AFFAIRES CRIMINELLES
Une drogue ultra-puissante saisie pour la première fois au Québec
La Presse
C’est l’interception de « trois colis provenant de Chine » qui ont permis la saisie, a indiqué hier la Gendarmerie royale du Canada. Ces colis « devaient tous être livrés au domicile de Ryan Challenger, 39 ans, de Laval. Ce dernier a été arrêté, le 14 juin, avec l’aide du Service de police de Laval ».
« C’était la première fois que cette substance – dans sa forme pure – était interceptée à l’importation », a indiqué le caporal François Gagnon en entrevue téléphonique. Auparavant, les autorités n’avaient détecté cette substance qu’à l’intérieur de comprimés déjà fabriqués et vendus comme du fentanyl ou de l’oxycontin.
De l’aveu même de Santé Canada, un grand flou demeure quant aux effets exacts du W-18.
Il n’en demeure pas moins que les seules études faites sur la substance montrent qu’elle a un effet analgésique « considérablement plus » grand que celui de la morphine, selon l’agence fédérale. Une étude effectuée sur des souris dans les années 80 avançait même qu’une dose de W-18 aurait 10 000 fois plus d’effet qu’une même dose de morphine, « ce qui suggère qu’il existe un risque potentiellement grave que W-18 blesse des personnes », selon Santé Canada.
« On parle certainement d’une substance pire que le fentanyl, qui a causé des dizaines et des dizaines de décès dans l’Ouest canadien », a affirmé le caporal Gagnon.
La drogue est apparue si récemment dans le monde interlope que Ryan Challenger ne pourra pas être accusé en vertu du Code criminel pour l’infraction d’importation de drogue. Santé Canada n’a inscrit la substance sur sa liste des drogues – l’« annexe 1 » – que le 1
juin dernier.« Les preuves disponibles laissent croire que le W-18 est un analgésique extrêmement puissant », a écrit l’agence fédérale en inscrivant la substance sur sa liste des drogues. « Les risques de surdose sont sérieux. »
Cette inscription ne sera toutefois valide qu’après 180 jours. M. Challenger sera donc plutôt accusé en vertu de la Loi sur les aliments, drogues, cosmétiques et instruments thérapeutiques, comme s’il avait importé tout autre médicament non homologué.
Cette loi prévoit des sanctions moindres que le Code criminel.
L’hiver dernier, le magazine
a révélé que le W-18 avait été découvert dans un laboratoire de l’Université de l’Alberta au début des années 80 avant d’être complètement oublié pendant trois décennies. Les chercheurs étaient à la recherche d’une substance analgésique qui n’entraînerait pas de dépendance, critère auquel échouait le très puissant W-18 et les 31 autres substances de leur série « W ». Ils les ont tout de même décrits dans un brevet, aussitôt « tabletté ».C’est ce brevet qui aurait été récupéré par des chimistes mal intentionnés pour produire le W-18.
« Ça ne me fait pas plaisir que des gens aient récupéré ça », a confié au magazine Ed Knaus, professeur de pharmacologie à la retraite, qui faisait partie de l’équipe scientifique. « Ça me dérange, ça m’inquiète. »
n’a pas pu le joindre.