SÉRIE 1/9 UNE JOURNÉE DANS LA VIE D’UNE…

Éducatrice en CPE

Depuis 35 ans, Francine Ricard, éducatrice au CPE Carcajou, prend sous son aile les poupons des élèves de Rosalie-Jetté, une école pour les mères adolescentes située dans le quartier Mercier. Elle prendra sa retraite en septembre, le cœur serré, mais avec le sentiment du devoir accompli. Nous l’avons accompagnée le temps d’une journée.

8 h

Francine essuie et range de la vaisselle de plastique en attendant l’arrivée des enfants. Son quart de travail commence à 8 h, mais elle arrive vers 6 h 30, en même temps qu’une collègue qui vient la chercher chez elle, à Lachenaie. Entre-temps, Francine aide sa collègue à plier du linge. Du bénévolat ? Francine sourit. « J’en mange, de ma job. » Jacob, 22 mois, et Ana-Cristina, 2 ans, arrivent les premiers. Les deux gamins babillent en espagnol. Dans le groupe des Petits rayons de soleil, dont Francine s’occupe avec sa collègue Claudine, 8 enfants sur 10 sont d’origine latino-américaine.

9 h 05

Dimitry, deux ans et demi, arrive. À Rosalie-Jetté, les cours commencent à 9 h, mais on tolère les retards jusqu’à 9 h 45. Après le départ de sa mère, Dimitry tape Christina, 2 ans. « Je ne veux pas que tu tapes les amis », dit Francine au garçon, qui pique une grosse colère. « Il a un petit frère qui vient d’arriver il y a à peine deux mois », souligne Francine pour expliquer le comportement de Dimitry, qui s’est calmé. La mère de Dimitry apporte parfois son nourrisson avec elle, en classe. Pour réduire les risques de décrochage, on encourage les filles à reprendre les cours rapidement.

9 h 45

Après sa pause, Francine s’assoit par terre auprès des huit bouts de chou présents ce jour-là. La chanson On leur a fait croire, d’Alex Nevsky, joue en boucle. Antoine et Dimitry se mettent à danser, suivis par Francine et les six autres amis. « Ce que j’aime le plus, c’est d’être présente, combler leurs besoins affectifs, dit-elle. C’est ce qui leur donne de l’estime, de la confiance. » La direction entend parfois des histoires difficiles. Il lui arrive de faire appel à la DPJ pour s’assurer que les jeunes mères, parfois démunies, reçoivent les services dont elles ont besoin.

11 h 30

Après avoir fabriqué des colliers géants et fait quelques culbutes sur les tapis, les enfants s’assoient pour manger. Au menu : du pâté chinois. Francine part pour son heure de lunch tandis que Claudine et Annette, une autre éducatrice, s’occupent de nourrir les petits. Dans la cuisine, le directeur du CPE, André Marcotte, et la directrice de l’installation Rosalie-Jetté, Sylvie Brochu, discutent des compressions majeures dans le réseau (74 millions cette année, 123 millions l’an prochain). « Tout ce qui s’en vient m’aide à prendre ma retraite », glisse Francine en sirotant sa canette de Coca-Cola.

12 h 30

Quand Francine revient de sa pause, les enfants sont déjà couchés, mais Ana-Cristina ne dort pas encore. Francine lui flatte le dos jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Vers 14 h 10, Kaylee, deux ans et demi, se réveille, le sourire aux lèvres. Francine change sa couche et enlève les pansements qu’elle lui a mis sur les pieds le matin pour couvrir deux ampoules causées par ses sandales. « C’est le moment de la journée que je préfère », dit Francine, qui apprécie ce temps exclusif qu’elle peut consacrer à ses petits rayons de soleil, reposés.

14 h 45

La mère de Jacob arrive, suivie par le père d’Ana-Maria. Quand la mère de Kaylee se présente, Francine lui conseille de faire tremper ses pieds dans le bain et d’appliquer de la crème Polysporin. « On achète ça dans une pharmacie », précise-t-elle. « On fait beaucoup de coaching auprès des filles », dit Francine, soulignant la belle relation de confiance qui s’installe entre les mères et les éducatrices. « On sent qu’on a une mission pour la société. Et c’est valorisant. »

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