RETOUR DES NORDIQUES

Que fera Péladeau ?

Le 14 mars 2013, Pierre Karl Péladeau annonçait avec émotion sa décision de quitter la présidence de Québecor, souhaitant « prendre du recul face à la gestion quotidienne de l’entreprise ».

C’était, presque jour pour jour, un an avant son saut en politique. « Je continuerai de m’occuper des dossiers stratégiques de l’entreprise », avait-il ajouté.

Le retour des Nordiques était un de ces enjeux. La veille de l’annonce, PKP avait d’ailleurs assuré Régis Labeaume du maintien de son engagement à rapatrier les Bleus.

« Ce dossier se retrouve au sommet de sa pile, j’en suis certain, m’avait expliqué le maire de Québec. Il aura encore plus de temps pour s’en occuper. »

Qu’en est-il aujourd’hui ? Comme chef du Parti québécois, M. Péladeau avait d’autres chats à fouetter. Mais sa carrière politique terminée, consacrera-t-il de nouveau temps et énergie au retour des Nordiques ?

Depuis sa démission lundi, l’avenir professionnel de PKP intrigue. Peu importe ses choix, il suivra sûrement de près l’évolution des « dossiers stratégiques » de Québecor, comme son plan de 2013 le prévoyait.

Les partisans du retour des Nordiques l’espèrent sûrement. Ce projet demande un investissement financier majeur. Durant son bref séjour en politique, PKP a continué d’appuyer l’idée. Aujourd’hui, sa participation directe aux démarches, lui l’actionnaire de contrôle de Québecor, réaffirmerait avec force les intentions de l’entreprise.

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Au cours des derniers mois, Brian Mulroney, président du conseil d’administration de Québecor, et Pierre Dion, PDG de l’entreprise, ont porté le projet de retour des Nordiques. En septembre dernier, à New York, ils ont présenté ensemble la candidature de Québec pour l’obtention d’un club de l’expansion.

Les relations entre Québecor et la LNH se sont grandement réchauffées après une période difficile au début des années 2010. L’entreprise contestait alors devant le CRTC l’exclusivité de RDS sur la télédiffusion des matchs du Canadien.

En novembre 2013, le vent a tourné. Québecor est devenue partenaire télé de la LNH. Cette nouvelle relation a été célébrée avec éclat lorsque TVA Sports a annoncé, au mois de septembre suivant, son plan de diffusion des matchs lors d’un grand événement tenu dans un resto de Boucherville. M. Mulroney a alors rendu hommage au commissaire de la LNH, qui le lui a bien rendu.

M. Dion a ensuite été invité à présenter les initiatives de TVA Sports aux gouverneurs du circuit, réunis en Floride. Cela a renforcé les liens entre les deux parties.

Si Québecor travaille toujours au retour des Nordiques, MM. Mulroney et Dion ont néanmoins montré une certaine réserve en mars dernier, citant la faiblesse du dollar canadien comme une difficulté imprévue. Aux chauds partisans des Bleus, ils ont conseillé la patience. Pourtant, la valeur du huard par rapport à la devise américaine est aujourd’hui plus élevée qu’au moment de la rencontre de New York, l’automne dernier.

Compte tenu de l’instabilité de notre dollar ces derniers mois, l’inquiétude des dirigeants de Québecor, qui rendent des comptes aux actionnaires, est compréhensible.

Dans ce contexte, qui de mieux que l’actionnaire de contrôle pour donner un coup d’accélérateur ? Qui de mieux que celui à qui appartient l’entreprise, et qui a appuyé ce projet dès la « Marche bleue » d’octobre 2010, pour assurer un suivi de tous les instants ?

Bref, qui de mieux que PKP pour poursuivre les discussions avec la LNH et démontrer combien le modèle d’affaires de Québecor est bâti sur mesure pour soutenir une équipe du circuit ?

L’entreprise de M. Péladeau a démontré qu’elle croit au hockey comme vecteur de croissance. La LNH le sait fort bien. Mais certains propriétaires d’équipe, comme l’influent Jeremy Jacobs, des Bruins de Boston, ont peut-être besoin de se le faire rappeler.

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Au sein des proprios de la LNH, on retrouve des gens de plusieurs familles politiques. Voilà pourquoi je demeure persuadé que les convictions souverainistes de PKP ne sont pas un enjeu décisif pour la LNH. Et c’est encore plus vrai maintenant qu’il a abandonné sa carrière politique.

En revanche, ce qu’il a appris durant son passage à la tête du Parti québécois pourrait l’aider dans ses discussions avec les dirigeants de la LNH. Eux aussi connaissent son impétuosité. PKP ne s’était d’ailleurs pas fait d’amis en 2009 en reprochant au Canadien de nommer un nouvel entraîneur avant que la vente de l’équipe (Québecor était sur les rangs) ne soit conclue.

Dans un texte publié mardi sur le site de L’actualité, où il trace le bilan du séjour de PKP à la tête du Parti québécois, Jean-François Lisée indique que son « caractère entier » était présent à ses débuts comme chef. « Mais il a eu la capacité de s’adapter et de se discipliner, endossant petit à petit le manteau du chef de l’opposition », ajoute le député de Rosemont.

Être proprio d’une équipe de la LNH requiert aussi le port d’un manteau, pour reprendre l’expression de M. Lisée. Et il faut « s’adapter » aux méthodes de la LNH. Selon le député, qui ne fut pas toujours un de ses fans, PKP est maintenant capable de cette souplesse.

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La LNH annoncera bientôt le résultat de son processus d’expansion. Les rumeurs laissent croire que seule Las Vegas sera choisie. Peut-être. Mais à part Québec, quelle autre ville est prête à accueillir une équipe ?

Ainsi, cette semaine, la LNH a appris une mauvaise nouvelle. Le conseil municipal de Seattle a rejeté le projet de construction d’un nouvel amphithéâtre afin d’obtenir des équipes de la NBA et de la LNH. Ce résultat inattendu porte un dur coup au désir de Gary Bettman d’y implanter un jour une concession.

Que ce soit pour accueillir un club de l’expansion ou une équipe en difficulté financière, Québec demeure une solution gagnante pour la LNH.

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