Douze minutes pour prévenir l’apocalypse
Pas vraiment depuis les années 60. Le temps de vol des missiles intercontinentaux russes est d’une demi-heure, ça ne laisse pas beaucoup de marge de manœuvre.
Il ne serait efficace ni contre la Russie ni contre la Chine, qui ont trop de missiles. Pour le moment, son efficacité est douteuse même contre des missiles nord-coréens, mais il y aura certainement une discussion sur le sujet. La décision d’utiliser le bouclier antimissile devrait être prise au moment de l’authentification de l’attaque nucléaire par le NORAD [North American Aerospace Defense Command, ou Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord], au Colorado. Le problème, c’est que l’interception aura lieu dans les 10 dernières minutes avant l’impact, alors ça laisse très peu de temps pour que ça influence la décision de lancer une attaque américaine. Il faut aussi faire attention à ce que les intercepteurs du bouclier ne soient pas interprétés comme une attaque nucléaire par la Chine ou la Russie.
Non, ça n’aurait pas été dans leur intérêt, parce que ça aurait eu l’air d’une attaque. L’inquiétude, c’est que la Chine ait réussi à insérer un virus dans le matériel informatique, dont certains composants sont fabriqués en Chine. Une autre possibilité est que la Chine ou la Russie parvienne à bloquer les communications du NORAD. Ça diminuerait le temps dont dispose le président pour prendre une décision. Évidemment, si un missile balistique est lancé d’un sous-marin au large de la côte Est, le temps de vol est réduit de 30 à 15 minutes, et le président aurait 5 minutes plutôt que 12 pour prendre une décision.
Durant la guerre froide, les sous-marins américains d’attaque suivaient de près tous les sous-marins russes dotés de missiles nucléaires, mais il n’était probablement pas possible d’empêcher qu’ils soient 100 % hors d’état de nuire. Depuis, la marine russe les laisse généralement près de ses ports, dans la mer de Barents [au nord de la Norvège], pour les protéger.
La Russie a en ce moment des problèmes de détection parce que ses satellites militaires ne couvrent plus les États-Unis à tout moment. Elle a automatisé son système, parce qu’elle ne se fie pas aux capacités de ses militaires. Cette centralisation du commandement militaire existe depuis l’époque des tsars. Ça permet de réagir plus rapidement, mais ça minimise la capacité des humains à corriger les erreurs des machines. L’automne dernier, un colonel soviétique qui avait évité une guerre nucléaire en 1983, Stanislav Petrov, est mort. Il avait décidé de ne pas relayer la détection de missiles, qui étaient en fait des phénomènes lumineux inhabituels liés à la réflexion du Soleil sur les nuages. Un satellite avait interprété ces signaux comme le panache de missiles intercontinentaux américains au décollage.
Traditionnellement, ses bombes nucléaires ne sont pas en état d’alerte. Elles sont même stockées toutes au même endroit, comme celles de la France. Leur philosophie est différente : en cas de crise, ils cacheraient leurs missiles de manière à en conserver un ou deux en cas d’attaque. Ils ne peuvent de toute façon pas complètement détruire l’arsenal nucléaire américain, comme le veut la doctrine de destruction mutuelle assurée (MADD) qui empêchait l’URSS et les États-Unis d’envisager de gagner une guerre nucléaire durant la guerre froide. Mais ça pourrait changer, parce que les Chinois commencent à tester le déploiement de missiles nucléaires sur des sous-marins et des remorques mobiles.
Je pense que cette étude minimisait la capacité des Russes à protéger leurs missiles nucléaires dans des bunkers. Cela dit, il est vrai que la capacité russe de détecter les missiles américains n’est pas encore rétablie.
Son système est encore très centralisé et ne comporte pas de système de détection d’une attaque américaine. Les Coréens n’ont pas de satellites. Mais étant donné les progrès de la technologie, il est probable que d’ici une décennie, ils pourraient s’ils le voulaient avoir un système de détection rudimentaire.
Minute 0
Une attaque nucléaire est détectée par le Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (NORAD) à Colorado Springs, qui avertit le Pentagone.
Minute 3
Le Pentagone informe le président et ses conseillers de l’attaque et des « options nucléaires » américaines.
Minute 4
Le président a ensuite 12 minutes pour décider ce qu’il fera. S’il décide de lancer les missiles américains, il doit authentifier l’ordre avec une carte appelée « biscuit », qui contient des chiffres et des lettres sur plusieurs lignes. Le Pentagone demandera certains détails sur la carte.
Minute 16
Le Pentagone envoie aux officiers responsables des missiles nucléaires les codes d’identification de l’ordre, les codes de déblocage des missiles, le code du plan préétabli déterminant quels missiles seront lancés (il y a 420 missiles dans des silos et 1000 dans des sous-marins), ainsi que le moment du lancement.
Minute 18
Les officiers responsables des missiles authentifient l’ordre.
Minute 19
Les missiles sont lancés. Les missiles lancés à partir des silos terrestres mettent 30 minutes à atteindre leur cible.
Russie
7000 bombes nucléaires
États-Unis
6800 bombes nucléaires
France
300 bombes nucléaires
Chine
260 bombes nucléaires
Royaume-Uni
215 bombes nucléaires
Pakistan
130 bombes nucléaires
Inde
120 bombes nucléaires
Israël
80 bombes nucléaires
Corée du Nord
moins de 15 bombes nucléaires
Source : Ploughshares