MAXIME TALBOT

« Cette année, je comprends c’est quoi, l’adversité... »

Maxime Talbot s’est présenté fort confiant au camp d’entraînement des Bruins de Boston, en septembre.

Il jouait en moyenne 13 minutes pour Claude Julien au printemps – après la transaction qui l’a envoyé de l’Avalanche du Colorado aux Bruins – et aussi, surtout, il venait de connaître l’un de ses meilleurs étés d’entraînement, à 31 ans.

« Sérieux, je volais sur la glace pendant l’été. J’avais hâte à la saison. Je me disais que j’avais encore cinq ou six ans devant moi dans la Ligue nationale. »

Au bout du fil, Talbot est serein malgré un hiver marqué par de multiples déceptions. Il a été renvoyé dans la Ligue américaine il y a deux semaines pour la deuxième fois cette saison, après avoir été boudé par les 29 autres équipes au ballottage pour la troisième fois en quelques mois.

« Tu ne peux pas te préparer à ça. Il y a quelques années, j’avais donné un séminaire avec Joël Bouchard. Joël parlait de l’adversité dans le monde du hockey. Je venais de gagner la Coupe Stanley à Pittsburgh, puis de signer un contrat à Philadelphie. Tout était beau. Cette année, je comprends c’est quoi, l’adversité... »

« Mais tu dois réagir favorablement, poursuit Talbot. Tu n’as pas le choix. Ça ne donne rien de pleurer en boule. Je ne pensais pas accepter mon sort avec autant de sérénité. Je m’étonne dans tout ça. Je suis fier de moi de ce côté-là. J’apprends à me connaître. »

L’ENVERS DE LA MÉDAILLE

Il voit cependant l’envers de la médaille, après avoir été le héros des Penguins lors de leur conquête de la Coupe Stanley en 2009, puis avoir signé un joli contrat de cinq ans pour 9 millions avec les Flyers.

« J’ai vécu deux échanges dans les trois dernières années. Tu réalises que tu n’es qu’un pion. C’est un business. Je le comprends et je l’accepte. Tu ne peux pas ressentir de frustration envers un directeur général. Il fait sa job. Je serais encore à Boston si j’avais performé. Il n’y a personne d’autre que moi à blâmer dans les circonstances. »

Talbot, choix de huitième tour des Penguins de Pittsburgh en 2002 après une brillante carrière dans les rangs juniors, se sent pourtant aussi fort et rapide que par le passé.

« Je pense être capable d’accomplir les mêmes choses qu’avant sur la glace. Mais c’est un sport qui repose beaucoup sur le mental, et ma confiance est affectée. J’étais super confiant à la fin de l’été. Puis, dès le premier match préparatoire, tu es placé à l’aile – pas au centre – sur un quatrième trio dans l’équipe B, celle qui ne joue pas à domicile. Ta confiance en prend un coup. Tu te demandes si tu es encore dans les plans. Tu es supposé être plus fort mentalement, mais c’est difficile. Ç’a pourtant toujours été une de mes grandes forces au cours de ma carrière. »

L’ancien attaquant des Penguins, de l’Avalanche et des Flyers tente de tirer le maximum de cette rétrogradation.

« L’avantage, c’est que Providence n’est pas trop loin de Boston. Je peux continuer à vivre avec la famille. Je pars le matin de Boston à tous les jours vers 7 h 30 pour arriver à l’entraînement à Providence vers 9 h. Je fais la même chose jusqu’au vendredi, mais je demeure à l’hôtel à Providence le week-end parce qu’on joue souvent trois matchs en trois soirs. Je suis chanceux de pouvoir rester à la maison. » 

« J’imagine jouer pour le Canadien et devoir prendre l’avion pour St. John’s, ça serait bien différent. Tu ne vois pas la famille pendant trois semaines, un mois. »

— Maxime Talbot

Les déplacements sont moins difficiles que prévu. « J’aime voyager en autobus. De toute façon, les trajets ne sont pas si longs. Tu n’affrontes pas les clubs de l’autre conférence. Tu vois les mêmes clubs 14 fois par année. Hartford, Bridgeport, Portland, la plupart des équipes se trouvent à deux ou trois heures de route. Je lis dans l’autobus. Le temps passe vite. Je lis un peu de tout, surtout des biographies. »

Il retrouve une ambiance différente avec les Bruins de Providence. « L’esprit d’équipe, la camaraderie, est différente. Ce sont des jeunes du même âge. Les gars sont toujours ensemble et s’amusent. J’aime contribuer à l’enseignement, l’aspect coaching. »

En 14 matchs à Providence, Talbot a 13 points. Il a connu une seule saison de plus de 30 points dans la LNH.

« C’est bien de pouvoir retrouver ma patience avec la rondelle, comme je le faisais dans les rangs juniors. Tu te sens plus important pour l’équipe. Tu touches plus à la rondelle, tu es placé dans des situations où tu peux faire davantage la différence. »

FAMILLE

Sa situation familiale stable l’aide à encaisser les coups. Maxime Talbot a uni sa vie à celle de l’ancienne championne de patinage artistique Cynthia Phaneuf en 2012. Le couple a deux enfants, Jaxson, 2 ans, et Lou, né en janvier.

« Plus tu vieillis, plus tu réalises qu’il n’y a pas seulement le hockey dans la vie, même si le hockey a occupé toute la place depuis ton jeune âge. À un moment donné, tu fondes une famille, tu rentres à la maison, tu as deux beaux enfants en santé, ça aide à rester positif. »

Les plans futurs ne sont pas clairs pour l’instant, mais il ne détesterait pas traverser l’Atlantique pour vivre une nouvelle expérience l’an prochain.

« Il faut se rendre à l’évidence. J’ai passé le ballottage trois fois cet hiver. Je ne m’attends pas nécessairement à recevoir un contrat garanti de la LNH pour l’an prochain. » 

« Oui, je considère d’aller de l’autre côté [de l’océan]. Mon objectif serait la Suisse, si je peux obtenir un poste en Suisse. »

— Maxime Talbot

Il tente de ne pas trop rêver à un rappel des Bruins en prévision des séries éliminatoires.

« On me parle plus ou moins. Ils viennent de rappeler un gars qui est quatrième centre. Je ne sais pas. Je ne veux pas y penser. Je vis le moment présent. J’espère être rappelé, mais je ne suis pas à côté du téléphone à attendre. »

Son après-carrière ? « J’ai plusieurs choses en tête, mais pas de réponse claire. Je peux me voir coacher ou diriger une équipe. D’un autre côté, je vais peut-être avoir des offres dans les médias. On verra. »

Maxime Talbot est l’un des hockeyeurs les plus brillants du milieu. La transition devrait en principe s’opérer en douceur, quand elle aura lieu.

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