CHRONIQUE

Le recrutement, une activité sans fin

La pénurie de main-d’œuvre, les départs massifs à la retraite, la croissance des entreprises qui force l’embauche d’effectifs additionnels, voilà autant de facteurs qui obligent un nombre grandissant d’entreprises à développer des stratégies innovantes de recrutement. En fait, pour plusieurs d’entre elles, recruter est devenu tout simplement une activité sans fin.

La pénurie de main-d’œuvre n’est plus la vague menace que l’on appréhendait sans trop y croire il y a 20 ou 30 ans, alors qu’on nous servait des projections sur les effets statistiques catastrophiques que le déclin démographique allait provoquer.

Il faut dire qu’avec un taux de chômage de 14 % en 1990 ou de 10 % en 2004, on n’était loin de s’imaginer que le Québec pourrait un jour souffrir d’un manque de main-d’œuvre.

Malheureusement, la réalité du déséquilibre générationnel nous a rattrapés, et nous vivons aujourd’hui à l’heure de la pénurie.

Chaque semaine, je rencontre des PDG dans leur entreprise et chaque fois, ils ou elles me répètent le même refrain : « On manque de monde, on veut embaucher, mais on n’arrive pas à combler nos besoins. »

Dans ma chronique précédente, j’évoquais les mérites qu’une plus grande implication des employés au sein de leur organisation pouvait avoir sur leur productivité et leur rétention. Des employés plus impliqués, c’est effectivement un pas dans la bonne direction. Mais pour plusieurs entreprises, c’est bien loin d’être suffisant.

Le cas de la société Premier Tech de Rivière-du-Loup illustre à lui seul toute la problématique que pose le phénomène de la pénurie de main-d’œuvre tout en nous démontrant d’éloquente façon combien la nécessité reste la mère de l’invention.

L’entreprise œuvre dans trois secteurs différents : la production de tourbe, la production d’équipements d’emballage de matériaux et de systèmes de traitement des eaux. Premier Tech est établie à Rivière-du-Loup, mais exploite des usines dans 26 pays.

L’entreprise emploie 4500 personnes, dont 1300 à Rivière-du-Loup qui abrite son siège social international. 

Premier Tech vit depuis une dizaine d’années le double défi d’être à la fois une entreprise en région et d’afficher une forte croissance.

Comme c’est régulièrement le cas, Premier Tech a présentement 150 postes à pourvoir sur son site internet. Des emplois de tous genres et de toutes les catégories : ingénieur, programmateur, technicien juridique, contrôleur, analyste financier, directeur de crédit, assembleur mécanique, machiniste, adjoint exécutif et même barista !

Fidélisation et croissance

Line Lamarre est vice-présidente principale, développement organisationnel. Elle s’est jointe à Premier Tech il y a 16 ans et confirme que la situation de l’emploi s’est passablement modifiée au cours des dernières années.

« On est chanceux. On a un taux de fidélisation de 90 %, ce qui est très bon, mais on doit tout de même embaucher 130 personnes par année pour garder nos effectifs à flot. Mais comme on est toujours en croissance, on a dû embaucher 300 personnes au cours des deux dernières années. Ça va être encore le cas cette année », souligne la gestionnaire.

Comment arrive-t-elle à attirer autant de monde en région ? Le Bas-Saint-Laurent offre un cadre de vie exceptionnel, mais ce n’est pas tout le monde qui est prêt à s’éloigner à quatre heures de voiture de Montréal.

« On a créé, il y a deux ans, une équipe d’attraction de talents », explique Line Lamarre.

« On a 12 personnes qui ne se consacrent [qu’au recrutement]. Des chercheurs de talent, des recherchistes, des spécialistes des réseaux sociaux. On innove constamment pour se rapprocher et dénicher des talents. »

— Line Lamarre, vice-présidente principale, développement organisationnel chez Premier Tech

L’automne dernier, l’équipe a organisé la Tournée Premier Tech au cours de laquelle les recruteurs ont visité neuf villes du Québec pour tenir une rencontre avec des candidats dans une microbrasserie de chaque ville visitée, sur le modèle du speed dating. Premier Tech offrait la tournée, faut-il préciser.

« On a embauché à date 6 personnes que l’on a rencontrées au cours de la Tournée, et il y en a 35 autres qui sont en processus d’embauche », indique Line Lamarre.

Mais ce n’est pas suffisant. Premier Tech participe également aux missions de recrutement à l’étranger que réalise Québec International.

Au printemps dernier, l’entreprise a réalisé neuf embauches lors d’une mission à Paris et quatre autres, un mois plus tard, lors d’une mission à Tunis. Deux autres missions à Paris et à Tunis, l’automne dernier, ont permis l’embauche de 3 candidats alors que 30 autres candidats sont en processus d’embauche.

« On s’en va le mois prochain au Maroc et au Brésil où on va chercher des candidats dans les technologies de l’information et l’ingénierie. On va aussi exporter le concept de la Tournée Premier Tech en France où on va aller rencontre des candidats dans leur ville. Ça ne se déroulera pas dans des microbrasseries, mais il y aura peut-être du vin », prévient la vice-présidente.

Line Lamarre ne croit pas que l’entreprise va réduire le rythme de ses prochaines embauches. Premier Tech est toujours en croissance et son développement international l’oblige à embaucher au Québec.

Les membres de son équipe d’attraction de talents n’ont donc pas à craindre le chômage. Ils vont poursuivre inlassablement leur quête en utilisant beaucoup les réseaux sociaux et en assurant au maximum le rayonnement de l’entreprise. D’autres initiatives comme la tournée d’embauche vont être mises sur pied.

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