre 1942 et 2014, le nombre d’épisodes de pluie verglaçante a augmenté de 26 %. Il y a eu également plus de tempêtes de neige abondante (plus de 30 cm/jour) au cours des 15 dernières années que les 55 années précédentes.

Les tempêtes destructrices s’accompagnent de pannes d’électricité plus fréquentes ainsi que d’importants dommages causés aux arbres et aux infrastructures.

5. Les grandes sécheresses, qui ont connu une hausse de 14 % entre 1942 et 2014, provoquent des fissures dans les fondations et des problèmes de santé causés par les pollens.

6. Finalement, il faut parler de l’impact des crues hivernales et printanières, quand le débit ou le niveau d’une rivière dépasse un seuil critique. Or, le raccourcissement de la saison hivernale entraîne un dégel printanier plus hâtif, ce qui explique le décalage des crues printanières plus tôt dans l’année. Quant aux périodes de redoux qui favorisent le gel et le dégel, elles sont responsables de la formation d’embâcles qui provoquent des inondations.

Bien que ce portrait puisse paraître sombre, il ne faut pas douter que des solutions existent. Notre obsession doit être de lutter contre le réchauffement planétaire en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (GES).

Les nations sont engagées dans une course contre la montre ; mais ce n’est qu’avec l’appui des villes et de leurs citoyens qu’elles pourront parvenir à réaliser leurs engagements environnementaux.

Partout dans le monde, les villes trouvent et appliquent des solutions innovatrices au réchauffement planétaire.

C’est pourquoi Montréal et des centaines d’autres villes participeront aux discussions de la conférence de Paris. Montréal est bien positionné pour lutter efficacement contre les effets néfastes des changements climatiques avec ses objectifs de planter 300 000 arbres, d’électrifier les transports et d’investir massivement dans les transports collectifs.

Il me reste à souhaiter que chaque citoyen comprenne qu’il s’agit d’un défi collectif.

*responsable de l’environnement, du développement durable, des grands parcs et des espaces verts au comité exécutif de la Ville de Montréal

OPINION CONFÉRENCE DE PARIS SUR LE CLIMAT

Pour une économie urbaine et écologique

Nous devrons absolument faire preuve d’innovation sur les plans technologique et social

De tout temps, les centres urbains ont représenté cette force motrice qui propulse la culture de même que l’économie à l’échelle planétaire.

Aujourd’hui, ils doivent s’ériger en figures de proue afin de répondre au plus grand défi que n’ait jamais affronté l’humanité : les changements climatiques.

Montréal passe à l’action. En vue de remédier à d’éventuels dommages causés par des intempéries catastrophiques, la Ville vient de dévoiler un plan quinquennal visant à consolider ses infrastructures et à instaurer des mesures d’intervention en cas d’urgence.

En outre, Montréal étudie le meilleur moyen de tirer profit de l’expertise et du savoir-faire que détiennent gens d’affaires et universitaires dans les centres urbains, et ce, pour relever le défi que posent les changements climatiques.

Voilà l’important travail de réflexion qu’ont mené les intervenants au Sommet de Montréal sur l’innovation. Organisé par l’Université Concordia en collaboration avec le Quartier de l’innovation de Montréal et la chambre de commerce du Montréal métropolitain, ce colloque nous adresse un vibrant appel à l’action.

L’ESSOR DES VILLES

Selon une évaluation des Nations unies, le ratio de la population mondiale habitant dans les centres urbains augmentera jusqu’à atteindre 66 % en 2050. La hausse sera particulièrement marquée en Asie et en Afrique. Si cette prévision se confirme, dans 35 ans, il y aura 2,5 milliards de citadins de plus.

Une croissance aussi rapide implique que des phénomènes météorologiques extrêmes, provoqués par les changements climatiques, toucheront de plein fouet les résidants des villes – d’autant plus que ces derniers dépendent tout particulièrement des chaînes d’approvisionnement mondiales.

L’essentiel réside dans la transition vers une économie sobre en carbone. Pour la franchir avec succès, nous devrons absolument faire preuve d’innovation sur les plans technologique et social.

POLITIQUES

D’entrée de jeu, il faut que ces innovations confèrent aux villes un pouvoir réglementaire visant la réduction des émissions de carbone. Bien que des stratégies nationales soient essentielles, les centres urbains doivent disposer d’une telle compétence pour affronter leurs enjeux particuliers.

Les grandes agglomérations ne peuvent pas se permettre de continuer à gaspiller l’énergie au rythme où elles le font actuellement, et ce, même si leurs infrastructures vieillissent. Nous devons plutôt améliorer considérablement celles-ci et investir massivement dans les sources d’énergie renouvelable comme dans les programmes d’économie énergétique.

SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

Nous devons sécuriser davantage l’approvisionnement en vivres de nos villes. Bien souvent, les citadins sont tributaires de produits alimentaires fabriqués à des milliers de kilomètres de leur lieu de résidence. Ils doivent donc modifier leurs habitudes de consommation et privilégier dorénavant les denrées de production locale.

Ce principe, qui sous-entend la culture et la production collectives d’aliments en petites quantités, contribuerait à minimiser les perturbations que causerait le mauvais temps à la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Par ailleurs, il nous faut repenser la relation entre campagne et ville en matière d’agriculture. À ce sujet, l’établissement dans les centres urbains d’une activité agricole soutenue, durable, constitue certes l’une des voies à explorer. Ainsi, les Ghanéens pratiquent la culture irriguée de légumes dans leurs villes. De même, à Montréal, Les Fermes Lufa ont démontré le fort potentiel de rendement de l’agriculture sur toit.

TRANSPORT

Afin de réduire notre empreinte en carbone, nous devons repenser nos systèmes de transport urbain. La conception de villes axées sur la circulation automobile est dépassée ; cette vision date du siècle dernier. Il faut que les grandes agglomérations planifient, mettent en œuvre et financent des réseaux de transport public peu polluants, ainsi que des pistes cyclables et des voies piétonnières. D’ailleurs, Montréal a annoncé un ajout d’autobus électriques dès l’année prochaine.

Bonne nouvelle : des solutions innovantes se concrétisent déjà dans les centres urbains du monde entier et proposent d’intéressants modèles de développement. Par exemple, Hangzhou, en Chine, s’est inspiré de diverses villes avant-gardistes d’Europe et a repris la formule BIXI, de Montréal. Déployé tous azimuts, son réseau compte quelque 66 500 bicyclettes.

Comment s’assurer que de telles innovations soient adoptées à vaste échelle ? Tout repose sur la volonté politique.

Nos maires et nos leaders communautaires doivent produire de solides analyses sur la rentabilité d’investissements du genre. Ainsi, petites entreprises et grandes sociétés pourront prospérer dans une économie urbaine et écologique.

*directeur général du programme Terre d’avenir (Future Earth)

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