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Accusé de trafic de GHB, un médecin continue de traiter des patients

Bien que des accusations de possession et de trafic de drogue pèsent contre lui, un médecin de famille de l’Estrie continue de soigner des patients.

Le Dr Stephan Gamache est soupçonné d’avoir fourni du GHB – surnommé la drogue du viol – à une policière de la Sûreté du Québec, selon des informations obtenues par La Presse.

Le Dr Gamache, la policière Nancy Jenny Roy et le conjoint de cette dernière – Jean-François Perrault – ont été accusés dans cette affaire en juillet dernier.

Nouvelle loi musclée, pas utilisée

Entrée en vigueur l’été dernier, une nouvelle loi (loi 11) vise à permettre au conseil de discipline du syndic du Collège des médecins d’imposer immédiatement une suspension ou une limitation provisoire de son droit d’exercer la médecine à un médecin visé par une poursuite dont l’infraction est punissable de cinq ans d’emprisonnement ou plus en lien avec l’exercice de la profession.

Or, le conseil de discipline du Collège des médecins n’a pas utilisé les pouvoirs que lui confère cette loi dans le cas du Dr Gamache. Le conseil de discipline a-t-il jugé que les allégations de trafic de drogues n’avaient pas de lien avec sa pratique de la médecine ?

Pour des raisons de « confidentialité », Leslie Labranche, porte-parole du Collège des médecins, dit ne pas être en mesure de nous expliquer pourquoi aucune suspension ni aucune limitation provisoire n’ont été imposées. Mme Labranche nous a dit de nous référer au texte de loi sans davantage d’explications.

Le Dr Gamache a le statut de membre « actif » sur le site du Collège des médecins. Il pratique au CLSC La Pommeraie-GMF Farnham en Estrie, toujours selon l’ordre professionnel.

L’histoire débute en août 2015. La policière de la SQ Nancy Jenny Roy est alors placée sur écoute par son propre corps policier qui la soupçonne d’avoir participé à une fraude.

Or, durant l’enquête, la police intercepte une conversation entre elle et un autre policier de la SQ – pas accusé dans l’affaire – à qui elle demande de l’aide pour se procurer du GHB.

Ce policier lui répond alors qu’un ami médecin – le Dr Gamache – peut lui en fournir et qu’elle n’a qu’à venir chercher la drogue au domicile de ce dernier, toujours selon nos informations.

Les deux policiers et le médecin seront arrêtés en octobre 2015. Puis la policière et le médecin seront accusés par voie sommaire près de deux ans plus tard, soit en juillet dernier. Le policier qui a servi d’entremetteur, lui, ne sera pas accusé.

Le Dr Gamache doit retourner devant la cour au palais de justice de Montréal la semaine prochaine.

La policière Nancy Jenny Roy et son confrère qui a servi d’entremetteur – dont la SQ ne peut confirmer l’identité puisqu’il ne fait pas l’objet d’accusations criminelles – sont suspendus avec solde conformément aux dispositions de leur contrat de travail, indique le capitaine Guy Lapointe, chef de service du Service des communications avec les médias de la SQ.

Le capitaine Lapointe a refusé de commenter davantage l’affaire « par respect pour le processus judiciaire ».

Le Collège des médecins refuse d’indiquer si le Dr Gamache fait l’objet d’une enquête de son ordre professionnel.

« Les enquêtes réalisées par le syndic sont confidentielles en vertu du Code des professions. Par conséquent, je ne suis pas en mesure de confirmer ou d’infirmer si le Dr Stephan Gamache fait l’objet d’une enquête. »

— Leslie Labranche, porte-parole du Collège des médecins

La direction du CIUSSS de l’Estrie-CHUS – qui englobe le CLSC de Farnham – a refusé de nous accorder une entrevue téléphonique. « Tout ce que nous sommes en mesure de vous confirmer est que le Dr Stephan Gamache a actuellement un statut et des privilèges dans notre établissement. Il a donc le droit de soigner des usagers », nous a indiqué par courriel la chef d’équipe au service des communications de ce CIUSSS, Marie-France Thibeault.

Le Dr Gamache travaille aussi au Centre de médecine intégrative et esthétique – un regroupement de quatre cliniques privées situées sur la Rive-Sud et dans la couronne nord de Montréal – où il pratique dans le domaine du « médico-esthétique », selon le site web de ce centre médical. Malgré plusieurs messages laissés à la fondatrice et directrice médicale de la clinique, la Dre Lyne Desautels, cette dernière n’a pas rappelé La Presse.

Le Dr Gamache pratique la médecine depuis plus de 20 ans. « À l‘écoute de sa clientèle et de ses besoins, il saura vous conseiller et vous guider afin de satisfaire vos attentes en matière d’esthétique tout en conservant une allure des plus naturelles sans verser dans la démesure ! », peut-on lire sur le site web de cette clinique privée.

Joint par La Presse, l’avocat du Dr Gamache, Me Luc Simard, nous a indiqué qu’il demanderait à son client s’il veut commenter l’affaire. Il ne nous pas rappelée par la suite.

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