Soins palliatifs

De la demande à la mort

Le gériatre David Lussier, membre du comité chargé d’établir la marche à suivre lorsqu’une demande d’aide médicale à mourir sera formulée, nous résume ce cheminement en huit étapes.

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Le patient peut toujours changer d’avis

À tout moment au cours de ce processus, le patient peut changer d’avis et retirer sa demande. Le médecin doit d’ailleurs s’assurer, jusqu’à l’injection ultime, que le patient est toujours d’accord. Le patient doit avoir répété qu’il désire l’aide médicale à mourir à plusieurs reprises lors d’entretiens avec le médecin, « espacés dans un délai raisonnable ». Si le patient maintient sa demande, le médecin va chercher les médicaments requis à la pharmacie de son hôpital ou dans une pharmacie communautaire. Il aura besoin de trois médicaments, de seringues et du matériel pour administrer les produits par intraveineuse.

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Le médecin constate le décès

Dans l’acte de décès qui sera rédigé par le praticien, la cause de la mort sera la maladie dont souffrait le patient. « Si le patient ne veut pas que sa famille sache dans quelles circonstances il est décédé, ça demeurera confidentiel. » Le médecin doit ensuite rédiger un avis à l’intention du conseil des médecins de son établissement et aussi de la Commission sur les soins de fin de vie, qui reverra chaque mort. Dans son rapport, il doit démontrer comment les souffrances étaient intolérables et confirmer le diagnostic de fin de vie. Il doit aussi montrer que tous les critères de la loi étaient respectés. « C’est assez long à remplir, plus long qu’on l’aurait voulu, mais il fallait s’assurer que la loi était respectée », explique le gériatre David Lussier.

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Un second médecin évalue la demande

Avant d’aller de l’avant, le médecin doit demander une seconde opinion médicale. Le second praticien doit être totalement indépendant du premier médecin ainsi que du patient. « Le premier médecin ne pourrait pas, par exemple, être le supérieur hiérarchique du second. Ça poserait problème », explique le Dr Lussier.

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Les trois injections sont administrées

Au jour dit, le patient à qui on va administrer l’aide médicale à mourir peut se trouver chez lui ou à l’hôpital. S’il est hospitalisé, il doit l’être dans une chambre privée. Le personnel médical présent doit éteindre ses téléavertisseurs et téléphones cellulaires, afin de créer un environnement propice et calme. Le médecin injecte par intraveineuse un premier médicament, des benzodiazépines, qui calment le patient. Le deuxième produit induit un coma et le troisième, un dérivé du curare, paralyse les muscles et stoppe la respiration. Le processus durerait autour d’une quinzaine de minutes, estimait cette semaine le secrétaire du Collège des médecins, Yves Robert. Dans chaque établissement, un groupe interdisciplinaire de soutien sera mis en place pour épauler le personnel soignant qui pourrait être touché par ces décès.

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Pas de pressions de l’extérieur

Si le second praticien valide la première opinion, le médecin traitant doit ensuite s’assurer que le patient n’est pas victime de pressions de la part de sa famille pour réclamer l’aide médicale à mourir. « Ça va se faire en parlant avec le patient, en privé. » La famille du patient doit-elle absolument être avertie ? Réponse : non. « Le médecin doit faire tout son possible pour que la famille soit avertie, mais si le patient ne veut pas, elle peut ne pas l’être. »

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La Commission fait un bilan annuel

Le médecin transmet son rapport à la commission. Ce rapport est anonyme : ni le nom du médecin ni celui du patient n’y sont inscrits. Si la commission juge que la demande a été adéquatement traitée, le cas est archivé et fera partie du rapport annuel remis au ministre. Dans le cas contraire, la commission peut alors être informée du nom du médecin et lui demander de compléter ou de préciser des éléments de son rapport. Si la commission n’est toujours pas satisfaite, elle informe le ministre de la Santé de ce cas problème. Tous les cinq ans, la commission produit un rapport plus volumineux qui fait le bilan des soins de fin de vie.

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La demande est rédigée

Le patient doit formuler sa demande par écrit, auprès d’un professionnel de la santé, à l’aide d’un formulaire conçu à cet effet. Si la personne ne peut pas écrire, la demande peut être rédigée par un proche en présence du patient et d’un membre du personnel. La demande est remise au médecin traitant. « Ce n’est pas un simple formulaire à remplir pour le patient que le médecin sort de sa poche. Il faut que le patient y ait réfléchi sérieusement », explique David Lussier.

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Le médecin décide s’il accepte

Le médecin traitant détermine s’il a une objection de conscience à administrer l’aide médicale à mourir. Si c’est le cas, il en informe la direction de l’établissement, qui a la responsabilité de trouver un nouveau médecin. S’il accepte de donner le service, il doit établir si le patient respecte les critères prévus à la loi. Le patient doit être majeur, apte, et détenir une carte soleil valide (afin de prévenir le tourisme de la mort). Il doit souffrir d’une maladie grave et incurable et cette maladie doit engendrer des souffrances physiques ou psychiques intolérables. De plus, sa situation médicale se caractérise par un « déclin avancé et irréversible de ses capacités », stipule la loi. Bref, sa mort est imminente.

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