LA PRESSE À CHICAGO BEAUTÉ

SUR LES TRACES DE CW BEGGS

CHICAGO — La plupart des Québécois l’ignorent, mais la société Marcelle est bel et bien née à Chicago, aux États-Unis, à la fin du XIXe siècle – même si elle a été rachetée par des Canadiens dans les années 70 et qu’elle a aujourd’hui son siège social à Montréal. En vue du lancement de sa première gamme de soins pour hommes, CW Beggs and Sons, La Presse est allée sur les traces de l’homme par qui tout a commencé, Charles Waugh Beggs.

L’ORIGINE

Né à Plainfield, en Illinois, en 1840, Charles Waugh Beggs n’était en rien destiné à devenir un homme d’affaires dans le domaine de la beauté. Fils de révérend, il loue, dès l’âge de 22 ans, la ferme paternelle et démarre une prospère affaire d’élevage. Caressant d’autres ambitions, il acquiert avec un partenaire un dried goods store, un magasin général, où les affaires vont rondement. Voyant son honnêteté remise en question par son partenaire, il se dissocie. C’est à ce moment qu’il décide de partir pour Chicago et de se lancer dans une nouvelle aventure : les articles de toilette.

UNE ÉPOQUE EFFERVESCENTE

Les premiers produits Marcelle sont commercialisés en 1874, soit trois ans après le grand incendie de Chicago. Dans les années suivantes, la reconstruction donne un nouvel élan à la ville. Chicago connaît alors la croissance démographique la plus rapide au pays. C’est ici qu’est construit le premier gratte-ciel, alors que les gens découvrent les premières lampes à incandescence lors de l’Exposition universelle de 1893. 

DES MÉDICAMENTS AUX PETITS POTS

Au départ, Marcelle fabrique autant des produits de patent medicine que de toiletries. Le frère de M. Beggs, George W. Beggs, un éminent physicien, a probablement eu une grande influence dans ce choix d’entreprise. Peu à peu, cependant, M. Beggs délaisse les médicaments pour se concentrer sur les articles de toilette : vanishing cream, perfect complexion powder et eaux de toilette font partie des premiers produits commercialisés. 

LES FEMMES, NOUVELLES CONSOMMATRICES

La façon de consommer change également au tournant du XXe siècle avec la montée du commerce de détail. En fait foi l’institution de Chicago Marshall Field. Situé dans la rue State, Marshall Field se distingue par son architecture opulente et son offre de produits luxueux, dont plusieurs sont destinés à la gent féminine, comme les produits de beauté, bien sûr ! C’est ainsi qu’une nouvelle catégorie de consommateurs apparaît : les femmes, qui commencent à faire les boutiques non accompagnées et à avoir du poids dans les décisions de la maisonnée. En s’adressant aux femmes avec Marcelle, M. Beggs est donc bien de son époque.

DES PRODUITS HYPOALLERGÉNIQUES

Marcelle devient une marque déposée en 1910 ; en 1919, la poudre faciale et les rouges à lèvres Marcelle se trouvent chez les apothicaires américains. M. Beggs se distingue avec son souci de créer des produits hypoallergéniques, qui ne font pas qu’améliorer l’aspect de la peau, mais aussi sa santé, une idée assez visionnaire pour son époque ! 

LE NOM

On ignore à ce jour où M. Beggs a pris son inspiration pour le nom Marcelle. Quelques hypothèses : on peut supposer que ce prénom, à l’époque assez populaire en France, évoquait l’esprit chic et recherché à la française. L’ondulation Marcel – une coiffure vaguée réalisée au fer et au peigne inventée par le coiffeur français Marcel Grateau en 1872 – pourrait aussi avoir inspiré l’entrepreneur.

UNE ENTREPRISE À SUCCÈS

Marcelle serait devenue un modèle d’entreprise prospère à Chicago. En 1901, CW Beggs, Sons and Co. a déclaré des ventes annuelles de 100 000 $ – une très belle somme pour l’époque, surtout pour des produits cosmétiques ! On présume que des boutiques Marcelle ont ouvert leurs portes. Les archivistes engagés par Marcelle ont retrouvé plusieurs adresses d’affaires enregistrées dans la ville, mais impossible de savoir s’il s’agissait de fabriques, de boutiques ou de bureaux. Une d’entre elles, située en plein cœur de la ville, au 195-197, avenue Michigan, près de la rue Lake, pourrait fort bien avoir été une boutique Marcelle au tournant du XXe siècle.

LA SUITE

M. Beggs s’éteint en 1931, à l’âge vénérable de 91 ans. Marcelle passe ensuite aux mains du Dr Phil Blazer, un allergologue de Chicago, qui crée notamment, suivant les traces de M. Beggs, les crèmes hypoallergéniques et sans parfum de Marcelle, toujours vendues aujourd’hui. À partir de 1949, les produits Marcelle sont vendus au Canada, grâce au pharmacien montréalais Victor Cape. C’est ce dernier et son fils Michel qui achètent d’ailleurs les droits de distribution et de fabrication de Marcelle en 1973 et ouvrent le premier siège social de Marcelle à Montréal. La famille Cape est toujours propriétaire de Marcelle à ce jour.

MAINTENANT POUR LUI

Le marché des soins pour lui étant en plein essor, Marcelle lance cet automne sa nouvelle gamme CW Beggs and Sons, qui rend hommage à l’innovation dont a fait preuve M. Beggs en fondant son entreprise, en 1874. Au menu : textures légères, routine simple et facile à adopter et formules sécuritaires, tous les produits étant hypoallergéniques, sans parfum, sans parabène, sans huile, sans gluten et sans alcool, un ingrédient omniprésent dans les produits masculins qui est pourtant irritant et asséchant pour la peau. Ingrédient-vedette de la gamme, la provitamine B5 se retrouve dans de nombreux produits (gel douche, shampoing, hydratants, exfoliant) pour ses actions fortifiantes et ses propriétés réparatrices et apaisantes.

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