Les destins croisés de deux

anciens Devils

SAINT-JEAN-SUR-RICHELIEU — Le 29 février 2016, date limite des transactions dans la Ligue nationale. Quelques jours plus tôt, le défenseur Éric Gélinas a éventé ses frustrations dans les médias du New Jersey, lui qui a été laissé de côté neuf matchs de suite.

Son compatriote québécois Stefan Matteau, lui, est blessé, mais même quand il est en bonne santé, ses entraîneurs ne lui font guère confiance.

La sortie de Gélinas est mal accueillie par la direction des Devils et il s’attend donc à être échangé. À un point tel qu’après l’entraînement du 29 février, il flâne à l’aréna, question de pouvoir emporter son équipement dans sa prochaine ville, si une transaction se concluait avant 15 h.

« Il ne se passait rien, donc, à 14 h 30, je suis parti chez moi, raconte Gélinas. Cinq minutes plus tard, mon téléphone explose ! Entre-temps, je texte Stef pour lui dire que je suis échangé à l’Avalanche. On était voisins, il est donc venu m’aider à préparer mes valises.

« Je finis mes valises, je devais partir vite pour prendre mon vol, et son téléphone sonne. Il me regarde, il dit : “Je viens d’être échangé à Montréal !” Je ne suis pas sûr de le croire. Je regarde l’heure, il était 15 h… Il raccroche, il dit : “Je te le jure !” Il a donc couru jusqu’à chez lui ! »

NOUVEAU DÉPART, NOUVELLE APPROCHE

Au dire de Matteau, il revoyait hier pour la première fois son ami depuis cette journée d’hiver mouvementée. Le prétexte : le lancement de la fondation d’Éric Gélinas, Gely-N-Ice.

Matteau et Gélinas ont ceci de commun qu’ils viennent de vivre une saison difficile après un début de carrière encourageant. Matteau, rappelons-le, avait fait ses débuts dans la LNH dès l’âge de 18 ans, pendant la saison écourtée de 2013, après avoir été repêché au premier tour l’été précédent. Mais depuis, il a essentiellement partagé son temps entre la Ligue américaine et la LNH, jusqu’à ce que les Devils l’échangent au Tricolore contre Devante Smith-Pelly.

Et à Montréal, le changement d’air n’a guère produit ses effets. Une passe en 12 matchs, pour un total de deux points en 32 matchs au cours de la saison. Michel Therrien l’a laissé de côté lors des quatre derniers matchs.

« C’est mon approche, ma mentalité qui a changé. J’ai gagné en maturité, j’ai réalisé que la Ligue nationale, ce n’est vraiment pas facile et je ne peux pas tenir ça pour acquis. Pour m’y rendre et y rester, je dois travailler, et le faire plus que les autres. C’est mon but cet été. »

— Stefan Matteau

Gélinas, lui, a poussé le changement jusqu’à opter pour un nouvel entraîneur d’été en la personne de Paul Gagné. Il souhaite faire une croix sur une saison difficile et redevenir le défenseur qui avait amassé 29 points en 60 matchs à sa saison recrue, en 2013-2014.

« Je n’étais pas heureux du tout. Au New Jersey, j’ai joué 34 des 62 matchs avant d’être échangé, rappelle-t-il. J’étais en santé, j’étais plus qu’en forme, car je faisais seulement ça, m’entraîner ! Des joueurs de la Ligue américaine étaient rappelés et jouaient devant moi. En tant que joueur, c’est insultant. J’avais ma place et je ne jouais pas. Mais le point positif, c’est que j’ai été échangé, je peux relancer ma carrière et je joue pour un coach [Patrick Roy] qui me connaît depuis longtemps. »

Gélinas se prépare maintenant en vue de la saison prochaine. Son arrivée chez l’Avalanche a pris une tournure inattendue quand il s’est blessé à un coude, le 18 mars. Il devrait recevoir le feu vert du médecin dans les prochains jours pour s’entraîner à plein régime.

DONNER AU SUIVANT

En attendant, Gélinas souhaite redonner à sa communauté de Saint-Jean-sur-Richelieu, là où il a grandi à partir de l’âge de 7 ans.

« Ça faisait deux, trois ans que j’y pensais. À partir du junior, tu fais des apparitions dans les hôpitaux, les écoles. Chaque fois, après ces visites, je trouvais que ces jeunes n’étaient pas chanceux. Ça me ramenait sur Terre, je me trouvais chanceux de jouer et de gagner ma vie comme ça. »

Sa fondation a donc pour but de parrainer financièrement une vingtaine d’enfants défavorisés de la région qui souhaitent jouer au hockey mineur. Il s’agit essentiellement de fournir à ces jeunes de l’équipement, de même que de payer pour eux le coût de l’inscription pour la saison et pour les tournois.

Gélinas se trouvait choyé dans son enfance, puisque son père travaillait pour l’équipementier CCM. Aujourd’hui, il joue dans la LNH, tandis que son frère Karl est lanceur pour les Capitales de Québec, dans la Ligue Can-Am.

« J’ai été chanceux, j’ai toujours eu de l’équipement gratuit. Mais je voyais les autres… Les p’tits gars sont les plus méchants, ils n’ont pas de filtre et ils vont niaiser un gars s’ils voient qu’il a un moins bon bâton. J’ai eu de la chance, mais je voyais que les autres n’avaient pas l’équipement top. »

SIMON DESPRÉS

« Tout le monde le savait »

Ancien coéquipier de Gélinas avec les Sea Dogs de St. John’s, le défenseur des Ducks d’Anaheim Simon Després était également présent hier. Le jeune homme de 24 ans admet avoir fait le vide ce printemps et a très peu regardé de hockey. La recherche d’un nouvel entraîneur-chef pour ses Ducks l’interpelle donc bien peu. Toutefois, il ne s’est dit aucunement surpris du congédiement de Bruce Boudreau, après l’élimination rapide des Ducks. « Depuis le début de la saison, tout le monde le savait », soutient Després. Il assure avoir apprécié Boudreau, « un bon motivateur, comme Jacques Demers ». « Mais je pense qu’il avait perdu le respect de ses adjoints et de ses vétérans. Quand ça arrive… De toute façon, la durée moyenne d’un entraîneur avec la même équipe dans la Ligue nationale, ce n’est pas très long. Dans notre business, il faut gagner pour rester. »

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