Entrevue avec la ministre fédérale de la Santé

Les dossiers chauds de la ministre Philpott

Médecin de famille, mère de quatre enfants, dont l’une est morte en Afrique en 1991 alors qu’elle y travaillait, la Dre Jane Philpott est à la tête du ministère fédéral de la Santé depuis deux semaines. Frais accessoires. Soins de fin de vie. Légalisation de la marijuana. La liste des dossiers chauds qui reposent sur son bureau est longue.

« Mais ma priorité est de donner un rôle accru au fédéral dans les soins de santé aux Canadiens », a-t-elle expliqué en entrevue à La Presse.

Pour ce faire, la ministre Philpott veut rapidement s’asseoir avec les ministres provinciaux de la santé et conclure un nouvel accord pancanadien sur la santé. « Je veux parler de soins à domicile, de la façon de rendre les médicaments plus abordables… », énumère-t-elle.

DIX ANS EN AFRIQUE

Âgée de 54 ans, la Dre Philpott parle le français, mais préfère que l’entrevue se déroule en anglais. Fille d’un pasteur presbytérien et d’une mère enseignante, Mme Philpott habite à Stouffville, en Ontario, avec son mari, le journaliste Pep Philpott. Pendant près de 10 ans dans les années 90, Mme Philpott a travaillé comme médecin au Niger.

C’est dans ce pays d’Afrique de l’Ouest qu’elle a perdu sa fille aînée en 1991. La petite de 2 ans a été emportée par une méningite fulgurante. Sur son blogue, la ministre a raconté en détail cette journée tragique en 2013.

À son retour d’Afrique, la Dre Philpott a pris la tête du département de médecine familiale de l’hôpital de Markham. Elle a contribué à mettre sur pied un programme de médecine familiale dans un hôpital d’Éthiopie et a milité pour les soins aux personnes atteintes du sida.

Mme Philpott reconnaît que ses années de travail en Afrique ont certainement influencé sa vision des systèmes de santé et lui ont donné une sensibilité accrue envers les réfugiés. « Je connais les défis que doivent relever les personnes vivant dans des pays avec moins de ressources », dit-elle.

Au début du mois, Mme Philpott a justement été nommée présidente du Comité spécial sur l’accueil des réfugiés syriens. D’ici quelques jours, ce comité dévoilera les détails du plan d’accueil des 25 000 réfugiés syriens qui devraient arriver au Canada au cours des prochaines semaines.

« Mon séjour en Afrique teinte qui je suis. Ça m’a amenée à faire tout ce que je peux pour aider à améliorer la santé des Canadiens et à amener le Canada à jouer un rôle dans les situations humanitaires à travers le monde », dit-elle.

DEUX ENJEUX MAJEURS

Dans son entrevue éclair avec La Presse, la ministre a eu le temps de discuter de deux enjeux majeurs qu’elle devra aborder durant son mandat.

FRAIS ACCESSOIRES

La semaine dernière, le gouvernement québécois a adopté le projet de loi 20, qui prévoit d’encadrer les frais accessoires dans la province. Cette situation a soulevé les critiques des partis d’opposition, qui y voient une porte ouverte au privé en santé. Le député Amir Khadir a même écrit à la ministre Philpott pour lui demander d’intervenir. Celle-ci dit avoir « déjà contacté » le ministre de la Santé, Gaétan Barrette. « Nous avons eu une bonne conversation, dit-elle. Au cours des prochains mois, nous aurons la chance de discuter de cet enjeu dans le détail. Mon rôle est de m’assurer que tous les Canadiens ont accès aux traitements médicalement nécessaires. »

SOINS DE FIN DE VIE

En février, la Cour suprême a invalidé l’article du Code criminel interdisant à un médecin d’aider quelqu’un à se donner la mort. La Cour donnait un an au gouvernement fédéral pour ajuster sa loi en conséquence. La récente campagne électorale fédérale a toutefois ralenti les travaux à ce sujet. La ministre demandera-t-elle un sursis à la Cour ? « Il est encore trop tôt pour confirmer ce que nous allons faire, explique Mme Philpott. C’est un sujet très important pour les provinces. Nous délibérons encore pour nous assurer que nous avons un plan intelligent. »

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