ARTS VISUELS PATRICK DECOSTE ET KEITA MORIMOTO
Deux natures, une même quête
La Presse
Avec Patrick DeCoste, artiste métis néo-écossais vivant dans la Ville Reine, on pénètre dans un univers autochtone traduit à l’acrylique avec des œuvres sur bois ou peaux d’animaux au style Renaissance.
Sa première exposition au bord du Saint-Laurent s’intitule
et traite de l’histoire de la métropole, notamment quand elle s’appelait Hochelaga. L’artiste a notamment imaginé l’éruption du mont Royal et évoqué l’incendie du pavillon américain d’Expo 67.Évocatrices et toutes en légèreté, ses toiles monochromes
et nous plongent, avec des tons argileux, dans une nature sauvage et reposante où deux hommes semblent vivre en harmonie avec les lieux. À l’instar de Patrick DeCoste quand il s’en va peindre dans la solitude d’une berge ou d’une orée de la baie Georgienne, à deux heures du bruyant site de l’ex-fort Rouillé.Avec ses toiles
et , on entre dans l’imagerie traditionnelle et l’histoire canadienne, mais avec un discours original. Dans la première, l’artiste mélange l’histoire de la Nouvelle-France (l’arrivée de Jacques Cartier à Hochelaga en octobre 1535), Expo 67, le sigle d’Hydro-Québec et celui du CN, une toile de cirque qui naît des flots du Saint-Laurent, le tout dans une petite fresque à caractère surréaliste. L’histoire, les légendes et la réalité pour évoquer la condition de l’autochtone moderne, être multiple s’il en est. Alors un métis…Patrick DeCoste ajoute parfois une pointe d’humour dans son travail. Sa toile
nous montre le dieu des mers tombé de sa barque et tiré des flots par le dieu micmac. Cette œuvre est venue à l’esprit de l’artiste à la suite de sa lecture du , la pièce de théâtre du courtisan français Marc Lescarbot (1570-1641), sans doute la première à être jouée en Amérique du Nord, en 1606, par des colons et des Amérindiens micmacs, à Port-Royal. Pour compléter l’aspect comique de l’œuvre, Patrick DeCoste s’est représenté en Kluskap et c’est son « boyfriend » qui personnifie Neptune.Avec
, une peinture réalisée sur une peau de castor, il a créé une carte de l’Est canadien où le musée d’Orsay, le Louvre et le Guggenheim sont situés à quelques encablures d’Halifax ! De l’humour et un sens de la mémoire chez cet artiste talentueux qui regrette presque de ne pas s’être installé à Montréal, comme son frère.Si Patrick DeCoste s’inspire des grands maîtres, le Torontois d’origine japonaise Keita Morimoto avoue aussi avoir été « bouleversé » par Rembrandt et ça se sent dans sa façon de peindre ses visages et ses chairs.
Il présente, avec son exposition
, de petites œuvres (de 4 pouces x 6 à 24 pouces x 36) avec des personnages dans leur plus simple appareil, des œuvres qui jouent sur l’ombre et la lumière, avec des contrastes de couleurs prononcés, comme pour , ou des effets de reliefs et d’éclairage artificiel ( ).Ses tableaux créés en studio l'été dernier sont surtout des portraits issus de photographies qu’il est allé prendre de nuit sur une plage naturiste près de Toronto. Les personnages nus ont parfois l’air d’animaux effarouchés par une lumière éblouissante.
Une femme se baigne. Un homme, dessiné de dos, marche dans la forêt (
). Deux jeunes, un homme et une femme ( ), semblent écouter, fascinés, éclairés par la lumière d’un feu.La nature et son attrait pour une jeunesse fugueuse en quête de liberté font partie intégrante de cette série d’œuvres qui suit celle que l’artiste de 24 ans avait intitulée
. Moins forte et dense que la production de Patrick DeCoste, celle de Morimoto laisse augurer de belles choses quand sa nature aura trouvé sa quête.À la galerie Youn (5226, boulevard Saint-Laurent), jusqu’au 9 novembre